Philosophie,sociologie et anthropologie

L’INTÉGRATION DES SOCIÉTES PLURALISTES : UNE AFFAIRE DE DROIT OU DE SOLIDARITÉ ?

Ethiopiques n°82.

Littérature, philosophie, art et pluralisme

1er semestre 2009

Ce texte a pour objet le débat sur la priorité des libertés fondamentales tel qu’il se dégage de la pensée politique contemporaine en écho aux discussions entre libéraux et communautariens visant à prendre en charge le fait du pluralisme, à savoir la coexistence de valeurs et de normes opposées ou simplement distinctes. Nous analyserons comme question inaugurale : les défis du pluralisme sont-ils mieux assumés par une juste interprétation du système de droits constitutionnel et démocratique ?

L’interrogation, loin d’être rhétorique, peut nous ramener au plus près d’une équivocité fondamentale qui marque la politique partagée entre la quête du bien commun et du juste. Pour autant qu’elle domine la politique démocratique contemporaine, cette équivocité peut trouver à s’infléchir, au-delà des élaborations doctrinales rivales, au pied de la solidarité (abstraite), croyons-nous, dans le sens d’Habermas pour qui « à côté de l’instance hiérarchique de régulation, celle de la puissance souveraine de l’État, et de l’instance de régulation décentralisée du marché, et donc à côté du pouvoir administratif et de l’intérêt de chacun, la solidarité apparaît comme la troisième source de l’intégration sociale » [2].

La trilogie des ressources, pour en comprendre la nécessité, procède d’une étiologie de la société contemporaine qui conclut à sa complexité et à sa fragilité. Le rôle des ressources et des doctrines signalées est d’en tenir compte, mais surtout d’y faire face. Aussi importe-il de revenir sur les signes voire les signalements qui permettent une meilleure intellection de la société pluraliste (1), avant de faire venir au jour les discussions et les solutions clairement mobilisées à cet effet ; le moment habermassien de la solidarité y tenant lieu de moment terminal de la marche vers l’intégration sociale (2).

  1. LA SOCIÉTÉ PLURALISTE : UNE SOCIÉTÉ DE VALEURS ET DE NORMES CONCURRENTIELLES

Le fait du pluralisme, pour évident qu’il puisse paraître, n’est pas de réception homogène. Autrement dit, il n’est pas vécu de la même manière dans un espace encore accroché au monothéisme religieux que dans des espaces acquis aux « mots d’ordre de raison, de liberté, de bonheur pour le plus grand nombre d’hommes possible, ou de justice pour tous [3] » des temps modernes, [selon le mot de Max Horkheimer]. Mais, à l’échelon purement politique, c’est chez Max Weber qu’on retrouve cette orchestration avec fanfare de la guerre des dieux et du type de légitimation qui en résulte.

Désenchantement des mondes religieux et des valeurs

Depuis Max Weber, on sait que la thèse du désenchantement du monde s’organise sur la tombe des pouvoirs charismatique et religieux. Ces pouvoirs, qui jouissaient auprès des citoyens d’une légitimité assise respectivement sur le charisme et le sacré, ont cédé le pas à un type de légitimité que structure « la domination en vertu de la « légalité », c’est-à-dire de la croyance à la validité d’une codification légale et de la « compétence » objective fondée sur l’application de règles instituées de manière rationnelle, donc en vertu de la disposition à l’obéissance et à l’accomplissement des devoirs conformément à cette codification » [4]. Que cette codification ait été largement influencée voire caporalisée par les bourgeois est ce que dénonce la Théorie critique. Pour Habermas notamment, la sphère de la domination légale a très vite pris la figure de la domination légale bourgeoise, contre le projet initial des bourgeois de dénoncer l’ordre féodal tout en se gardant de le reproduire. Historiquement, au moment de la subversion bourgeoise de la loi correspond un autre, celui de massives levées de boucliers en écho dans cette réflexion de Horkheimer :

« Contrairement aux utopistes qui rejetaient l’ordre existant, les partisans du droit naturel déclaraient que le nouvel État bourgeois était, par essence, la garantie du bien général, qu’il constituait la meilleure assurance pour la vie de ses citoyens et qu’à cette époque il représentait directement le progrès et la justice. Cette affirmation ayant été rigidement maintenue par la suite, sans que l’on continue de confronter l’État réel avec le but proclamé, elle s’est transformée en pure idéologie » [5].

Le désenchantement du monde politique qui en résulte est d’autant plus énorme qu’alors que les légitimités et les légitimations assises sur la Tradition et le Charisme semblent ouvertement combattues ; le droit, même institué démocratiquement, aurait du mal à se protéger contre la transgression, pis, contre le rejet. Ceux qui rejettent le droit ou le combattent, expriment, en général, des préférences, des buts lésés dont la prise en compte reste fortement attendue. [Leur rapport au droit manifeste, par conséquent, le pluralisme des convictions (communes) autant que des biographies individuelles, qui fait suite à un monde sans code religieux univoque]. On assiste à une pluralisation des codes et des cadres systémiques, sans que cela signifie que la question de la pluralité est bien menée et traitée.

Démultiplication des codes sociaux et des cadres systémiques

Est complexe, écrit Yannis Papadopoulos en échos aux études réalisées par Niklas Luhmann [6] sur la question, un monde où « chacun a tendance à ne fonctionner que selon son propre « codage » du monde et à rester indifférent quant aux signaux émis par son environnement, quant aux externalités qu’il cause, etc. » [7]. Dans un tel contexte, que peut le droit, en dépit de l’apologie dont il bénéficie en tant que médium par excellence de l’intégration sociale au seuil des sociétés complexes ? Parler de désenchantement des mondes politiques revient donc à reconnaître une certaine stérilisation du droit qui signifie sa perte d’autorité ou de celle précisément des institutions dont il assure la médiation auprès des sociétaires. Selon Horkheimer,

« l’autorité en tant qu’état de dépendance accepté peut représenter aussi bien des rapports progressistes, adéquats aux intérêts des individus en cause, favorables à l’épanouissement des forces humaines, que l’idée même des relations et de représentations sociales artificiellement maintenues depuis longtemps erronées qui vont à l’encontre des intérêts de la collectivité » [8].

La philosophie politique des Lumières qui postule « une forme d’association qui défende et protège de toute la force commune la personne et les biens de chaque associé, et par laquelle chacun s’unissant à tous n’obéisse pourtant qu’à lui-même » [9], est ainsi visée, car comme hier, les individus sont aujourd’hui massifiés en fidèles, en ouvriers ou encore en clients des pouvoirs bureaucratiques.

L’activité stratégique, orientée vers le succès, relayée dans les médias que sont l’argent et l’administration, en tant que systèmes de l’intégration sociale, est, entre autres, suspectée de desservir l’émancipation sociale plus qu’il ne paraît. Cela transparaît dans l’analyse qui les donne pour « des médias d’une communication déverbalisée » [10] commandant « des rapports sociaux dégagés de toute norme et de toute valeur – et d’une façon générale de toute formation de consensus par le langage – surtout dans ces sous-systèmes de l’activité économique et administrative ayant acquis une autonomie par rapport aux contextes du monde vécu » [11].

Le monde social est présenté comme baignant dans une multiplicité de systèmes et de sous-systèmes qui semblent être incapables de décrypter, par la nature de leur « langage », le fait de l’autonomisation accrue des individus et du holisme culturel des groupes. Alors que les mécanismes systémiques déployés sont censés intégrer ceux-là, le point d’Archimède semble, en effet, être loin d’être trouvé. Cela se ressent dans les constructions des libéraux et des communautariens qui partent de la réalité des libertés fondamentales à garantir par l’État constitutionnel démocratique, mais se séparent au point de se perdre dans des virtualités [12], sur les voies à suivre, parce que justement les impératifs du marché et du pouvoir administratif ne sont pas modifiables à volonté. [S’aveugler, dans le même temps, sur les nouveaux équilibres qu’appelle le pluralisme, pourrait exacerber les conflits dans le monde, sous la forme du retour du fondamentalisme [13] religieux couplé au terrorisme [14], si ce n’est sous celle d’une nouvelle santé accordée aux rébellions armées]. La question à poser est de savoir comment faire face, à la fois, à l’hypothèse d’une hostilité libérale à l’intervention de l’Etat dans le domaine propre aux libertés individuelles et à celle d’une efficacité communautarienne de l’Etat soucieux du bien commun. Le point focal de ces conjectures est connu, à savoir l’implémentation des promesses de la souveraineté populaire qui en sont, en fait, les réquisits généraux à la lumière desquels les débats sophistiqués, tels ceux qui opposent libéraux et « communautariens », peuvent être saisis comme étant sans intention mystificatrice en direction des profanes.

Rappel des réquisits de l’État de droit démocratique

[La représentation de la démocratie devrait pouvoir aujourd’hui faire l’économie d’un retour fastidieux à l’Antiquité gréco-latine pour y exhumer Athènes la démocrate vertueuse] ! Car, l’époque moderne, sur ce point, trouve grâce à Rousseau et Kant notamment de quoi faire communiquer et unir système de droits et démocratie. A partir de ces deux philosophes, il apparaît clairement que l’exigence de légitimité d’un ordre juridique ne peut être obtenue que par la force d’intégration sociale de la volonté concordante et unie de tous. Il en ressort que dans sa nature, la démocratie est le fait pour des habitants d’une cité, c’est-à-dire des citoyens, de participer directement ou indirectement à l’élaboration des lois qui les concernent. Ces derniers ne se sentent concernés par la vie de l’État et dans l’État que pour autant que ce principe d’auto-législation est une réalité. Mais, en réalité, la nature de la démocratie, rendue par l’acte de se donner à soi-même des lois, est plus complexe que cela ne paraît, à première vue. Les différents prédicats (représentatif, parlementaire, multiculturel, communautariste, libéral, radical, républicain, etc.) qui accompagnent ou spécifient le substantif en sont la preuve. Ainsi, la démocratie parlementaire rend compte d’un type de gestion de la cité, type bien différent mais complémentaire de la démocratie radicale, placée, elle, au cœur de la problématique de la gestion du pluralisme politique et culturel.

En fait, la démocratie représentative signale l’échec de la démocratie directe que Rousseau avait formellement recommandée à la république genevoise, pour la seule et bonne raison que le gouvernement démocratique conviendrait aux petits Etats [15]. A l’échelon des grands Etats, la démocratie directe, la participation effective des citoyens, cède le pas à la démocratie représentative. Ici, la compétence législative qui appartient aux citoyens dans leur ensemble est exercée au sein des organismes parlementaires où s’élaborent les lois selon une procédure démocratique, en l’occurrence le vote. Ceux qui votent à l’intérieur des organismes parlementaires sont les personnes désignées ou élues en tant que députés. Ceux-ci représentent et les personnes, et leurs intérêts. Ils décident en leur nom et pour leur compte, selon qu’ils ont un mandat libre ou un mandat impératif. Mais, dans un cas comme dans l’autre, le régime de fidélité est de mise. Être fidèle aux aspirations des personnes représentées ou se faire l’écho de leurs préoccupations et intérêts ferait partie des vertus du bon député. Parce que difficiles à observer, ces vertus en viennent à perturber le régime de la délégation.

Parler de crise de la démocratie représentative, c’est justement mettre le doigt sur ce moment de la trahison des intérêts des mandants, mais aussi et surtout saisir les limites de la représentation, qui ne saurait être, selon le mot de Carl Schmitt repris par Jean-François Kervégan, « une Vertretung des intérêts particuliers » [16]. Et, c’est à juste titre que Habermas écrit qu’il existe des questions, telles celles en relation étroite avec l’identité collective, qui ne sauraient être conduites uniquement qu’à titre représentatif :

« Les discussions menées par représentation ne peuvent satisfaire à cette condition d’une participation égale de tous les intéressés que si elles demeurent perméables, sensibles et ouvertes à toutes les suggestions, à tous les thèmes et à toutes les contributions, à toutes les informations et raisons qui lui arrivent d’un espace public pluraliste, lui-même structuré en fonction de la discussion, et donc pauvre en teneur de pouvoir et proche de la base » [17].

Lorsque la représentation tombe au niveau de la célébration des intérêts particuliers et égoïstes ou lorsqu’elle s’éloigne des attentes de « la base » [18] et par ce biais « d’un espace public pluraliste » [19], les lois s’en ressentent et s’exposent à la désobéissance des mandants. Mieux, lorsqu’elle tourne, selon le mot de Tocqueville, à « l’omnipotence de la majorité » [20], il faut s’attendre à ce que le « despotisme légal du législateur » [21] soit dénoncé et combattu. Aujourd’hui, si la situation est moins funeste que celle qu’avait décrite Tocqueville sur le compte des Etats-Unis au XIXe siècle, il reste que des auteurs contemporains comme John Rawls, Ronald Dworkin, Charles Taylor, Charles Larmore [22], etc. poursuivent le diagnostic des sociétés démocratiques à partir du sol américain. Ils y découvrent, plus d’un siècle après Tocqueville, le spectacle insidieux de l’arbitraire des lois de la majorité et conseillent, à certaines conditions, les arrangements et les compromis qui alimentent les clivages à l’intérieur de la démocratie contemporaine, pour revenir dans les frontières de la justice et du bien commun. L’une de ces conditions est le respect du schéma classique de l’élaboration des lois par les parlementaires pour autant qu’ils sont censés légiférer pour tous. Mais s’il arrive que ces derniers produisent des lois injustes pour des minorités non représentées aux parlements ou pour de simples citoyens délibérant en toute conscience (indépendance), c’est toute la logique parlementaire qui s’expose à des contributions extraparlementaires susceptibles d’arracher, lorsqu’elles sont pertinentes, aux majorités parlementaires le monopole de la législation au profit de lois affirmatives des minorités et groupes marginaux ou discriminatoires. La portée de ces contributions ne peut être entièrement saisie qu’à la lumière du prédicat « radicale » par lequel Habermas spécifie une certaine pratique exigeante de la souveraineté populaire en contexte de société pluraliste.

Pour Habermas, par exemple, la démocratie ne peut être considérée comme simplement « une méthode pour choisir les dirigeants et les garnitures de l’appareil de direction » [23]. Change alors assez nettement, pour lui, ce que représenter veut dire, en démocratie. « Représenter, écrit-il, ne signifie rien d’autre que faire en sorte, lors des choix des députés, que l’on dispose d’un éventail aussi large que possible de points de vue interprétatifs, en intégrant la vision qu’ont d’eux-mêmes et du monde les groupes marginaux » [24]. Comme telle, la représentation mobilise beaucoup d’énergies, qui induisent des foyers de tension. Pour en réduire les nuisances, il est proposé aux députés d’observer une double attitude, l’une visant leur capacité d’analyse et d’interprétation, l’autre renvoyant à leur disposition d’esprit à écouter les groupes minoritaires. Au-delà de ces propositions, la question de la représentation de tous les intérêts en présence se joue sur le front chaud, non de la société politique et de son arène parlementaire, mais de la société civile. Il s’agit de rétablir, entre l’activité institutionnelle classique, déclinée sur la séparation institutionnelle des pouvoirs théorisée par Montesquieu, propre aux démocraties représentatives, et l’idéal démocratique, un lien aussi participatif que délibératif. C’est en vertu d’un tel lien que la relation aux projets des libéraux et des communautariens peut se comprendre et recevoir des titres de validité dans le cadre des défis propres au pluralisme.

  1. LE SYSTÈME DES DROITS ET LEUR INTERPRÉTATION EN CONTEXTE DE PLURALISME : ENTRE CONFLICTUALITÉ ET SOLIDARITÉ

Il n’est pas inutile de souligner qu’on ne peut pas penser le consensus sans présupposer le conflit [25] qui l’oblitère. Or, le conflit est largement consubstantiel au pluralisme et sa gestion, c’est une entreprise de déminage qui peut mettre en selle le pluralisme ou le congédier. Il n’y aurait donc pas de vertu préalable à donner à un monde pluriel, pour autant que ceux qui l’habitent y sont en continuité avec des traditions, des valeurs et des normes sur lesquelles parier un principe d’invariabilité reste quasiment impossible, de même que s’engager pour la fidélité des membres à leur égard. C’est dire que le monde pluralisé a ses zones de turbulences, ses archaïsmes, ses idéologies qui peuvent justifier que certains s’en détournent, alors que d’autres s’y accrochent.

La conception libérale de la gestion du pluralisme

Pour cette grande figure du courant libéral, John Rawls, auteur de Théorie de la justice [26], la coopération visée par le système des droits n’est pas pensable sans une théorie de la justice qui assure l’équité (equity/fairness) entre les différents acteurs de la chaîne de la coopération sociale. « Elle s’applique en premier lieu, donne-t-il à lire, à la structure de base de la société (laquelle est supposée être, dans le cas de la théorie la justice comme équité, une société démocratique) » [27]. Rawls précise que « cette structure se compose des principales institutions, politiques, économiques et sociales, et définit la manière dont elles s’adaptent les unes aux autres pour former un seul système unifié de coopération sociale » [28]. Celle-ci ne saurait, dans ce nouvel esprit démocratique, reposer sur des affinités éthiques d’ordre culturel, religieux ou sur les doctrines compréhensives ou métaphysiques vis-à-vis desquelles la législation démocratique s’est émancipée pour pouvoir répondre « aussi bien à la culture politique publique d’une société démocratique qu’aux traditions selon lesquelles elle interprète la constitution et les lois fondamentales » [29].

Rawls met, par conséquent, dans la balance de la coopération, d’une part, l’idée d’un exercice rationnel et raisonnable de la citoyenneté démocratique, et, d’autre part, celle d’un respect du caractère privé ou personnel de cette même citoyenneté en raison de sa relation consubstantielle aux droits subjectifs. Plus explicitement, Rawls écrit que « la notion de coopération sociale n’est pas simplement celle d’une activité sociale coordonnée, efficacement organisée et guidé par des règles publiquement reconnues, afin d’atteindre un but d’ensemble » [30]. Il met en avant deux éléments pour autant que « la coopération sociale doit toujours viser un bénéfice mutuel » [31]. Il s’agit, d’une part, d’un élément raisonnable et, d’autre part, d’un élément rationnel. Alors que le second élément se réfère à « l’avantage rationnel de chaque participant », le premier postule « des idéaux de réciprocité et de mutualité au nom desquels tous ceux qui coopèrent doivent en tirer des avantages ou partager des charges communes, d’une façon appropriée, évaluée à partir d’un critère convenable de comparaison [32] ». Ce ne sont pas les seules justifications que Rawls mobilise pour convaincre de la priorité des libertés de base et surtout pour écarter les faux sentiments d’injustice qui naissent des indistinctions entre leur restriction et leur contrôle. Il ne faut pas prendre l’un, nécessaire, pour l’autre, inacceptable en régime de libertés démocratiques.

Le gain majeur de cette approche semble être indiscutablement la place de choix accordée au citoyen comme agent raisonnable et rationnel susceptible de satisfaire aux arrangements en vue d’une politique publiquement débattue et arrêtée de manière telle que soit impensable la possibilité d’une quelconque violation des libertés fondamentales. Car, la raison d’être de ce débat public d’essence kantienne, à moins de vouloir le dénaturer, est de garantir lesdites libertés qui renvoient, en fait, au droit naturel (rationnel) des individus conformément à l’esprit des Lumières. C’est en continuité avec celui-ci que Rawls établit une priorité des droits-libertés nécessaires à l’efficacité du Rule of Law face aux expériences quotidiennes individuelles de la liberté et au souci de les concilier sans écorner le pluralisme ou contrarier l’ambition d’asseoir une justice sociale.

La conception communautarienne de la gestion du pluralisme

Le point de départ des thèses communautariennes est si important qu’il renvoie aux hypothèses anciennes avancées par Aristote qui plaçait la politique et l’éthique sous le sceau de la co-originarité. En d’autres mots, vivre en cité signifiait alors qu’on avait en partage une conception commune du bien au succès duquel tous les membres du corps devaient travailler. « Si l’homme déteste ceux qui contrarient ses impulsions, quelque justifiée que soit leur conduite, la loi en prescrivant ce qui convient ne saurait nous peser » [33] fait remarquer Aristote, avant de soutenir qu’« il est donc excellent d’instituer une surveillance commune et raisonnable et surtout de lui donner de l’efficacité » [34], non sans avoir proposé, en cas de défaillance, ceci : « si l’Etat n’assume pas ce soin, on peut penser que la charge de faciliter à ses enfants et à ses amis la pratique de la vertu, d’avoir tout au moins la volonté déterminée de faire, revient de droit à chaque citoyen » [35].

C’est une idée similaire qui marque la philosophie politique de Rousseau en ce que le contrat social se construit autour de la sauvegarde de l’intérêt commun, en tant qu’intérêt général, duquel procèdent tous les intérêts particuliers. En reconnaissant que la politique ne pouvait faire un pas sans rendre hommage à la morale, Kant revient, lui aussi, sur cette détermination morale de la vie en cité. Mais, alors que chez Kant l’autonomie du sujet reste entièrement intacte dans un tel exercice, chez Rousseau, la liberté du citoyen n’existe que dans la soumission stricte à la souveraineté populaire. Aussi Habermas explique-il, dans le chapitre III de Droit et démocratie, qu’à la suite d’Aristote, Rousseau a stimulé certaines des orientations que suivent aujourd’hui les communautariens et Kant, celles que mettent en avant les libéraux. L’analyse de Habermas est d’autant plus fondée qu’une des figures de la thèse communautarienne, Charles Taylor, explique comment la communauté politique, pour correspondre au projet d’épanouissement collectif qui en fait sa raison d’être, doit se donner des droits « infrangibles » en tant qu’horizons de droits à satisfaire sans concession :

« Il faut distinguer, écrit Taylor, d’un côté les libertés fondamentales – celles qui sont infrangibles, donc verrouillées de manière inexpugnable – et de l’autre les privilèges et les immunités qui sont importants, mais qui peuvent être abolis ou restreints pour des raisons de politique publique à la condition qu’il y ait une raison urgente à le faire » [36].

Les politiques publiques, si elles sont expliquées et justifiées, passent donc avant les expressions individuelles du système des droits. Celui-ci est alors interprété dans une perspective de priorité du bien collectif sur les droits individuels, et partant peut s’écarter du chemin de la justice sociale en tant que, d’une certaine manière, il serait fondé sur une balance rigide entre les libertés collectives et les libertés individuelles. C’est dire qu’un « communautarien » ne verra guère d’inconvénient que l’État favorise, par des lois affirmatives ou discriminatoires, la promotion d’une langue ou d’un groupe culturel donné.

« Une société comme le Québec, explique Taylor, ne peut que se vouer à la défense et à la promotion de la langue et de la culture françaises même si cela implique des restrictions des libertés individuelles. Le pays ne peut resterindifférent aux orientations culturelles et linguistiques. Un gouvernement qui ignorerait cette nécessité soit ne répondrait pas à la volonté de la majorité, soit serait le reflet d’une société à ce point démoralisée qu’elle serait au bord de la dissolution en tant que pôle d’allégeance patriotique. Dans chacun de ces cas, conclut Taylor, la perspective d’une démocratie libérale ne serait pas rose » [37].

On peut en dire autant de la voie communautarienne. Autrement dit, sa perspective est d’autant moins rose que la mise en avant de différences culturelles peut conduire à une catégorisation des individus pouvant ouvrir la voie à toutes sortes de stigmatisations et de discriminations. Si, comme le rappelle Habermas en guise d’économie de la pensée libérale, « des libéraux comme Rawls et Dworkin exigent un ordre juridique neutre du point de vue éthique devant assurer à tout un chacun la chance de poursuivre sa conception chaque fois particulière du bien » [38], c’est pour protéger l’espace public d’une inflation de revendications communautaires, culturelles et identitaires que l’État ne pourrait pas assumer ou, s’il s’y engageait, ne pourrait y faire face sans engendrer des sentiments d’injustice chez d’autres individus et ainsi exacerber, au lieu de les stabiliser, les tensions interculturelles.

Pour autant, il ne peut être soutenu sans contradiction une éthique individuelle du bien commun et partant de la vie bonne, dans laquelle l’Etat de droit démocratique ne devrait pas intervenir, à moins de vouloir vouer aux gémonies la thèse communautarienne du bien public et celle d’une « véritable consistance aux exigences de la solidarité » [39], explique Alain Renaut. Au nom de telles exigences, les communautariens tiennent à « opposer au sujet libéral, sujet individuel abstrait, un autre sujet de droit : la communauté » [40], voire à substituer celle-ci à celui-là. Quoique, dans ses réflexions politiques, la centralité de la solidarité soit incontestable, Habermas n’entend pas, pour sa part, sacrifier les libertés individuelles sur l’autel de la communauté. Il croit possible une voie médiane qui réconcilie libéraux et communautariens. C’est la voie de l’intégration républicaine qui ne fixe pas, par avance, la priorité d’une autonomie sur l’autre. Les deux échelons étant d’égale valeur, leur révision selon un ordre des priorités devra passer avec succès le test de l’universalité et du consensus.

La conception républicaine du pluralisme : vers l’impératif de solidarité

Les analyses précédentes ont buté contre des obstacles qui ne sont pas qu’internes aux débats entre libéraux et communautariens. Ce sont des points d’achoppement auxquels l’on se heurte quand on veut jouer le jeu du pluralisme, celui de reconnaître les différenciations dans leur complexité et de conduire une politique d’intégration, pour autant que la société ne doit pas mourir du pluralisme, mais qu’elle devrait, au contraire, pouvoir s’en nourrir et en sortir enrichie Le prix à payer alors n’a pas à être supporté uniquement par les riches, pas plus qu’il ne peut l’être par les pauvres. Revenant sur l’histoire qui aboutit à de telles classifications qui ne sont pas réductibles aux seuls couples pauvres/riches [41], Habermas pose la question suivante : « Ces phénomènes sont-ils compatibles avec une théorie individualiste des droits ? [42] ». C’est à la lumière de cette interrogation qu’il convoquera, à son tour, les thèses qui viennent d’être exposées sur les libéraux et les « communautariens ». Pour Habermas, la théorie individualiste est si déterminante qu’elle distingue l’époque moderne de la période ancienne. Ne pas savoir la préserver, c’est ruiner ce grand héritage. Qu’il s’agisse du libéralisme 1 ou du libéralisme 2, de l’équipe « L » ou de l’équipe « C », Habermas juge que les interprétations qui sont fécondes pour nos sociétés post-traditionnelles et donc pluralistes sont celles qui travaillent à la préservation (en contexte) des libertés fondamentales

« Si le système des droits doit être réalisé de manière démocratique, ces contextes doivent être perçus et considérés en portant une attention croissante aux contextes. L’universalisation des droits civiques est toujours le moteur d’une différenciation progressive du système juridique ; celui-ci ne peut assurer l’intégrité des sujets de droit sans une stricte égalité de traitement – régulée par les citoyens eux-mêmes – des contextes de vie qui garantissent leur identité. Si l’on corrige la lecture sélective de la théorie du droit dans le sens d’une telle compréhension démocratique de la réalisation des droits fondamentaux, il n’est pas nécessaire d’opposer aux réductions du libéralisme 1 un modèle introduisant des droits collectifs qui sont étrangers à ce système » [43].

Pour bien comprendre la portée de ces lignes, il importe de faire deux distinctions qui définissent d’une part, la nature de la démocratie, et d’autre part, celle de la théorie de la connaissance promue. Celle-ci renouant avec l’intersubjectivité (hégélienne) au détriment de la subjectivité (cartésienne), la dépasse dans une approche discursive des intérêts démocratiques en jeu. Concernant précisément la démocratie, elle est à comprendre comme le système politique dans lequel « ceux qui sont soumis au droit en tant que destinataires se pensent aussi comme auteurs du droit » [44]. Il s’agit bien là de la souveraineté populaire reflétée en son point nodal qu’est l’auto-législation. Sa portée normative est incontestablement valorisée, lorsque Habermas lui ajoute l’agir communicationnel en tant que paradigme opposé à la rationalité instrumentale orientée vers l’activité finalisée, et le succès individuel, en tant que paradigme générateur de normes juridiques aussi universelles que le Lebenwelt (le monde vécu) des citoyens le permet. Les droits de l’homme en font partie sans être l’étalon dominant a priori, de même que les conceptions rivales de la bonne vie des citoyens. Il y a manifestement une tension permanente entre la prétention à la validité normative et la factualité, sur laquelle Habermas refuse de s’aveugler en suggérant que la fonction de l’agir communicationnel est bien de la tension surmontée, chaque fois qu’elle se présentera dans les débats en vue d’établir des normes pour la stabilisation et l’intégration des sociétés pluralistes actuelles. En d’autres mots, l’agir communicationnel est le processus de reconnaissance intersubjective de propositions qui, après analyse de leur contenu et des intérêts universalisables qu’elles impliquent, sont revêtues du sceau de la validité et acquièrent une portée normative permettant à une communauté de vie politique et juridique d’exister comme telle. Ce n’est pas tout. Les conquêtes de l’agir communicationnel seraient inachevées si des volontaires de la société civile-vivace [45], conscients de la force productive de communication de leur engagement (militant autant que savant) sur les questions qui frappent la société, ne venaient pas à la rescousse du travail de l’administration et de l’argent.

Dans ces trois échelons, à savoir l’administration, l’argent et la solidarité, c’est toujours en droits que se traduisent les effets d’engagement. La question inaugurale qui était de savoir si l’intégration des sociétés complexes relevait du droit ou de la solidarité, est délivrée ainsi d’une certaine ambiguïté que la conception commune de la solidarité, sous le régime exclusif des prestations sociales, a contribué à créer. Pour qu’elle produise des mécanismes d’assistance, en usage en France notamment, tels que les APE (Allocation parentale d’Education), ASFNEC (Allocation Spéciale du fonds national de l’emploi), ARPEC (Allocation de remplacement pour l’emploi), RMI (Revenu minimum d’insertion) [46], dont les effets intégrateurs des populations sont difficiles à nier, il faut une approche du système des droits qui les permettent. Dans le cas contraire, les prestations sociales pour les uns seront vite vécues par les autres comme une manière arbitraire de l’État d’extorquer des droits au nom d’une prétendue action de solidarité ou simplement comme une façon inacceptable d’arbitrer les conflits d’intérêts sociaux.

CONCLUSION

La coexistence de valeurs opposées ou distinctes au sein d’une même communauté politique de référence peut être saisie comme une organisation imputable à la faculté de choix et de jugement que l’on reconnaît à chaque citoyen. C’est l’option libérale que nous avons discutée à la lumière de la perspective non moins libérale (démocratique) des communautariens en regard desquels la division objective de la communauté politique en plusieurs groupes humains, eux-mêmes constitutifs de certains liens d’où peuvent émerger des droits et devoirs dont il faut tenir compte, n’est pas à minimiser. S’il s’agit d’un conflit des doctrines politiques sur le sol américain, l’enjeu n’est pas moins réel et extensible à toutes les organisations à matrice démocratique où qu’elles se trouvent. Les arrangements et les politiques qu’elles exigent pour assumer le fait du pluralisme, non pas simplement dans des termes d’un modus vivendi [47], mais davantage dans ceux d’une solidarité républicaine [48], nous ont conduit à privilégier la perspective habermassienne de l’agir communicationnel qui met l’accent sur l’acceptation individuelle aussi bien des principes que des normes, faisant ainsi planer l’épée de Damoclès préfigurée par leur critique pouvant aller jusqu’à leur rejet, à tout moment.

Aux sujets individuels, peut-on nous objecter, sont accordés trop de force et de vertu, mais il nous a semblé pertinent et moins périlleux de situer notre discours à cet échelon où la démocratie, loin d’être modeste, est une entreprise difficile et exigeante qui appelle la théâtralisation continue du conflit et confère à chacun, dans la société citoyenne notamment, la tâche d’expliciter tous les éléments largement devenus inconscients (valeurs démocratiques) afin de les amener à être vus comme un équilibre réfléchi et solidaire, afin de mieux protéger l’ordre juridico-politique qui soutiennent ces valeurs.

BIBLIOGRAPHIE SELECTIVE

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[1] Université de Bouaké, Côte d’Ivoire

[2] HABERMAS, Jürgen, L’Intégration républicaine, Essais de théorie politique, traduction de Rochlitz, R, Paris, Fayard, 1998, p.260.

[3] HORKHEIMER, Max, Théorie traditionnelle et théorie critique, traduction de Maillard, C. et de Muller, S., Paris, Gallimard, 1974, p.278.

[4] WEBER, Max, « La profession et la vocation de savant », in Le Savant et le politique, traduction et notes de Colliot-Thélène, C., Paris, La Découverte, 2003, p. 119-120.

[5] HORKHEIMER, Max, Les débuts de la philosophie bourgeoise de l’histoire. Suivi de Hegel et le problème de la métaphysique, traduction de Authier, D., Paris, Payot, 1980, p.107.

[6] LUHMANN, Niklas, La confiance : un mécanisme de réduction de la complexité sociale, traduction de Bouchard, S. et Introduction à l’édition française de Sosoe, K.L., Paris, Economica « études sociologiques », 2006.

[7] PAPADOPOULOS, Yannis, « Démocratie directe, mobilisation, intégration », in L’ignorance des peuples, Paris, PUF, 1998, p.96-97.

[8] HORKHEIMER, Max, op. cit., p.256.

[9] ROUSSEAU, Jean-Jacques, Du Contrat social, Paris, Hachette/Pluriel, [1972], p. 178.

[10] HABERMAS, Jürgen, Logiques des sciences sociales et autres Essais, traduction de Rochlitz, R., Paris, P.U.F., 1987, p.97.

[11] HABERMAS, Jürgen, Logiques des sciences sociales et autres Essais, op. cit., p.97.

[12] PICAVET, Emmanuel, « La doctrine de Rawls et le pluralisme comme modus vivendi », in Revue internationale de philosophie, n°237, 2006.

[13] HABERMAS, Jürgen, L’Intégration républicaine. Essais de théorie politique, p.227.

[14] HABERMAS, Jürgen, et DERRIDA, Jacques, Le « concept du 11 septembre », traduction de Bouchindhomme, C., Paris, Galilée, 2003.

[15] ROUSSEAU, Jean-Jacques, Projet de constitution pour la Corse, précédé de Discours sur l’économie politique et Considérations sur le gouvernement de Pologne, Paris, GF-Flammarion, 1990, p.182.

[16] KERVEGAN, Jean-François, « Carl Schmitt et la crise de la représentation », in Crise et pensée de la crise en droit. Weimar, sa république et ses juristes, Paris, ENS Editions, 2002, p. 150.

[17] HABERMAS, Jürgen, Droit et démocratie. Entre faits et normes, traduction de Rochlitz, R. et Bouchindhomme, C., Paris, Gallimard, 1997, p. 202.

[18] Id., ibid.

[19] Id., ibid.

[20] TOCQUEVILLE, Alexis, De la démocratie en Amérique, traduction de Mayer, J-P., Paris, Gallimard, 1975, p.149.

[21] TOCQUEVILLE, Alexis, De la démocratie en Amérique, op. cit., p.149.

[22] Voir, à ce sujet, l’important travail de regroupement de textes effectué par BERTIN, A., DA SILVEIRA, P. et POURTOIS, H ; ouvrage publié sous le titre Libéraux et communautariens, Paris, PUF, 1997.

[23] HABERMAS, Jürgen, Raison et légitimité. Problèmes de légitimation dans le capitalisme avancé, traduction de Coste, J., Paris, Payot, 1978, p.154.

[24] HABERMAS, Jürgen, Droit et démocratie. Entre faits et normes, op. cit., p. 203.

[25] SIMMEL, Georges, Le conflit, traduction de Muller, S., Paris, Circé, 1992. A la page 28, Simmel écrit que « ni l’amour, ni la division du travail, ni l’attitude commune à l’égard d’un tiers, ni l’amitié, ni l’appartenance à un parti, ni l’intégration à une hiérarchie ne pourraient suffire à engendrer ou à porter durablement une union historique, et lorsque cela arrive néanmoins, c’est que le processus désigné comme tel contient déjà en majorité des formes de relations que l’on peut distinguer les unes des autres ; l’essence de l’âme humaine, c’est de ne pas se laisser attacher aux autres âmes par un seul fil , même si l’analyse scientifique s’arrête bien souvent , elle aussi, aux unités élémentaires en étudiant leur capacité spécifique de liaison ».

[26] RAWLS, John, Théorie de la justice, traduction de Audard, C., Paris, Seuil, 1987.

[27] RAWLS, John, in HABERMAS, Jürgen et RAWLS, John, Débat sur la justice politique, traduction de Rochlitz, R. et de Audard, C., Paris, Cerf, 1997, p.54.

[28] Id., ibid.

[29] Id., ibid., p.55.

[30] RAWLS, John, « Les libertés de base et leur priorité », in BERTIN, André, DA SILVEIRA, Pablo et POURTOIS, Hervé (éd.), Libéraux et communautariens, Paris, PUF, 1997, p.181.

[31] Id., ibid.

[32] Id., ibid.

[33] ARISTOTE, Éthique de Nicomaque, traduction de Voilquin, J., Paris, GF-Flammarion, 1965, p.284

[34] Id., ibid.

[35] Id., ibid.

[36] TAYLOR, Charles, Multiculturalisme, différence et démocratie, traduction Canal (D.A.) Paris, Aubier, 1992, p.81.

[37] TAYLOR, Charles, « Quiproquos et malentendus : le débat communautariens-libéraux », in BERTIN, André, DA SILVEIRA, Pablo et POURTOIS, Hervé (éd.), Libéraux et communautariens, Paris, PUF, 1997, p.118.

[38] HABERMAS, Jürgen, L’Intégration républicaine, Essais de théorie politique, p.208.

[39] RENAUT, Alain, in Magasine littéraire, n°380, octobre 1999, p.24.

[40] Id., ibid.

[41] HONNETH, Axel, La lutte pour la reconnaissance, traduction de Rusch, P., Paris, Cerf, 2000 que HABERMAS cite d’ailleurs, évoque des différenciations nées du manque d’estime, du sentiment d’injustice et du déni de reconnaissance, dont il faut désormais tenir compte.

[42] HABERMAS, Jürgen, L’Intégration républicaine. Essais de théorie politique, op. cit., p.206.

[43] Id., ibid., p.213.

[44] HABERMAS Jürgen, Droit et démocratie. Entre faits et normes, op. cit., p. 138.

[45] Id., ibid., p.393.

[46] MARCHAND, Olivier, Plein emploi, l’improbable retour, Paris, Gallimard, 2002.

[47] PICAVET, Emmanuel, « La doctrine de Rawls et le pluralisme comme modus vivendi », in Revue internationale de philosophie, n°237, 2006.

[48] Voir aussi BIZEUL, Yves, « Hospitalité et reconnaissance dans les modèles français et allemand d’intégration. Culturalisme, républicanisme et société civile en débat », in Hospitalité et solidarité. Éthique et politique de la reconnaissance, Strasbourg, Presses Universitaires de Strasbourg, 2006, p.181-196.