Poèmes

GHETTO

Ethiopiques n°15

revue socialiste

de culture négro-africaine

 

Ghetto oh !

Ghetto !

mais oui Ghetto !

maisons apeurées rapiécées par la stridence des criquets

rues écorehées par les balles

Harlem Lauricisque Volga Soweto

et leur bruit de casseroles vides

et leur bruit de maracas

et leur bruit de bottes de flic.

Ghetto oh !

Ghetto !

mais oui Ghetto !

Lamento tintamarre tam-tam

Ma tête comme une poubelle

Mon rire coupe-gorge

Mes prières en note de guitare

Mais aussi ma colère

le rut de ma colère

et les boui-boui qui dégorgent le rhum

et les senteurs de putes aux carrefours

et le rire des maquereaux tambourinant le soir

Ghetto !

Ghetto oh !

mais oui Ghetto !

Ma voix sourde de saxo

la lune argentée de mon rasoir

la rosée de mon estafilade

Mon ghetto balafré

Mon ghetto

comme un fœtus fripé parmi les immondices

Il est au pitt un coq qui boit

à la source de son poitrail

la rosace de son sang !

 

Je vais, oh oui je vais

jusqu’où le pays se saborde. où le morne

s’éventre

pour faire une salve du salpêtre au soleil.

Il est au pitt un coq

qui boit

à la source de son poitrail

la rosace de son sang.

Je vais

dans les eaux de démence affoler les

saisons

abattre toutes les cartes truquées sur la

table de la mer

et faire évacuer les gradins du carnaval

Il est au pitt

un coq

qui boit à la source

de son poitrail

la rosace de son sang.

Je vais

où flottent les plombs de la souffrance

jusqu’où se déchiffre le hiéroglyphe

de l’amour

où l’homme

fracture le joug de ses pigments

et pour piller les caves où s’entasse

quand même le cresson

de l’espoir.

Il est au pitt

un peuple

chant égorgé par pressoir de folie

qui boit

à la source de son poitrail

la rosace

de

son

sang !