Philosophie

FEMINITE ET SUBJECTIVITE DANS L’ESPACE DEMOCRATIQUE AFRICAIN

Ethiopiques n°81

Littérature, philosophie et art

2ème semestre 2008

Il est un contraste entre la modernité politique dont se réclament nombre de pays africains et la persistance de pratiques socioculturelles antidémocratiques non moins revendiquées. Nous ne parlerons que de celles qui sont illustratives d’une injustice fondée sur le genre et d’une antinomie par rapport au principe d’égalité juridique (isonomia), caractéristique de tout espace qui se veut démocratique. Nous pensons à l’excision dans les pays négro-arabo-musulmans, à la polygynie – forme de polygamie où l’homme dispose de plusieurs femmes [2] -, aux difficultés liées à la maternité… Nous tenterons de repenser la subjectivité politique dans les démocraties balbutiantes d’Afrique, en y incluant les questions liées à la féminité. L’idée consiste à prendre le contre-pied de la thèse aristotélicienne de l’inaptitude intrinsèque de la femme à la rationalité et à l’autonomie morale. Qu’entendons-nous donc par féminité et par subjectivité ? La première notion désigne l’ensemble des caractères biologiques (réels) et psychologiques (supposés) propres à la femme, fût-elle d’Afrique ou d’ailleurs ; la seconde, elle, renvoie à une certaine féminitude, c’est-à-dire à l’acceptation ou au refus de ces caractères par la femme, lesquels servent de fondement à des préjugés culturels qui, eux-mêmes, engendrent des postures politiques. La subjectivité est le fait d’être sujet, autrement dit auteur d’actes assumés et de paroles réfléchies. Cette subjectivité est davantage juridique et éthique que psychologique.

Ainsi, il s’agit d’une argumentation de lege lata contre les « valeurs » traditionnelles sexistes, voire misogynes. Sur le plan éthique, un(e) citoyen(ne) ne doit pas craindre un(e) autre citoyen(ne) [3]. Libres et égaux devant la loi doivent être les concitoyen(ne)s. Certes, il existe sous tous les cieux une marge irréfragable entre le droit et le fait telle que nous serions mal inspirés de penser que l’Afrique, seule, eût pu faire exception en la matière. Seulement, ici, la profondeur et la distance entre ce qui est de jure et ce qui est de facto sont abyssales. Dès lors, comment saisir la féminité à l’aune des principes des droits de la personne et de la démocratie moderne ?

  1. TRADITIONALISME OU RATIONALISME ?

« Nous ne trouverons jamais dans l’histoire que ce que nous aurons d’abord mis nous-mêmes » [4].

En Afrique, féminité et subjectivité ne correspondent pas toujours. On distingue, à partir de la tradition, entre un sujet de droit d’essence – l’homme – et un sujet de droit de circonstance – la femme. Ainsi, le sexe est un critère non seulement discriminant, mais aussi déterminant. Le seul fait d’être homme ou femme vous assigne une position et une fonction sociales ; il en découle, on le comprend fort aisément, des attentes à la fois figées et différentes tant pour l’un(e) que pour l’autre. D’où l’idée que toute volonté de démocratisation est vouée à l’échec si elle n’a pas pour corollaire une relecture des textes traditionnels, à la lumière de la modernité démocratique dont se réclament les Etats africains. En d’autres termes, en Afrique comme ailleurs, toute modernisation de l’espace politique présuppose une certaine démythologisation de l’espace symbolique.

De la démythologisation de l’espace symbolique comme choix politique moderne

Il n’est pas rare de rencontrer une personne qui, tout en proclamant sa foi dans la démocratie et les droits humains, revendique un respect rigoureux de la coutume. Or, celle-ci, plus souvent qu’on ne le croit, va à l’encontre des deux premiers termes. C’est cette situation de schizophrénie qui conduit au relativisme nos apprentis démocrates, défenseurs de la polygynie, de l’excision, etc., au nom de l’histoire et du legs des ancêtres. En ce sens, rien n’est plus irrationnel qu’un acte ou une parole réfractaire à l’argumentation, mais requérant uniquement le consentement. La subordination inquisitoriale de la femme aux caprices masculins dévalorise sa subjectivité. Pour être insidieux, le phénomène n’en est pas moins répandu et dévastateur pour que l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie (A.P.F), réunie à Libreville le 2 décembre 2005, s’en saisisse [5]. De même, étant donné que tout pouvoir s’exerce sur plusieurs sujets, il faut que l’homme règne sur plusieurs épouses. Quoi de plus « normal », pour répondre à un refrain viril qui scande des rites ancestraux, qu’une polyphonie féminine ? Que serait un orchestre sans chef ? En clair, la trique masculine serait un besoin vital pour le troupeau féminin.

Tout comme la polygynie, l’excision participe de l’infériorisation de la femme, de la désubjectivisation de la féminité dans l’espace socioculturel et politique africain. L’ablation du clitoris, organe génital capital de la sexualité féminine, est assimilée à un phénomène intentionnel dont la signification, initialement symbolique, est devenue naturelle par sédimentation. Autant dire que les mutilations sexuelles intègrent le souci de régulation d’une sexualité (individuelle) réduite à la reproduction (sociale). Dit autrement, féminité rime avec maternité. C’est la minorité congénitale de la femme qui justifierait la limitation, voire l’éradication de sa libido, celle-ci étant incarnée par le clitoris. D’ailleurs, certains usages élargissent le champ de la traque jusqu’aux lèvres, par infibulation. Cette noble entreprise, on l’aura compris, consiste à « aider » la femme – imparfaitement dotée de rationalité et de moralité – à lutter contre les débordements lubriques de son corps. En balançant entre tradition – immémoriale au point d’être perçue comme naturelle – et raison – ferment de la critique corruptrice des mœurs – , l’espace démocratique africain se construit sur un malentendu. Il est généralement admis qu’il faut démocratiser l’espace politique africain, mais ni l’élite ni la populace n’agit réellement en conséquence : error communis jus facit. Les « intellectuels » qui violent allègrement les alinéas 1 et 2 du seizième article de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme [6] sont légion. De même, nul ne peut se prévaloir de son analphabétisme pour justifier son obscurantisme. Pourtant, au mépris de cette même Déclaration, nombreuses encore sont les filles privées du « droit à l’éducation » [7], eu égard au caractère présumé subversif de l’école.

L’oblitération spirituelle s’ajoute à l’ablation corporelle (de la vulve), affermissant du coup le processus d’avilissement et de chosification auquel elles sont soumises, telles des victimes expiatoires, tout au long de leur existence. La tradition a bon dos lorsqu’on lui fait porter l’irrespect de la « personnalité juridique » [8] de la femme, d’une part, et l’ignorance des dispositions légales, d’autre part. De ce point de vue, la maxime latine ignorantia argumentum non est reste particulièrement éclairante. Cette fracture entre la subjectivité masculine et la subjectivité féminine permet de rendre intelligible, sur le plan philosophique, le retard qu’accuse l’Afrique quant à l’application des droits humains fondamentaux. Au malentendu de type relativiste que nous venons d’évoquer, prétendant que le bien et le mal sont modulables dans l’espace et dans le temps, du fait de l’incommensurabilité des cultures, pourrait être adjoint celui, conventionnaliste, qui anime nos démocrates de circonstance, partisans des droits de la personne à la carte. L’erreur commune, ici, consiste à défendre l’idée selon laquelle certaines valeurs africaines actuelles s’autojustifient, y compris les plus contre-intuitives dans la perspective de la modernité, à commencer par le « mariage arrangé », l’excision et la polygynie, si tant est que ces pratiques puissent être des valeurs.

De la défense de la subjectivité féminine comme choix éthique

Selon la conception subjectiviste dont Socrate est la figure, deux catégories s’affrontent, à savoir la raison (individuelle) – et l’autorité (collective) – sur laquelle repose la coercition (sociale), c’est-à-dire le corpus éthico-juridique qui est fondement de tout groupement humain : « En condamnant Socrate (…), les Athéniens (…) acceptaient, dans une contradiction tragique, que la sagesse et la pensée réflexive attribuent au sujet de droit de se déterminer moralement et politiquement à l’encontre de la patrie et de la coutume » [9]. Or, la démocratisation de l’espace politique africain serait une gageure si ce processus ne s’accompagne guère d’une universalisation de l’expérience socratique. Dans cette perspective, défendre la subjectivité féminine, c’est faire « le choix de la rationalité [qui] est un choix éthique » [10], comme le soutient Alain Boyer. Ce choix est le seul qui vaille si l’on veut que les libertés publiques et les droits de la personne – surtout ceux de la femme – progressent. Soumettre la femme africaine aux diktats de son père, aux oukases de ses oncles, pour ce qui est du choix de son conjoint, ou la contraindre aux caprices de ce dernier concernant la vie professionnelle, c’est la réifier. Or, la démocratie voudrait que la femme, en toute souveraineté, fît ses choix individuels, exprimât ses préférences et les assumât.

L’exclusion de la femme, du moins l’obstruction qui lui est faite dans l’espace public – lieu du débat sur les affaires de la cité – a pour corollaire le confinement de celle-ci à la sphère privée, cadre de l’intendance familiale, de l’économie domestique (oikos nomia). Il va sans dire que l’erreur commune, dans ce cas, porte sur la ligne de démarcation ou de placement entre publicité et privauté, ce qui condamne l’Africaine au hors-jeu politique perpétuel. Et, l’habitude aidant, l’idée de l’inaptitude supposée de la femme à la conduite des affaires publiques – le jeu au centre du terrain – prend corps, de sorte que l’on se persuade paulatim qu’elle gagne(rait) à demeurer à la périphérie de l’agora. Dans le cas d’espèce, elle est maintenue sur le banc de touche ; l’iniquité des règles du jeu est telle que, ipso facto, la femme est « au ban de la société ». Aussi, le rachitisme de l’espace démocratique africain s’explique-t-il non par quelque absence de règles (anomia), mais par une hétérologie hyperbolique sur la subjectivité politique, c’est-à-dire une variabilité du langage suivant le sexe, qui s’accommode très mal de la féminité. Souvent battue, parfois violée, quelques fois exhibée, la femme a une valeur comparable à la dot versée par l’homme à sa famille. Et ce n’est ni le réflexe obsidional et éculé de la masse africaine ni même l’adhésion timide et ambiguë de son élite aux principes du vivre-ensemble démocratique qui permettront de surmonter ce que, dans l’exemple de Socrate et de la Grèce, Dominique Colas appelle « une contradiction tragique ». C’est comme si les Africain(e)s s’excluaient de la « discussion juridique interculturelle » [11].

Dans cette optique, l’entreprise consiste à décider les dogmatiques en faveur du rationalisme, non pas parce que l’on dénierait ainsi aux coutumes africaines leur fonction structurante, mais parce que ces coutumes, à beaucoup d’égards, sont critiquables, voire pernicieuses pour l’éclosion d’une réelle démocratie. En fait, le contextualisme du discours des défenseurs (systématiques) de la tradition est un différentialisme, attendu qu’il s’oppose à l’universalisme, considéré comme un principe abstrait. Ce pluralisme axiologique n’en est pas un, car il voile un véritable culturalisme fixiste, lequel est aux antipodes de l’idéal rationaliste, en tant que celui-ci comprend l’autonomie individuelle – donc l’auto-normation féminine – comme la résultante d’un processus historique. Celui-ci, quels qu’en soient les cieux, se caractérise par le rejet de l’autorité indiscutée. D’où la nécessité d’un individualisme méthodologique dans l’espace démocratique africain.

  1. HOLISME OU INDIVIDUALISME ?

« L’indépendance individuelle est le premier des besoins modernes » [12].

Toute société a tendance à construire un canevas au sein duquel doivent évoluer ses membres ; ils doivent « s’abreuver à la même source », avoir une conception partagée de la vie bonne. Cette situation cependant peut être préoccupante lorsque la culture dominante surplombe les projets personnels, par exemple quand la priorité du juste sur le bien – la modernité politique pose que le droit l’emporte sur la morale – est manifestement violée. Aussi, pour clarifier le lien entre féminité et subjectivité – s’agit-il davantage d’expliquer pourquoi il n’y a pas syzygie entre ces termes – dans l’espace démocratique africain, devons-nous apporter quelques précisions, sous forme interrogative. La dichotomie entre le sujet de droit d’essence qu’est l’homme et le sujet de droit de circonstance qu’est la femme est-elle compatible avec les droits humains fondamentaux ? Quelle est leur sémantique juridique profonde ? Ces droits se fondent-ils sur une normativité individualiste ou, au contraire, se prêtent-ils à un certain holisme ? En somme, quelle place occupe l’individu – particulièrement la femme – dans les sociétés africaines ?

De l’individualisme méthodologique comme outil de démocratisation

Il n’y a de sujet que dans un tissu social, une intersubjectivité d’où émerge le rapport de soi à l’humanité. Dans cette optique, l’exigence démocratique d’isonomie entre l’homme et la femme, dans l’espace public, reste chimérique en Afrique, car l’autonomie de la femme – donc sa subjectivité – par rapport à l’homme est loin d’être évidente, du moins telle que Luc Ferry et Alain Renaut en donnent la signification : « La subjectivité, telle qu’elle émerge avec l’humanisme moderne, se définit (…) par deux propriétés :l’autoréflexion (la transparence à soi) et l’auto-fondation, ou si l’on préfère l’autonomie, le fait de se donner à soi-même la loi de son agir » [13]. Il y a donc lieu de dire que le sexisme et la misogynie, parce qu’ils participent de l’infériorisation de la femme, sont incompatibles avec le projet démocratique. De deux intellections de l’ordre sociopolitique l’une : ou celle, en voie d’affleurement, qui conçoit que chacun(e) dise « je » ; ou celle, qui tient de la coutume et qui est en train de défleurir, concevant que seul l’homme dise « je » et, parfois, « nous », parlant alors en son nom et au nom de la femme. Cette prise unilatérale de la parole publique est une dénégation de l’autonomie morale de la partie muselée qui, de cette façon, est maintenue dans une sorte de minorité rationnelle perpétuelle.

En fait, deux logiques s’affrontent. La première repose sur une certaine légalité, qui promeut l’autonomie subjective ; la seconde, elle, s’appuie sur la naturalité, qui fait diptyque avec une certaine hétéronomie collective. C’est ce que nous entendons par normation holiste. Repenser la subjectivité, en prenant en compte les aspects féminins, c’est donc faire de l’Africaine quelqu’une dont les droits ne dépendent plus de la volonté de quelqu’un d’autre. En ce sens, elle est capable de critiquer les normes établies et d’agir selon sa volonté ; c’est ce que nous entendons par auto-normation individualiste. Ubi societas ubi jus, soutiendrait-on. D’aucuns parlent simplement d’aggiornamento. Mais un gouffre sépare le fait du droit ; mieux, il y a une certaine prépondérance du droit coutumier sur le droit positif. Bien que celui-ci soit importé, il est davantage en phase avec l’environnement moderne, en ce sens qu’il incite plutôt les démocrates à la rupture : humanitatem induere feritatemque deponere, dit Pétrarque. Et pour que la démocratie advienne, il faut un subjectivisme individualiste dans le fonctionnement des institutions et dans la résolution des problèmes sociaux.

Il est frappant d’observer que la désubjectivisation de la femme, qui s’appuie sur un socle onto-mythologique africain, a un alter ego dans la tradition philosophique classique. En effet, il n’est que de lire Aristote pour s’en convaincre : « De plus le mâle est par nature à la femelle ce que le plus fort est au plus faible, c’est-à-dire ce que le commandant est au commandé. Il en est nécessairement de même chez tous les hommes » [14]. L’assertion aristotélicienne fait le lit d’une conception fixiste des structures et positions sociales telle que l’on se demande comment l’espace normatif pourrait être modifié, étant entendu que celui-ci se réfère davantage à une certaine naturalité, pour ordonner la société, qu’à une véritable juridicité. Si la législation a pour substratum ce qui se passe dans la nature, le logos n’est plus alors qu’un prétexte et la liberté une pure lubie. Physiquement, l’homme est certes généralement « plus fort », mieux pourvu par la nature en muscles que la femme ; mais, moralement et rationnellement, c’est une contrevérité de soutenir, à la suite d’Aristote, que « le mâle est, en effet, plus apte que la femelle à gouverner » [15]. Dans cette perspective, l’autorité maritale ne peut être (re)mise en question, ni même relativisée, la subjectivité féminine n’étant qu’un appendice de celle de l’homme. Ainsi, il est inenvisageable que la femme prenne place à l’agora, lieu par excellence de la parole argumentée. En sorte qu’elle est frappée de claustration, comme si la nature et la tradition – par lesquelles les nomothètes sourcilleux expliquent la situation peu enviable de l’Africaine – étaient des sources infaillibles. Il est vrai que « les traditions, bien que critiquables, sont indispensables, car elles contribuent à structurer le monde social, à en faire un cosmos plutôt qu’un chaos » [16], mais elles ne sont pas défendables si elles désautonomisent, désubjectivisent, chosifient la personne humaine.

De la nécessité d’une correspondance entre l’imaginaire social et la normativité démocratique

La (sur)valorisation des pratiques dégradantes pour la femme comme celles que nous dénonçons constitue, à l’heure du pluralisme démocratique et des droits humains, une véritable phtisie ad valorem. C’est un phénomène qui prend ancrage dans l’historicisme, lequel présuppose une autojustification des coutumes dont la validité tiendrait de leur seule existence. Il n’y aurait guère de raison de les changer puisque l’histoire plaide en leur faveur. En réalité, c’est une preuve de la méconnaissance de l’irréductibilité de la normativité éthico-juridique à la factualité sociale. On évacue de la sorte la distinction kantienne entre devoir-être (Sollen) et être (Sein) en dissolvant le premier terme dans le second. Perspective apocalyptique que celle d’une société qui, à rebours du progrès démocratique dans le monde [17], confond(rait) le fait social et le phénomène naturel, réduisant le droit et la morale à l’histoire. Dans la même veine de la justification théorique de l’injustice faite à la femme, on trouve Rousseau. En effet, tout en reconnaissant qu’« en tout ce qui ne tient pas au sexe, la femme est homme : elle a les mêmes organes, les mêmes besoins, les mêmes facultés… » [18], celui-ci tente de justifier la domination de la femme par l’homme : « En ce qu’ils ont de commun, ils sont égaux ; en ce qu’ils ont de différent ils ne sont pas comparables.(…) L’un doit être actif et fort, l’autre passif et faible » [19]. A l’instar du Stagirite, le Genevois tient un discours viril, que nous dirions aujourd’hui machiste. Où l’on aperçoit des préjugés culturels faire florès et « aider » à soutenir des positions politiques. Cette instrumentalisation de la politique mutatis mutandis aboutit à l’autorité indiscutée de l’homme, laquelle à l’évidence ne laisse guère de place à la moindre argumentation, à l’examen intersubjectif des idées.

L’espace politique africain de lege ferenda doit tendre vers une correspondance entre son cadre symbolique et les normes de la démocratie moderne, faute de quoi l’épanouissement de l’Africain(e) restera une simple vue de l’esprit. L’imaginaire politique est solidaire de la culture dominante d’un peuple. A cet effet, une réforme politique se donnant pour fin l’amélioration de la condition féminine, qui fermerait les yeux sur les méfaits du système patriarcal dans les sociétés africaines, transcenderait difficilement le cadre de l’utopie [20]. A ce propos, la position de l’écrivaine égyptienne Nawal Saadaoui est tranchante, mais éclairante : « En réalité, une épouse ne peut divorcer que si elle achète sa liberté en payant son mari. Il s’agit donc d’un droit ne bénéficiant qu’aux femmes riches. Et au final, c’est une victoire de plus pour l’homme qui gagne l’argent et le divorce » [21]. Une réflexion sur les ressorts culturels du politique débouche immanquablement sur une remise en cause de certaines pratiques sociales. Cela est d’autant plus ardu que les traditions ont une prétention totalisante ; d’ailleurs, cela explique le déterminisme des positions sociales en fonction du sexe. Partant, il devient compréhensible que les droits de la personne proclament la priorité de l’individu sur le groupe et qu’ils inspirent désormais – à des degrés divers – les textes fondamentaux des Etats contemporains, y compris dans les pays où leur application est plus qu’aléatoire. C’est en ce sens que Jean-François Kervégan dit que « les droits de l’homme ne sont plus seulement des préceptes théoriques ou des règles de jugement, mais des principes constitutionnels » [22]. Il y a lieu de comprendre que ces droits placent la personne humaine au « centre de tout », car ils « présupposent tout d’abord une valorisation de l’Homme comme tel, tenu pour terme de référence et pour valeur suprême » [23]. Précisément, cet anthropocentrisme – disons cet humanisme – rend possible l’« intercompréhension » culturelle. Et l’homme dont il est ici question n’a ni race ni sexe ou, plutôt, il est de toutes les races et des deux sexes ; c’est l’homme générique.

La démocratie s’installera difficilement dans l’espace politique africain tant que le concept de sujet/auteur ne s’appliquera qu’aléatoirement à la femme. En effet, aussi longtemps que celle-ci ne sera pas élevée à la dignité d’homo juridicus – aussi longtemps que sa subjectivité relèvera du tutorat masculin – , on voit très mal comment les principes des droits humains et de la démocratie moderne prendront racine ici. Il s’agit d’opérer un changement de paradigme, en passant du fidéisme holiste persistant – préséance des coutumes par respect de l’histoire et des ancêtres – à un rationalisme individualiste enfin assumé, c’est-à-dire des pratiques juridiques, voire des décisions judiciaires qui osent aller à l’encontre de certaines croyances enracinées, « nuisibles » à la femme. Il est de notoriété que le mariage est davantage un accord entre deux clans que le fruit d’un libre consentement entre deux individus :

« Le mariage en Afrique Noire n’est en général pas un contrat, mais se définit en termes d’alliance entre deux communautés. (…) Le libre consentement des futurs époux ne peut pas être entendu au sens de liberté individuelle, où les enfants pourraient éventuellement aller à l’encontre de la volonté des parents » [24].

Cet accord vise en quelque sorte à vivifier la mémoire collective (ascendance) et à assurer la reproduction sociale (descendance), parfois aux dépens de l’épanouissement matrimonial des individus. Dans ce contexte, la femme n’accomplit que rarement sui juris les actes de la vie publique ; en tant qu’alteri juris, elle ne contracte pas toujours librement. Autrement dit, la femme n’est relativement autonome que lorsque ses aspirations s’inscrivent dans la volonté communautaire. Aussi pensons-nous qu’il n’y a aucune raison que cela change si l’espace politique africain – qui se voudrait démocratique – ne passe pas à l’ère de l’individu [25].

  1. HIERARCHIE OU EGALITE ?

« Il n’y a donc pas sur la terre d’autorité si respectable en elle-même, ou revêtue d’un droit si sacré, que je voulusse laisser agir sans contrôle et dominer sans obstacles » [26].

Si,commenous venons de le voir, l’éthique démocratique implique de se désolidariser de toute théodicée – justification des faits sociaux par la justice divine ou l’observance stricte des valeurs ancestrales -, c’est qu’elle commande au contraire de s’attacher à une sociodicée qui privilégie une interprétation fondée sur la volonté humaine. En d’autres termes, une logique individualiste et égalitaire doit se substituer progressivement à l’ordre social holiste et hiérarchique qui prévaut. Précisément, l’avènement de telles sociétés, en Afrique, ne sera possible que si l’on transcende préalablement la physis à laquelle se réfèrent les tenants de la tradition pour justifier la prétendue infériorité de la femme par rapport à l’homme. Pourtant, même si nature humaine il y a, elle est à chercher davantage dans un avenir potentiellement riche et virtuellement ouvert que dans un passé tout aussi riche mais hermétiquement clos. Tout se passe, aujourd’hui, comme si le devenir même de l’Africain(e) était un code d’airain hérité des Anciens [27]. Pourtant, cette inclination ontologique à déterminer et à énoncer la compréhension du fait social, pour séduisante qu’elle soit, n’en est pas moins aporétique.

De la démocratisation comme arrachement aux coutumes traditionnelles

La doctrine des droits de l’homme véhicule une idée, celle de l’ouverture. C’est un projet d’arrachement aux déterminations particulières en vue de l’idéal de l’humanité universelle. Aussi, pouvons-nous en prendre de la graine et affirmer avec Robert Legros que « l’idée de l’humanité universelle ne peut prendre sens quand domine l’attitude naturelle car la naturalisation est une particularisation (…). Quand la tradition a le statut de norme suprême, les attitudes humaines se conforment aux coutumes. Et les coutumes semblent naturelles » [28]. Loin de nous l’idée de promouvoir l’uniformisation des cultures. En revanche, lorsque la préservation des différences vise à l’avilissement de la personne humaine par des actes procédant de l’autojustification [29], il s’agit d’une entreprise antidémocratique par son iniquité même. Partant, le relativisme culturel est un obstacle dirimant à l’universalisation des principes de la démocratie moderne, facteurs de progrès social et politique. Nous pouvons donc affirmer que l’homo hierarchicus traditionnel est aux antipodes de l’homo aequalis démocratique. Ce qui compte désormais, c’est de privilégier l’autonomie des individus afin de parvenir à la relativité des positions sociales et non de regarder à leur disparité, car l’égalité juridique n’est guère synonyme de nivellement socioéconomique.

Dans la mesure où l’imaginaire collectif intègre l’idée que l’ordre social est modifiable par l’Homme lui-même, non par quelque transcendance (Dieu ou les ancêtres), on ouvre une brèche dans la forteresse de l’élitisme machiste qui domine les structures sociales en Afrique. Au demeurant, cela n’est pas concevable sans une certaine présomption de rationalité chez la femme, comme chez toute personne humaine, au sens poppérien :

« Le choix n’est plus entre connaissance et foi mais entre deux sortes de foi, l’une qui fait confiance à l’individu, l’autre qui s’abandonne à une mystique collective (…). Le rationaliste est enclin à considérer que les hommes sont fondamentalement égaux et à voir dans la raison le lien qui les unit » [30].

Dans cette optique, le système démocratique induit une lecture à la fois individualiste et rationaliste des rapports sociaux. Ainsi, « …en tant que femme, tu as un cerveau plus petit que le mien », dit Lakounlé, un instituteur pourtant progressiste, à Sidi, la beauté du village qu’il courtise, dans une pièce de théâtre de Wole Soyinka [31]. Il s’agit de récuser, dans le cas d’espèce, les arguments d’autorité, en particulier, en particulier l’infériorisation de la femme par des pratiques dégradantes, sous prétexte qu’elles sont séculaires ou millénaires et justifiables de ce seul fait. Penser à nouveaux frais l’espace symbolique africain, c’est aussi interroger certaines pages de l’histoire de la philosophie occidentale qui lui font pendant – il y a une convergence quant à la dénégation de la rationalité à la femme -, lesquelles développent l’idée que cette dernière raisonne d’autant mal qu’elle est constituée différemment et que, « naturellement », elle est moins outillée que l’homme. Un des plus grands dispensateurs de ce genre de galanteries demeure Nietzsche [32]. Le philosophe allemand établit une hiérarchie « naturelle » entre l’homme et la femme, « naturellement » au détriment de cette dernière. On y décèle un système hétéronomique qui, sans ambages, traduit l’hostilité nietzschéenne à la modernité, dans son acception libérale [33] ou dans un sens politique plus large indiquant le progrès démocratique, qu’il prend à rebours [34]. A l’instar d’Aristote [35] et de Rousseau [36] qui sous-estiment la féminité en la cantonnant à l’intimité, tandis que l’homme a droit à ce que nous appellerions, par opposition, l’extimité -, « la critique nietzschéenne de la modernité politique et philosophique est donc inséparable du « renversement du platonisme » [37] .

Il existe indubitablement quelque homologie entre ce qui précède et les pratiques culturelles africaines que nous dénonçons, à commencer par la très patibulaire entaille de la vulve que subissent nombre de fillettes du Sahel et des pays arabes. Seul l’homme est rationnel, la femme, elle, n’aurait que l’émotion, une sollicitude [38]. innée. La critique nietzschéenne s’insère dans le « catalogue » philosophique qui se structure autour de ce que nous appelons l’ascendant aristotélicien, lequel présente des similitudes nettes avec les traditions africaines sur la question. D’où l’idée d’homologie, au sens de parler d’une seule voix, voire de prendre la même voie. Cloîtrée qu’elle est dans le couvent familial, puis dans le foyer conjugal, la femelle voit son sort scellé par le mâle. Parfois voilée, elle n’a d’identité que dans l’enceinte du gynécée, guère au-delà : mulier in politicis taceat. Pour l’auteur des Principes, la femme est essentiellement un être de « sentiment » [39] vivant sous la férule d’un « chef de famille » [40] . Un bémol pour la femme africaine, Hegel est opposé à la polygamie [41] .

De la libération de la femme comme exigence de l’Etat de droit

Cette justification de la domination masculine des rapports sociaux est aux antipodes de l’éthique platonicienne, paradoxalement plus libérale en ce qui concerne la féminité : « Les aptitudes naturelles sont également réparties entre les deux sexes, et il est conforme à la nature que la femme, aussi bien que l’homme, participe à tous les emplois » [42] . L’auteur de la République jette ainsi les bases de ce que l’on appelle aujourd’hui une éthique féministe [43] , dans la mesure où la femme est l’égale de l’homme. C’est dans ce sens qu’il propose une pédagogie identique [44] , ce, dans le dessein de favoriser, d’une part, l’égalité des chances entre filles et garçons dans le système éducatif, et, d’autre part, la parité dans l’administration de la cité à l’âge adulte. Cette homothétie entre Platon et les thèses développées par l’éthique féministe contemporaine montre à quel point la lutte contre la réification de la femme – objet de consommation pour l’homme – et la représentation médiatique de celle-ci restent des problèmes entiers. Dans le langage publicitaire, la femme est réduite à sa corporéité, c’est-à-dire à la matérialité de tout produit proposé aux regards concupiscents des acteurs du marché.

Si le droit coutumier, dans la perspective de l’honneur dû et rendu à la femme, fait de la conjugalité la condition de son bonheur – un foyer, c’est un mari, des enfants et une ou des coépouses – , force est de constater que les mœurs évoluent tout de même. Elles traduisent de plus en plus un conflit de valeurs entre le mariage et la famille, d’une part, et les intérêts propres de la femme exprimés en termes de droits individuels, d’autre part. Comme institution sociale, le mariage reflète cet état de choses, à savoir une certaine condescendance bienveillante de l’homme, le chef de famille, envers la femme, qui est la ménagère de la famille ; elle doit, à son tour, faire preuve d’obséquiosité reconnaissante à l’égard du chef. Tout ceci pose un problème de fond pour des sociétés qui aspirent à la démocratie. Or, la démocratisation des institutions ne saurait faire l’économie d’une démarche déontologique, c’est-à-dire une discussion sur les règles du jeu social. De ce point de vue, la sempiternelle insistance sur une lecture exclusivement culturaliste, au détriment d’une argumentation philosophique, paraît irrationnelle et dangereuse, car elle expose les sociétés africaines à l’illusion que l’obéissance et la sollicitude seraient des qualités typiquement féminines, comme l’autorité écherrait intrinsèquement à l’homme.

En somme, le foyer conjugal, à l’instar de la famille d’origine où la jeune fille est sous l’autorité du père, de l’oncle ou du frère, n’est pas plus propice à l’épanouissement moral et intellectuel de celle-ci. En ce sens, elle ne fait que changer de tutelle et demeure arrimée à la volonté masculine. De fait, sa capacité à contester certains aspects du corpus social défavorables à ses intérêts n’en est qu’amoindrie, lors même que le poids de l’autorité du mâle s’hypertrophie. L’une des conséquences de la dévaluation du rôle de la femme dans le forum culturel est la confusion de la morale et du droit. Or, lorsqu’une société, par quelque enflure phallocratique, s’échine à emmêler les fils de toute sorte, la politique ne saurait rigoureusement réaliser le droit, élément sans lequel la moralité dans l’espace public serait pour le moins aléatoire. En clair, une société au sein de laquelle la liberté – au sens kantien de l’autonomie de la volonté – serait purement formelle est une société qui non seulement ignore la démocratie et la justice sociale subséquente, mais refuse d’en prendre le chemin. Ce n’est pas le moindre paradoxe : aspirer à la démocratie tout en en récusant certains principes fondamentaux. A terme, elle doit même y participer et éventuellement en incarner la tête, conformément à ses outils et à ses atouts [45] .

CONCLUSION

Si la femme africaine demeure encore hors de l’agora, c’est parce qu’elle est victime de discriminations. C’est ce différentialisme hégémonique qu’il faut éradiquer des institutions et, ainsi, reprendre le flambeau de Platon. Cela suppose que soit (re)précisée la limite entre la physis et le nomos, autrement dit la ligne de démarcation entre les faits et les valeurs. S’opère alors une transition de l’imaginaire de l’Etre, qui, à l’instar du kosmos lui-même, repose sur un ordre inégalitaire, à un espace isonomique, d’autant plus qu’il est l’œuvre de la volonté législatrice du Sujet et non d’une quelconque intention de Dieu. En ce sens, on peut constater avec Yadh Ben Achour que « la question de la femme » [46] est rarement abordée, tout en divergeant sur les enseignements sociopolitiques à en tirer [47] . Mais ce qui compte, c’est de transcender la dimension juridico-anthropologique, de telle sorte que l’on s’élève et se hisse au niveau des principes. Une laïcisation de l’espace politique n’est possible que lorsqu’elle est précédée d’une rationalisation du corpus symbolique.

L’école a donc un rôle central à jouer dans la promotion de la citoyenneté, qui consiste en une rationalisation républicaine de l’espace politique, comme le firent jadis les révolutionnaires français, d’après Claude Nicolet [48] . Autrement dit, elle a une fonction instrumentale pour l’émancipation de la femme par rapport à l’autorité patriarcale ; tout se passe finalement comme si l’instruction allégeait « le fardeau de la femme noire » [49] . Pour faire « [progresser] la raison publique » [50] , l’école doit user d’un langage en mettant en œuvre une pédagogie particulière. C’est la signification de l’expression – qui a la simplicité et la force d’un slogan – « Démocratie, c’est démopédie », résumant « la politique éducative de la IIIe République » [51] . En ce sens, l’évocation du roman de Mariama Bâ [52] , sur fond de désenchantement, montre bien qu’une analyse sans manichéisme de la subjectivité féminine est possible. En définitive, la conquête de l’autonomie subjective passe par l’application des principes des droits de la personne : une conception volontariste (contractualiste) de la citoyenneté doit se substituer à l’organicisme (naturaliste) de la communauté traditionnelle. Dit autrement : passer enfin de la substantialité à la subjectivité.

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Revue de Métaphysique et de Morale, 4, Paris, octobre décembre 1997.

[1] Institut de Recherche en Sciences Humaines, Gabon

[2] La polyandrie – forme de polygamie où la femme dispose de plusieurs hommes – est plutôt rarissime. C’est une pratique connue par exemple chez les Mosso du Tibet en Chine.

[3] MONTESQUIEU, De l’esprit des lois, 2 tomes, I, XI, 6, éd. Goldschmidt, Paris, GF Flammarion, 1979, p. 294 : « Il faut que le gouvernement soit tel qu’un citoyen ne puisse pas craindre un autre citoyen ».

[4] FICHTE, J.G., Contributions destinées à rectifier l’opinion du public sur la Révolution française, trad. J. Barni, Paris, Payot, 1974, p. 79.

[5] Cf. « Séminaire sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes », in Echos. Revue de l’Assemblée nationale gabonaise, n° 7, Libreville, Assemblée nationale de la République gabonaise, 2006, p.10-11.

[6] Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, adoptée le 10 décembre 1948 par l’Assemblée générale des Nations Unies. Article 16, alinéa 1 : « A partir de l’âge nubile, l’homme et la femme (…) ont le droit de se marier et de fonder une famille. Ils ont des droits égaux au regard du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution » ; alinéa 2 : « Le mariage ne peut être conclu qu’avec le libre consentement des futurs époux ».

[7] Cf. Article 26, alinéa 1 : « Toute personne a droit à l’éducation… » ; alinéa 2 : « L’éducation doit viser au plein épanouissement de la personnalité humaine et au renforcement du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales ».

[8] Cf. Article 6 : « Chacun a droit à la reconnaissance en tous lieux de sa personnalité juridique ».

[9] COLAS, D., « Perspectives philosophiques ou la désertion de Socrate et le passeport de Fichte », in D. COLAS, C. EMERI et J. ZYLBERBERG, (dir.), Citoyenneté et nationalité. Perspectives en France et au Québec, Paris, P.U.F, 1991, p. 25-36, voir la page 26.

 

[10] Cf. « Hiérarchie et vérité », in A. BOYER et alii, Pourquoi nous ne sommes pas nietzschéens, Paris, Le Livre de poche Biblio / essais, 1991, p. 9-36, voir la page 32.

[11] HÖFFE, O., « Déterminer les droits de l’homme à travers une discussion interculturelle », in Revue de Métaphysique et de Morale, 4 (Philosophies et droit), octobre décembre, 1997, p. 461-495, voir la page 465 sq.

[12] CONSTANT, B., De la liberté chez les Modernes, textes choisis, présentés et annotés par Marcel Gauchet, Paris, Hachette / Pluriel, 1980, p.506.

[13] Cf. « Habermas, Apel et nous », in Lukas K. SOSOE (dir.), Subjectivité, démocratie et raison pratique, Paris / Montréal, L’Harmattan / Ouverture philosophique, 1998, p. 149-179, voir la page 155.

[14] Cf. Les politiques, I, 5, trad. P. Pellegrin, Paris, GF Flammarion, 1993, p.101.

[15] Idem., I, 12, p. 127.

[16] BOYER, A., « Rationalisme critique », in RAYNAUD, Ph. & RIALS, S. (dir.), Dictionnaire de philosophie politique, Paris, P.U.F., 1996, p.540-543, lire la page 541.

[17] KERVEGAN, J.-F., « Les droits de l’homme », in KAMBOUCHNER, Denis (dir.), Notions de philosophie, 3 tomes, II, Paris, Gallimard / Folio Essais, 1995, p. 637-693, lire la page 637 : « Les droits de l’homme, comme la démocratie, ont récemment accédé au statut de norme universellement reconnue ; il n’est aujourd’hui personne pour les contester en principe ».

[18] Cf. Emile ou de l’éducation, V, éd. T. L’Aminot, F. et P. Richard, Paris, Classiques Garnier, 1999, p. 445.

[19] Idem., V, p.446 (trad. citée).

[20] Allusion faite non au sens étymologique u-topia (sans lieu, en aucun lieu, d’aucun lieu ou de nulle part), mais au sens politique (qui ne prend pas en compte la réalité) ou à l’emploi courant (irréalisable, chimérique).

[21] Cf. « Nawal femme de combat », in Afrique Magazine, Paris, n° 242, novembre 2005, p.48-51.

[22] Cf. article cité (supra), p.666.

[23] RENAUT, A. & SOSOE, L., Philosophie du droit, Paris, P.U.F./Recherches politiques, 1991, p.34.

[24] BUJO, B., « La compréhension du droit dans le contexte traditionnel négro-africain », in Cahiers de philosophie politique et juridique, n° 21 (La politique et les droits), Caen, P.U.C, 1992, p.205-212, lire p. 211.

[25] RENAUT, A., L’ère de l’individu, Paris, Gallimard, 1989, p.53 : « L’homme de l’humanisme est celui qui n’entend plus recevoir ses normes et ses lois ni de la nature des choses (Aristote), ni de Dieu, mais qui les fonde lui-même à partir de sa raison et de sa volonté (…) par opposition aux sociétés où c’est la tradition qui fonde l’autorité ».

[26] TOCQUEVILLE, A. de, De la démocratie en Amérique, 2 volumes, vol. 1, II, 7, biographie, préface et bibliographie de F. Furet, Paris, GF Flammarion, 1981,p. 350.

[27] Ce qui est à l’opposé de la formule, révolutionnaire s’il en est, de Rabaut Saint-Etienne : « Notre histoire n’est pas notre code », citée par Stéphane RIALS, La déclaration des droits de l’homme et du citoyen, Paris, Hachette / Pluriel, 1988 (Avant-propos).

[28] Cf. L’idée d’humanité. Introduction à la phénoménologie, Paris, Grasset, 1990, p. 15-16.

[29] CASTORIADIS, C., Domaines de l’homme, II (Les carrefours du labyrinthe), Paris, Seuil/Empreintes, 1986, p. 262 : « Sur le principe d’une stricte clôture : notre vision du monde est la seule qui ait un sens et qui soit vraie – les « autres » sont bizarres, inférieurs, pervers, mauvais, déloyaux, etc. ».

[30] POPPER, K., La société ouverte et ses ennemis, 2 tomes, II, trad. J. Bernard et Ph. Monod, Paris, Seuil, 1979, p.165 et 167.

[31] Cf. Le lion et la perle, trad. J. Chuto et Ph. Laburthe-Tolra, Yaoundé, Editions CLE / Théâtre, 2001, acte I, p. 9. (Pièce en trois actes).

[32] Cf. Par-delà le bien et le mal (Nos vertus, § 234), in Œuvres, 2 vol., II, éd. J. Lacoste et J. Le Rider, Paris, Robert Laffont / Bouquins, 1993, p. 681 : la femme n’est pas « un être pensant ».

[33] NIETZSCHE, F., Le crépuscule des idoles (Flâneries d’un inactuel, § 38), in Œuvres, op. cit., II, p. 1012 : « Libéralisme : autrement dit abêtissement grégaire… ». Souligné par l’auteur.

[34] Idem., § 39, p.1013 : « De tous temps le démocratisme a été la forme de déclin de la force organisatrice ».

[35] Cf. op. cit., I, 13, p. 131 : « La tempérance n’est pas la même chez la femme et chez l’homme (…), mais chez l’un il y a le courage de chef, chez l’autre un courage de subordonnée ».

 

[36] Cf. op. cit., V, p. 452 : « Platon, dans sa République, donne aux femmes les mêmes exercices qu’aux hommes ; je le crois bien. Ayant ôté de son gouvernement les familles particulières, et ne sachant plus que faire des femmes, il se vit forcé de les faire hommes. (…).Je parle de cette promiscuité civile qui confond partout les deux sexes dans les mêmes emplois, dans les mêmes travaux, et ne peut manquer d’engendrer les plus intolérables abus ». C’est nous qui soulignons.

[37] RAYNAUD, Ph., Préface au vol. II des Œuvres de Friedrich Nietzsche, op. cit.

[38] BRUGERE, F., « Sollicitude. La nouvelle donne affective des perspectives féministes », in Esprit, 1, Paris, n° 361, janvier 2006, p.123-140

[39] HEGEL, G.W.F., Principes de la philosophie du droit, Préface, trad. J.-F. Kervégan, Paris, P.U.F/Quadrige, 2003, p. 98 : « Avec le simple remède de bonne femme qui consiste à faire reposer sur le sentiment ce qui est le travail, à coup sûr plus que millénaire, de la raison et de son entendement ». Souligné par l’auteur.

[40] Idem., § 177, p. 272 : « …les enfants, éduqués à la personnalité libre, (…) les fils en tant que chefs de famille et les filles en tant que femmes ». C’est nous qui soulignons.

[41] Idem., § 167, p. 266 : « Le mariage est par essence monogamie ». Souligné par l’auteur.

[42] PLATON, La République, V, trad. R. Baccou, Paris, GF Flammarion, 1995, p.210.

[43] JAGGAR, A., « Féministe (éthique) : tendances contemporaines de l’éthique féministe », in CANTO-SPERBER, Monique (dir.), Dictionnaire d’éthique et de philosophie morale, Paris, P.U.F/Quadrige, 2 volumes, I, 2004, p.717-724, voir la page 717 : « Quelques voix se sont élevées, tout au long de l’histoire de la philosophie occidentale, pour remettre en question la subordination des femmes. Parmi ces voix, on retrouve celle de Platon… ».

[44] Cf. op. cit., V, p. 206 : « Si donc nous exigeons des femmes les mêmes services que des hommes, soutient Platon, nous devons les former aux mêmes disciplines ».

[45] Cf. Le magazine Jeune Afrique, Paris, n° 2356, du 5 au 11 mars 2006. Le dossier principal s’intitule : « Afrique : des femmes d’influence », p.29-42. On peut lire, entre autres, l’article d’Elise COLETTE, qui ouvre le dossier sur l’investiture d’Ellen Johnson-Sirleaf le 16 janvier 2006 à Monrovia ; il y a aussi celui de Jordane BERTRAND : « Quand le pouvoir s’écrit au féminin ».

 

[46] Cf. « Les droits fondamentaux entre l’universalité et les spécificités culturelles et religieuses », in PALLARD, H. & TZITZIS, S. (dir.), Droits fondamentaux et spécificités culturelles, Paris / Montréal, L’Harmattan / Horizons du droit, 1997, p.81-94, voir la page 90.

[47] Idem., p.91 : « Or trop de considérations militent en faveur de la différence de statut. (…) Eve, après tout, n’était qu’une compagne, une demande d’homme, pour l’homme ».

[48] Cf. L’idée républicaine en France. Essai d’histoire critique, Paris, Gallimard / Tel, 1994.

[49] TREVARTHEN, A., « Les femmes entre servitude et libération dans les œuvres de Tsitsi Dangarembga et Yvone Vera », in Notre Librairie. Revue des littératures du Sud, Paris, n° 152, octobre décembre 2003, p. 62.

[50] Cf. Article 22, Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (1793).

[51] FERRY, L. & RENAUT, A., Philosophie politique, III (Des droits de l’homme à l’idée républicaine), Paris, P.U.F / Quadrige, 1996, p. 170.

[52] Une si longue lettre, Dakar, N.E.A, 1979.