Notes de lecture

L’OMBRE EN FEU de Mame Younousse DIENG NEAS-DAKAR 1997

Ethiopiques n°60 revue négro-africaine

de littérature et de philosohpie

1er semestre 1998

Younousse Dieng s’est d’abord fait connaître par un petit roman en wolof, titré « Awo bi », qui eut un très grand succès parmi les lecteurs wolophones. Celui que cette institutrice progressiste nous présente aujourd’hui, est un véritable plaidoyer féministe. Sans jamais mettre en cause la pertinence ni la stabilité de la cellule familiale, l’auteur implore le droit pour les jeunes filles villageoises de faire des études même poussées, et de choisir leur époux.

Elémentaire direz-vous ? pas tant que cela. Voici 30 ans déjà Seydou Badian posait le problème au Mali avec Sous l’orage et Philombe au Cameroun avec Sola ma chérie. Mais les coutumes sont tenaces en Afrique, et le roman de Younousse Dieng est un tableau extrêmement bien détaillé d’une situation trop fréquente encore. Kura Mbissane Njaay en est l’héroine, terminant avec joie son lycée, et faisant des projets d’études universitaires avec son ami de coeur, elle se trouve rappelée au village et promise à un cousin de l’âge de son père.

Entre un père autoritaire et fort de son bon droit, et une mère sensible mais soumise à la coutume autant qu’à son mari, Kura ne trouve de l’aide que dans un jeune parent instituteur qui habite un autre village. Il essaie d’obtenir un compromis auprès du père, mais ce dernier est intraitable, et le mariage se fait en grande pompe.

Ce sera une catastrophe tant morale (la fille devient quasi folle) que physique (elle meurt en couches).

Ecrit dans un style conventionnel mais très réaliste, très précis, très fouillé, le roman ne nous fait grâce ni d’un geste, ni d’une plainte, ni d’une larme. Il n’évite pas le mélo.

On en sort tout de même assez bouleversé pour pleurer avec. Ceci est donc un excellent roman populaire que les pères de famille devraient lire autant que leurs enfants. Pour tenter peut-être de se comprendre davantage…