Littérature

LE DISCOURS ROMANESQUE DE WOLE SOYINKA

Ethiopiques n°52

revue trimestrielle de culture négro-africaine

1e semestre 1989- vol. 6 n° 1

Dans ce travail nous nous concentrons sur un certain nombre de questions soulevées par les procédés d’énonciation dans le roman The Interpreters. [1] Il va de soi qu’une telle approche doit tenir compte des aspects pertinents de l’énoncé et pour cette raison nous interrogeons le texte de Soyinka pour en dégager les principes idéologiques fondamentaux. [2] En même temps, tout en traitant des dimensions idéologiques du roman, nous évitons autant que possible la discussion thématique dans un effort de bien préciser les méthodes d’agencement du discours romanesque.

Dans The Interpreters Soyinka nous présente un protagoniste collectif [3] consistant en plusieurs personnages qui engendrent une certaine idéologie de groupe. Bien que chacun de ces interprètes [4] véhicule une vision particulière des réalités sociale et psychique c’est surtout au niveau de l’extériorisation de leurs relations que le lecteur arrive à une compréhension plus ou moins cohérente du roman.

C’est à travers les signes produits par le groupe d’interprètes que l’on décèle leur idéologie de groupe. [5] Cependant, dans l’œuvre de Soyinka, l’expression idéologique est souvent complétée par l’élément psychique et de cette façon on assiste à une double progression sémiotique par lequel l’interdépendance de ces deux éléments idéologique et psychique – s’extériorise par un réseau bien défini d’échanges discursifs.

Selon Marc Angenot [6] :

Le discours social… ne se manifeste pas nécessairement à la surface rhétorique des textes ou ensembles de textes, mais plutôt dans les soubassements présuppositionnels qui en établissent l’acceptabilité.

Ceci est un facteur essentiel pour la compréhension de la production littéraire de Soyinka. Le discours bourgeois et intellectuel de ses personnages dramatiques et romanesques est souvent révélateur d’une ambiguïté voulue. Souvent ce discours exprime une vision du monde juste et acceptable si elle est isolée au niveau de l’énoncé moralisateur ou idéologique. [7] Pourtant, l’analyse du « sémantisme propre des mots » [8] révèle l’intention ironique et le véritable commentaire idéologique de l’auteur. En plus, la symbolique psychique qui souligne l’œuvre de Soyinka est incontestablement celle de Yourouba [9] et pour paraphraser Umberto Eco c’est à travers cette symbolique particulière que l’expérience des interprètes est coordonnée et communiquée aux lecteurs. [10] C’est ainsi que ce qui semble parfois appartenir au domaine du surréalisme n’est que le surgissement de la symbolique yourouba au niveau de l’énoncé. [11] Il s’ensuit que le « sémantisme propre des mots » est régie par un système linguistique, [12] par des structures philosophiques et par une réalité psychique que la forme romanesque devrait concilier avec la langue anglaise dans toute sa richesse. [13]

Quand on aborde la question du décodage du discours narratif on se heurte aux difficultés de l’encodage de la symbolique yourouba qui semble déterminer l’ontologie des interprètes. Les personnages du roman The Interpreters se sont assez éloignés de leurs contextes d’origine respectifs pour que les croyances et pratiques religieuses de leurs grand-parents deviennent presque folkloriques. Le surgissement des parents dans leur existence est une ingérence intolérable qui bouleverse leur vie urbaine [14]. Cependant, c’est dans la vague conscience psychique de leur contexte social qu’ils puisent leur force et c’est en s’inspirant de ce patrimoine incertain – parce qu’à peine connu – qu’ils essayent de s’exprimer dans les domaines de l’esthétique et parfois de l’idéologie. Il y a donc une lacune, une marge de cynisme qui sépare les principaux interprètes de leur contexte social mais, en même temps, ils nous donnent l’évidence de leur adhérence approfondie et plus que rituelle à divers aspects de l’ontologie africaine. De cette manière, les interprètes dépassent le simple rôle romanesque de ceux qui tentent d’accorder une signification à leur existence. Ils se rendent compte du fait qu’ils vivent en porte-à-faux avec leur société et qu’ils doivent établir leur propre équilibre dans un monde où l’idéologie dominante est celle d’une classe, bourgeoise et égoïste qui se définit uniquement par rapport aux maîtres néo-coloniaux. [15]

Cependant, la lutte idéologique des interprètes est essentiellement personnelle et se situe au niveau de l’intellect. Elle se revêt des caractéristiques d’un malaise ontologique dans la mesure où les interprètes cherchent à se débarrasser de leurs obligations familiales, claniques et ethniques tout en se rattachant avec ferveur à la symbolique mythique du peuple. [16] C’est pour cette raison qu’on retrouve par fois un énoncé qui semble être formulé selon la métaphorisation propre aux proverbes mais qui, par les procédés d’énonciation ne révèle que le discours mystificateur d’un intellectuel bourgeois. Bien que les explications narratives de la pensée de chacun des interprètes soient d’une grande importance discursive c’est par les dialogues que Soyinka confirme et précise les données du récit narratif. C’est ainsi que pendant un orage des baraques de fortune d’un bidonville s’effondrent et Soyinka nous livre les réactions suivantes exprimées par deux interprètes :

« One tooth, » Egbo announced. « The sky-line has lost a tooth from its rotted gums. » Sekoni stamme red worse than ever. « Th-th-they will b-b-be homeless to… n-night. P-p-p-perhaps we should stop there and see ifwe can h-h-help. » Interpreters [17]

Egbo prive les circonstances tragiques de leur réalité sociale et humaine en rendant la situation abstraite voire poétique. Il est vrai que l’évocation de l’extraction d’une dent retirée de ses gencives pourries est l’expression imagée d’une détresse profonde de la mort, mais il est également évident que la manière d’exprimer cette détresse transpose au plan psychique une expérience réelle, tragique et immédiate. Egbo n’a même pas besoin du recul que donne le passage du temps pour neutraliser l’effondrement devant lui. Il procède immédiatement à un discours métaphorique qui souligne la distance sociale et humaine entre-lui et l’événement. Au niveau esthétique de l’allégorie c’est l’horizon [18] qui a souffert de la perte et de cette façon les habitants des taudis sont écartés de la conscience de ce jeune intellectuel. Par contraste, en parlant des habitants des taudis Sekoni révèle l’humanisme qui caractérise son discours personnel. Le fait que son bégaiement est plus accentué que d’habitude suggère la sincérité de ses paroles. Celui qui, en tant qu’ingénieur, a voulu ériger des constructions solides pour l’avenir de son peuple est contraint de regarder, impuissant, pendant que ce peuple souffre dans la fragilité de ses baraques effondrées. Mais Sekoni n’est pas indemne de la tendance vers la mystification. Son peut-être – « P-p-p-perhaps… » – est une invitation aux autres qui n’a pas de suite. Il s’agit d’une expression humaniste mais timide qui est vidée de sens parce qu’elle n’est jamais réalisée et parce qu’elle devient aussi hypocrite que les propos d’Egbo. Il s’agit ici d’un phénomène analogue à ce que Bakhtine appelle la « réfraction de l’être dans le signe idéologique. » [19]

La critique semble unanime pour nommer Sekoni le plus sincère et le plus intensément dépeint des personnages dans The Interpreters. [20] Il est vrai.. que le procédé du bégaiement accentué de cet interprète nous oblige à lire ses paroles avec une plus grade attention qu’on accorde aux discours des autres. Dans la caractérisation de Sekoni le lecteur prête autant d’attention au signe qu’à la signification parce que tout devient essentiel pour suivre et comprendre le discours. L’auteur procède à une désintégration du mot pour lui accorder la plénitude de son sémantisme. Il est très évident qu’en certains endroits le morcellement du mot a comme fonction sémantique l’approfondissement de tel ou tel autre sème. Voici la réaction de Sekoni à la première version d’un portrait d’une danseuse que Kola a dessinée :

His distress was apparent although he had not yet succeeded in getting out a word. Glaring, Egbo waited for him to erupt. ’Nnnnihilist !’ At last, forced out like the sudden follow-out from a tyre valve. ’T-t-to be afraid of gog-g-goodness. In an intelligent man, a ffear of b-b-beauty or g-g-good is c…cowardice. (Interpreters) [21]

Les effets du discours de Sekoni agissent sur ses interlocuteurs avant même leur énonciation. Le bégaiement qui annonce chacun des noms abstraits fait ressortir l’essentiel du discours. Le premier et le dernier mot portent des connotations morales négatives et les deux sont bégayés de façon significative. Dans le cas ’Nnnnihilist’ le mot est davantage accentué parce qu’il s’agit du premier ternie né de la lutte intérieure du sujet parlant et parce qu’il s’agit d’une exclamation. Le substantif ’fear’ n’est qu’un attribut humain comme les autres termes employés. Le bégaiement sur ’to’ est un appel à l’ordre, l’annonce de la phrase qui expliquera le contexte sémantique du mot ’nihilist.’ Il s’agit d’un stratagème esthétique qui sert à faire valoir tout ce que dit ce personnage et à souligner, dans ce cas-ci, la portée de ses paroles. L’isolement syntaxique de la proposition, ’T-t-to be afraid of gog-g-goodness.’ indique que ces mots ne s’appliquent pas uniquement à Kola. Cette forme syntaxique inusitée évoque les procédés stylistiques de la rhétorique scolastique et la phrase suivante confirme la portée générale de ce discours de moralisateur. C’est ainsi que Soyinka semble souligner l’importance primordiale du mot devenu parole textualisée et contextualisée. [22] C’est Sekoni qui détient la Parole et ses écarts phonétiques deviennent pour ses interlocuteurs romanesques et pour le lecteur des écarts stylistiques qui contribuent au sémantisme de son discours. Les paroles citées ci-dessus déclenchent une succession de réactions qui aboutissent à la production d’un autre dessein que Sekoni trouve acceptable [23]

Sekoni sert de repoussoir aux autres interprètes dans la mesure où leurs réactions respectives à l’énonciation de ses idées nous révèlent des aspects essentiels de leur pensée. Sagoe, par exemple, est tout à fait déconcerté par la présence et par le débit de Sekoni. [24] Kola, par contre s’inspire de Sekoni et de sa production esthétique. [25] En effet, immédiatement après son décès et le désarroi des amis qui en résulte le dénouement du roman s’organise autour des suites de la vie et la mort de Sekoni. Le groupe d’interprètes s’est fixé un but précis – l’exposition – au nom du défunt dont l’œuvre serait exposée. En même temps divers aspects thématiques du roman – l’épanouissement du rôle de Bandele ; [26] l’histoire de la jeune étudiante ; celle de Lazarus ; de Monica et Kola ; de Golder et ainsi de suite se relient à l’évocation de divers éléments de la caractérisation de Sekoni.

Il convient donc que le présent et l’avenir des personnages et du roman soient régis par un personnage du passé parce que lui-même pendant son existence procédait par un système de retours en arrière. En effet, c’est par un « flash-back » que Soyinka nous présente l’histoire de Sekoni l’ingénieur [27] tandis que les réactions du personnage sont souvent en retard sur les événements qui se produisent autour de lui. [28] Le « mythe » qu’il invente pour expliquer son bégaiement [29] lui fournit une façon concrète d’exorciser sa frustration. Mais la concrétisation mythique d’une condition premièrement neurolinguistique devient une mystification – une arme efficace dans l’enjeu des rapports humains. L’histoire enfantine et absurde des cailloux avalés fausse les termes du dialogue entre Sekoni et ses interlocuteurs parce que ses difficultés d’expression verbale suscitent une réaction de compassion et réussissent à désemparer Sagoe, à rendre Kola mal à l’aise et à réduire d’autres au silence. De cette façon paradoxale il reste le maître incontestable de la parole dans le sens où il est écouté beaucoup plus attentivement que les autres et la lenteur de sa parole fait que ses camarades comme ses lecteurs accordent plus de temps à la compréhension de ses idées énoncées en dialogue. Il s’empresse souvent de donner une interprétation aux événements parfois les plus banals mais ce qui est frappant c’est que dans la plupart des cas il accentue la portée esthétique et morale de l’événement, s’appuyant sur sa théorie du dôme de la continuité.

Cependant, la théorie cosmique de Sekoni concernant le dôme introduit une notion philosophique importante dans le texte. Si des personnages tels Kola et Egbo vivent une réalité psychique yourouba mal-définie et si Lazarus évolue dans un syncrétisme religieux yourouba-chrétien, Sekoni nous présente l’harmonisation théorique de tous les facteurs de l’existence humaine. S’agit-il d’un véritable dépassement spirituel, psychologique, psychique ou idéologique de la réalité terrestre ou bien de la sainteté islamique de ce personnage ambigu qui a abandonné sa femme, ses enfants et son père ? Quoi qu’il en soit nous n’avons aucune évidence dans le roman que la vie de Sekoni correspondait à ce qu’il préconisait comme vision totalisante de l’univers. N’oublions par ce mot très intéressant du narrateur omniscient du roman :

Few people achieved the right indifference to Sekoni, and his fantasies needed so much time to unburden (Interpreters) [30]

Doit-on comprendre que les interlocuteurs de Sekoni – les autres interprètes aussi bien que les lecteurs du roman – ne devraient pas le prendre trop au sérieux ? Peut-être s’agit-il de l’ironie du narrateur qui nous manipule à travers le texte et dont on doit parfois se méfier si l’on cherche à tirer des conclusions cohérentes de ce roman. L’évocation fréquente de Sekoni après sa mort rend son rôle romanes que d’autant plus significatif que c’était lui qui avait constaté la nécessité de garder le contact avec le passé et les morts dans l’intérêt de l’équilibre du dôme de la continuité. [31] La comparaison des deux discours suivants est très révélatrice :

But Sekoni had been toiling and he burst wilh a sudden effort at the threat to the closing of the the me, ’In the d-d-dome of the cosmos, th-there is com…plete unily of Lllife. Lllife is like the g-g-godhead, the plurality of ils mmmanifest… tations is only an illusion. Th-the g-g-godhead is one. So is life, or d-d-death, b-b-both are c-c-contained in th-the single d-d-dome of ex…istence. (Interpreters) ( 122)

It is necessary to recall again that the past is not a mystery and that although the future (the unborn) is yet unknown, it is not a mystery to the Yoruba but co-existent in present consciousness. (Myth…)(149)

Le discours de Sekoni et celui de Soyinka révèlent la tendance vers une conception cosmique de la temporalité qui contraste avec le rejet catégorique du passé par Egbo. C’est ainsi que le lecteur comprend la revalorisation du passé qui s’opère dans l’œuvre de Soyinka et l’expérience du futur comme une dimension ontologique du présent. On conclut que l’attitude d’Egbo est nihiliste dans le contexte de la temporalité yourouba car il s’isole dans le présent de son existence, même s’il revisite les lieux de la noyade de ses parents pour y chercher la régénération psychique. Paradoxalement, Egbo est étroitement lié, malgré lui, à son passé et par la grossesse de l’étudiante anonyme il se procure une dimension future lourde de conséquences possibles. La fragilité philosophique et psychique de la position ontologique d’Egbo est soulignée par l’essayiste Soyinka qui confirme la vision de son personnage Sekoni. Ceci nous porte à suggérer la possibilité que ce dernier soit le porte-parole littéraire de l’auteur parce que ses propos s’accordent essentiellement avec ceux de Soyinka l’essayiste.

En effet, après sa mort on assiste à une véritable apothéose de Sekoni.

C’est comme si son voyage à l’étranger pour étudier, son pèlerinage à l’Orient, son humiliation et destitution par des fonctionnaires malhonnêtes et son séjour dans l’hôpital psychiatrique ne sont que les divers chemins qui mènent à la divinisation. Dans un de ses essais Soyinka définit l’apothéose de Sango comme la convergence de [diverses] énergies dans la continuité cosmique. Nul doute que Sekoni subit un sort romanesque analogue.

La constance de la focalisation textuelle sur Sekoni nous indique bien que c’est à partir de ses paroles qu’on commence à déchiffrer les divers messages du roman. Parmi ces « messages » se trouve la vision esthétique de Sekoni et ses procédés de production artistique. C’est à travers les pensées de Kola qu’on revit la conception de la sculpture faite par Sekoni. [32] L’incident banal qui a inspiré la sculpture a précédé de quelques années l’exécution du travail. Tout comme les idées de Sekoni s’extériorisent difficilement par la parole l’ingénieur-artiste avait couvé les scènes de la lutte dans le bar jusqu’au moment où la conception esthétique éclate au niveau de l’acte de la production artistique et l’identité du sculpteur fond dans cet éclatement de pouvoir. Mais Kola se rend compte de la primauté de l’idée, de la conception esthétique par rapport à l’objet produit :

And Sekoni, there was also Sekoni, and he had exploded suddenly wilh this fact of power, but Kola cast back his mind and knew it was not so sudden. For how could the actual artifact be more important than the revelation in the man’s living power ? (Interpreters)(219)

La conscience très tardive de cette longue gestation esthétique du « Wrestler » rend la réalisation artistique secondaire par rapport aux possibilités de concevoir de l’artiste. La sculpture devient la cristallisation et d’un évènement banal et d’un procédé esthétique. Il est tout à fait à propos que Kola devienne l’interprète de l’esthétique de Sekoni parce qu’une des conséquences de la mort de celui-ci est l’acharnement de Kola pour acheer son tableau si complexe et dont les principes de base sont profondément enracinés dans les vérités psychiques des Yourouba. [33]

Kola s’inspire d’un autre interprète aussi. C’est le souvenir des paroles d’Egbo sur le pouvoir qui provoquent le « flash-back » sur la lutte dans le bar et les réflexions de Kola sur l’esthétique de Sekoni. Si la caractérisation d’Egbo n’a pas l’envergure de celle de Sekoni [34] il est toute de même celui qui vit le plus proche à la réalité du psychisme de ses origines. Il se définit à travers l’expérience insolite de son enfance où il a survécu à l’accident dans lequel ses deux parents se sont noyés. L’intensité de cette épreuve psychologique et psychique l’a laissé fasciné par l’endroit de l’accident et émotionnellement dépendant des eaux de sa terre natale. Mais son attachement à cet endroit qui semble exister en dehors du temps et de l’espace est profondément émotionnel et il y puise assez de force pour se soutenir et pour soutenir ses camarades. [35] Il est intéressant de noter que c’est à la jeune étudiante anonyme qu’Egbo décrit son rattachement à l’endroit sous le pont. [36] Elle est victime d’une certaine irresponsabilité qu’elle partage avec Egbo et le fait que la conception de leur enfant aurait eu lieu à l’endroit de la régénération de celui-ci rend les lieux plus significatifs dans la symbolique du roman. [37]

Mais comme nous avons déjà vu c’est Egbo qui rejette ce qu’il considère l’emprise du passé sur le présent. C’est lui qui posê la question suivante :

Don’t you ever feel that your whole life might be sheer creek-surface bearing the burdens of fools, a mere passage, a mere reflecting medium or occasional sheer controlled by ferments beyond you ? (Interpreters) (13)

Obsédé par l’abjection du présent il vit dans la futilité de son existence déterminée semble-t-il par les Derinola, Winsala et autres qui passent leur vie à s’enrichir au dépens du peuple. Les « ferments beyond you » ne se situent pas dans un au-delà métaphysique mais se manifestent dans le pouvoir socio-économique exercé par la classe dominante du pays. La mainmise de cette classe s’étend partout – à la conscience des individus et aux endroits les plus reculés. [Tel le hameau d’osa. Voir aussi Season of Anomy. p. 160-166 ; 171-175.]] L’emploi de l’image « sheer creek-surface » fait valoir le lieu privilégié de la noyade où il se trouve au moment où il prononce ces mots. La profondeur de l’expérience associée avec l’image contraste avec la valeur sémantique accordée aux mots qui accentuent la surface des eaux. Les mots privent l’endroit de son mystère et le livre à la turbulence de l’actualité socio-politique car le désespoir d’Egbo n’est pas la manifestation d’un simple malaise généralisé. Il s’agit d’une réaction compréhensible à une situation idéologique précise et dont tous les interprètes sont victimes. Quelques lignes plus tard Egbo déclare qu’il veut simplement se libérer de la surface des eaux. Il s’ensuit que les termes de l’énonciation sont déterminés par les lieux et ceci au début du roman. En effet, à travers le texte l’énonciation du discours d’Egbo est régie par son emprisonnement psychique et psychologique dans le temps et l’espace de ce seul endroit.

Egbo est un personnage profondément troublé et dans ses moments de détresse il s’adonne à ses hallucinations qui ne sont jamais gratuites. Elles soulèvent la question de la cohérence discursive et stylistique du texte tout en nous lançant le défi du décodage :

Silently he watched him choke slowly on his college tie which had assumed a will of ils own and pressed ils on the gulping Adam’s apple. The beer reversed direction and Lasunwon’s nostrils were twin nozzles of a fireman’s nose. When Egbo opened his eyes he was astonished to see Lasunwon beaming across the floor to an acquaintance. (Interpreters)(15)

La lecture des phrases précédant cette situation nous apprend que Lasunwon n’est pas beaucoup aimé par les autres et qu’Egbo cherchait un objet sur lequel se venger pour sa propre impuissance. Au début de la citation ci-dessus le narrateur nous fait croire qu’on nous raconte les observations oculaires d’Egbo. C’est dans la dernière phrase que le lecteur se rend compte du fait qu’Egbo avait les yeux fermés pendant toute la scène décrite. L’étonnement d’Egbo est aussi grand que le nôtre et le lecteur reconnaît qu’il s’est laissé égarer par le narrateur. L’emploi des deux adverbes « Silently…slowly… » sert à rendre l’action très nette et précise et le premier qualifie le rôle passif du spectateur présumé tandis le second accentue le supplice infligé à Lasunwon par une volonté implacable parce que moralement irresponsable. La cravate universitaire représenterait tout ce qu’il y a de faussement prestigieux, de mystificateur et d’opprimant dans la société. Elle est la symbolisation du privilège, du savoir livresque et du pouvoir et il est donc tout à fait à propos que ce symbole devenu arme socio-économique et politique se munit d’un vouloir et procède à la strangulation de l’avocat-politicien. Pourtant, c’est Egbo qui agence le drame par son abandon à l’hallucination et c’est donc lui qui appuie le nœud de la cravate contre la pomme d’Adam de Lasunwon. Enfin, la bière qui jaillit par les narines – par où entre le souffle de la vie – de l’avocat parachève la strangulation dans une expression ultime de rejet. L’étonnement d’Egbo indique, fort probablement, qu’il s’agit d’un état de psychose hallucinatoire dans lequel nous avons été soigneusement conduits par l’auteur.

En effet, Egbo semble vivre dans un univers où le réel et l’irréel se côtoient et se confondent. Mais presque tous les personnages masculins du roman semblent nier la vie par leur mythomanie et Bandele – le plus rationnel des interprètes – avertit les autres.

’Just be careful. When you create your own myth dont carelessly promote another’s and perhaps a more harmful one’. (Interpreters)(178)

Les implications idéologiques et philosophiques de ces mots dépassent le roman dont il est question ici mais ils nous indiquent pourquoi Egbo s’est senti confus et s’est fâché quand il a vu le tableau de Kola. L’être qui surgit des eaux primordiales est l’albinos [38] Lazarus tandis qu’Egbo est l’Ogun de la destruction. Il aurait préféré être Ogun l’artisan ou Ougun le créateur artistique et il ne peut pas accepter sa dépiction sous la forme d’Ogun guerrier sanguinaire qui massacre ses propres troupes. Egbo ne reconnaît pas qu’il fallait le destructeur pour avoir le créateur humaniste et que s’il a été « figé » dans le carnage c’est parce que l’artiste, Kola, interprète clairement le potentiel du jeune fonctionnaire. Dans la scène du tableau il s’agit du même Ogun qui avait été obligé de se revitaliser par sa seule volonté et qui avait refusé à plusieurs reprises la couronne d’Ire [39] parce qu’il craignait, comme Egbo, les implications d’une telle accession au pouvoir.

Invité par son peuple à assumer le trône clanique, Egbo est attiré par le pouvoir et les privilèges [40] mais effrayé par les obligations qu’impose un passé pour lui tyrannique. En voulant se libérer de la surface des eaux il cherche une double évasion – l’éloignement de la corruption politique et aussi de ses obligations ancestrales. [41] Il ne cherche à rien construire, à rien produire et même au niveau du discours il se heurte aux conditions sémiotiques de ses limites ontologiques. Il diffère en ceci de Sekoni et Kola qui ont été contraints de dévier de la voie tracée par leur profession [42] pour se réaliser dans l’art.

Dans ces deux- derniers cas il s’agit du dépassement de l’artiste qui essaie d’atteindre la réfraction du contexte socio-psychique. Chacun des interprètes révèle les signes d’une aliénation spatio-temporelle qui prive leur existence d’une signification précise et identifiable. La superficialité de l’existence que déplore Egbo est devenue le sort de ceux qui ont abandonné la lutte contre la cupidité des dirigeants. L’échec professionnel de Sekoni est aussi grand que celui de Sagoe mais Sekoni a réalisé deux productions impressionnantes tandis que Sagoe ne se libère pas de son discours excrémentiel. [43] Le journaliste tente d’éliminer le présent et sa falsification de la temporalité le contraint à se vautrer dans la débauche et à se soumettre aux combines de ses supérieurs.

Lazarus, comme Egbo, est passé par une régénération dans sa propre mort, et lui aussi essuie un échec dans la fuite de Noah. Lui aussi se définit par rapport à la mort – la sienne – même si sa pensée religieuse est basée sur la résurrection – également la sienne. Le discours de Lazarus est ponctué par des points de repère chrétiens parce qu’il se cantonne dans les limites d’un énoncé mystificateur. Sa réhabilitation des criminels et sa mission religieuse lui accordent un rôle littéraire analogue à celui de Sekoni car il essaie de transformer la vie sociale des êtres humains qui n’ont pas de voix sociale et politique. L’église de Lazarus renvoie à la centrale électrique de Sekoni et celle-ci nous rappelle le barrage dans Season of Anomy. [44]

Il est très évident que le théâtre et les romans de Wole Soyinka transmettent des messages idéologiques sur l’état contemporain des choses. Cette préoccupation de la réalité vécue de toutes les couches du peuple est véhiculée par une esthétique qui prend ses racines dans l’histoire socio-linguistique et religieuse de ce même peuple. Le symbolique qui détermine le système sémantique du roman se manifeste à travers le récit narratif ainsi que dans les dialogues des personnages.

Pourtant, chacun des personnages porte en lui une ontologie déviationniste particulière qui l’éloigne de la symbolique unificatrice du texte romanesque. Conscients de leur situation culturelle précaire les interprètes cherchent à se valoriser par une éruption parfois très destructrice Sur le plan de la réalité quotidienne. En ce faisant ils sont désarçonnés par la futilité de leurs propres actions et démontrent tous une soif de l’engagement social et psychique qu’ils semblent incapables d’entreprendre.

Soyinka a écrit que l’ontologie de l’expression littéraire est subordonnée à ses préoccupations idéologiques. [45] Cependant, l’on devrait bien comprendre que la forme esthétique est déterminée par les données idéologiques. L’écriture de Soyinka est très soignée et le lecteur est obligé à se rendre compte des diverses dimensions sémiotiques, sémantiques et intertextuelles d’un discours culturel éclectique. Il s’agit assez souvent d’un discours sur l’énonciation et d’un discours sur le discours. On est parfois aux prises littéraires avec une intratextualité par laquelle le sermon de Lazarus ou les textes excrémentiels de Sagoe deviennent les éléments référentiels qui régissent le récit narratif et qui établissent les conditions sémantiques des dialogues. Ces textes secondaires dans le texte principal deviennent les points de repère du discours romanesque. Mais le romancier tient bien fermement les fils de tous ces discours disparates et leur accorde une cohérence esthétique.

Malgré le souci de perfection esthétique Soyinka reste fidèle aux termes de cette déclaration faite dans un des essais publiés dans son ouvrage Myth, Literature and the African World :

A creative concern which conceptualises or extends actuality beyond thepurely narrative, making it reveal realities beyond the immediately attainable, a concern which upsets orthodox acceptances in an effort to free society of historical or other superstitions, these are qualities possessed by literature of a social vision. (Myth…(66)

Ce que l’auteur a su démontrer dans sa production esthétique du roman The Interpreters c’est que la narration révèle des réalités cohérentes bien au-delà de l’immédiat dans la mesure où l’écrivain est capable d’exploiter les possibilités que lui présente le discours en tant qu’énonciation sémio-sémantique d’un état psychique donné. Effectivement, c’est la réussite esthétique de cette formulation idéologique et littéraire qui donne à l’œuvre de Soyinka ses caractéristiques distinctives.

[1] Wole Soyinka, The Interpreters, London, Heinemann, 1970. Première édition : London, André Deutsch, 1965.

[2] C’est Soyinka lui-même qui souligne l’importance de l’idéologie en littérature. Voir ses deux essais sur l’idéologie in Wole Soyinka, Myth, Literature and the African World, Cambridge, Cambridge University Press, 1976. pp. 61-139.

[3] Nous employons le mot français « interprète » comme équivalent de « interpreter » parce que le mot anglais subit une transformation sémantique particulière dans le roman de Soyinka et de cette façon on procède à une opération semblable dans les deux langues. On doit signaler que l’écrivain martiniquais Edouard Glissant avait déjà produit un roman dans lequel il y a un protagoniste collectif – La Lézarde, Paris, Seuil, 1958. Dans The Interpreters il s’agit d’un groupe de personnes qui tout comme des catalyseurs livrent au lecteur des interprétations de la réalité dans laquelle elles vivent. Elles déterminent le récit et le dénouement du texte. Elles font contraste avec le seul protagoniste, type de héros d’épopée, du deuxième roman de Soyinka, Season of Anomy. New York, The Third Press, 1974.

[4] Les principaux interprètes semblent être : Bandele, Egbo, Kola, Sekoni et Sagoe. Lasunwon joue un rôle secondaire dans le groupe et Lazarus en devient membre sans jamais participer de la praxis de groupe. Golder et les femmes Dehinwa, Simi, Monica et l’étudiante anonyme ne font aucune contribution idéologique au groupe.

[5] Mikhail Bakhtine, Le marxisme et la philosophie du langage : essai d’application de la méthode sociologique en linguistique. (trad. Martin Yaguelbo) – Paris, Eds. de Minuit, 1977. Première édition sous le nom de V.N Volochinov, Leningrad, 1929. p. 27.

[6] Marc Angenot, « Intertextualité, interdiscursivité, discours social, » Texte, No. 2, 1983. p. 106

[7] Voir, par exemple, les propos du professeur Oguazor : The Interpreters, p. 247-251.

[8] Bakhtine, op. cit., p. 42 n° 2

[9] Myth p. 1-36 ; 140-160. E.D. Jones, The Writing of Wole Soyinka, London, Heinemann, 1973.

[10] Umberto Eco, « On symbols, » Recherches Séiotique / Semiotic Inquiry. – Vol. 2, N°1, mars 1982. p. 18.

[11] The Interpreters. p. 224-225 ; 232 (la dépiction de Lazarus) ; W. Soyinka, Aké. New York, Vintage, 1983. p. 4-5 (le « portrait » de l’évêque Ajayi Crowther).

[12] Nous reconnaissons que notre manque de connaissance de la langue yourouba limite considérablement la portée de nos remarques sur le discours.

[13] Michael Riffaterre, « Sémanalyse de l’Intertexte (Réponse à Uri Eisenzweig), » Texte, No 2, 1983. p. 175.

[14] The Interpreters. p. 35-39 (Dehinwa) ; p.12 (Egbo) ; et voir aussi Ofeyi dans Season of Anomy.

[15] Dans The Interpreters comme dans Season of Anomy Soyinka ne ménage pas la critique explicite et implicite des Africains qu’il tient totalement responsables pour la vie sociale de leur pays.

[16] Il est vrai que la voix du peuple ordinaire est presque entièrement absente de deux romans. Ngugi écrit à ce propos : « Soyinka’s good man is the uncorrupted individual : his liberal humanism leads him to admire an individual’s lone act of courage, and thus often he ignores the creative struggles of the masses. The ordinary people, workers and peasants, in his plays remain passive watchers on the road ». Ngugi Wa Thiong’o, Homecoming, New Tork, Lawrence Hill, 1973. p.65. Dans un article véritablement innovateur et important David Maughan-brown semble avoir un élan potentiellement révolutionnaire dans le roman Seanson of Anomy que nous ne voyons pas. Voir D. Maugham-Brown, « Interpreting and the Interpreter : Wole Soyinka and the pratical criticism, » English in Africa, vol.6, N°2, 1979 p. 51-62

[17] Il est vrai que la voix du peuple ordinaire est presque entièrement absente de deux romans. Ngugi écrit à ce propos : « Soyinka’s good man is the uncorrupted individual : his liberal humanism leads him to admire an individual’s lone act of courage, and thus often he ignores the creative struggles of the masses. The ordinary people, workers and peasants, in his plays remain passive watchers on the road ». Ngugi Wa Thiong’o, Homecoming, New Tork, Lawrence Hill, 1973. p. 65. Dans un article véritablement innovateur et important David Maughan-brown semble avoir un élan potentiellement révolutionnaire dans le roman Seanson of Anomy que nous ne voyons pas. Voir D. Maugham-Brown, « Interpreting and the Interpreter : Wole Soyinka and the pratical criticism, » English in Africa, vol.6, N°2, 1979 p. 51-62

[18] L’évocation de l’horizon éloigne l’incident des spectateurs mais une autre dimension de sa polysémie indique que l’effondrement s’est fait aux limites prévisibles de l’existence de ceux qui regardent. De cette façon ils progressent vers la destruction de leur avenir.

[19] Bakhtine, op. cit., p. 43.

[20] E.D. Jones, op. cit., p. 157.

[21] The Interperters, p. 19-20

[22] Voir l’importance accordée au mot dans The Road, in W. Soyinka, Collected Plays. London, Oxford University Press, 1973. pp. 219-220.

[23] Les deux versions consécutives du dessein rappellent le projet de produire des timbres portant l’image du Sidi après la publication de ses photographies. Voir The Lion and the Jewel in W. Soyinka, Collected Plays 2. London, Oxford University Press, 1974.

[24] The Interpreters. p. 19-20.

[25] Ibid. p. 218-220 ; 228.

[26] Voir E.D. Jones, op. cit., p. 160. Jones accorde une importance un peu exagérée à ce personnage.

[27] The Interpreters. p. 26-31.

[28] Ibid. p. 17-18 ; 18-19 ; 25-26.

[29] Ibid. pp. 17-18.

[30] Voir l’importance accordée au mot dans The Road, in W. Soyinka, Collected Plays. London, Oxford University Press, 1973. p. 219-220.

[31] Ibid. p. 9 ; 122. La thanatologie dans l’œuvre de Soyinka mérite une analyse approfondie pour qu’on puisse apprécier la portée de sa conception de la mort.

[32] The Interpreters. p. 219 ; 220.

[33] Les personnes dépeintes sur le tableau de Kola représentent des divinités yourouba. Voir E. D. Jones, op. cit., p. 4-8. Pour une analyse précise et approfondie de l’enjeu entre mythe et personnages voir ; BU-Buakel Jabbi, « Mythopoeic sensibility in The Interpreters : A Horizonal Overview, » Obsidian. Vol. 7. Nos. 2-3, 1981. p. 43-74.

[34] Ibid. p. 157.

[35] Ahime éprouve des sentiments semblables au bord de l’étran qu’il fréquente pour rétablir ses forces. Voir Season of Anomy, p. 105

[36] The Interpreters, p. 133.

[37] Comme les autres femmes du roman The Interpreters la jeune étudiante anonyme n’est guère importante en tant que personnage romanesque. Elle n’est qu’un catalyseur comme Dehinwa, Simi et Monica. Ce serait difficile de les considérer comme interprètes de leur monde et de leur destin parce qu’elles n’existent qu’en fonction des hommes qu’elles fréquentent. De même dans Season of Anomy l’adoration et la recherche d’Iriyise ne sont que les manifestations littéraires d’un discours tout à fait masculin. Seule Taiila, qui tire sa raison d’être de son association avec Ofeyi, semble véhiculer un discours narratif particulier

[38] Voir Myth…, p. 15 où Soyinka mentionne l’origine mythique des albinos.

[39] Myth…, p. 26-33.

[40] Le plus grand attrait est la possibilité d’avoir plusieurs épouses. L’attitude des interprètes principaux envers les femmes se caractérise par un manque de responsabilité humaine et sociale. Les femmes n’existent que pour leur plaisir. Seul Sekoni ne semble pas se conformer à ces normes du groupe et nous apprenons après sa mort qu’il avait abandonné son épouse.

[41] Il est important de rappeler qu’Ofeyi s’engage contre le régime surtout et avant tout pour tenter de sauver Iriyise des dangers qui la menacent. Même la possibilité de rapatrier les hommes d’Aiyéro est secondaire. Il y a très peu de motivation idéologique dans sa décision mais c’est la volonté de rejoindre la femme désirée qui le pousse aux actes d’héroïsme.

[42] Kola lui-même dit qu’il est bon professeur mais pas un artiste. Sekoni a été destitué de son poste d’ingénieur.

[43] Il y a tout un travail à faire sur le discours de Sagoe – le plus destructeur des interprètes parce que sa « philosophie » n’est que la rationalisation d’une tendance suicidaire latente.

[44] Season of Anomy. p. 171-175.

[45] Myth…,p. 64.