JE PROMETS, SI DIEU LE VEUT, D’ENTENDRE LE TAM-TAM ET DE BOIRE AUX SOURCES LAMANTINES
Ethiopiques numéro 11
revue socialiste
de culture négro-africaine
juillet 1977
Pour mieux enraciner mes yeux, mes oreilles et ma tête sur ma
poitrine
Pour mieux enraciner mes yeux, mes oreilles et ma tête au bas
ventre
Je promets de venir si Dieu le veut entendre le tam-tam
Je promets de venir boire aux sources lamantines pour pouvoir
ainsi mieux brûler de la flamme qui s’étire, qui se tord,
qui s’allonge ; pour pouvoir mieux brûler sans m’éteindre,
espérant un jour brûler sans poussière.
Oh ! Dieu Créateur que je sers, que j’adore, nourris, je te prie,
de jour en jour, mon enfant le poème
Mais pour mieux le faire grandir, pour mieux le faire épanouir,
j’ai besoin non seulement de plaines, collines et montagnes corses,
mais aussi de l’Afrique noire et surtout du Sénégal.
Je veux entendre le tam-tam pour mieux comprendre ta voix plus
forte que les fortes eaux, ta voix aux mille tonnerres, ta
voix juste qui me fait aimer mon frère sans frontières.
Je veux boire aux sources lamantines, pour mieux boire aux sources de la vie.
Oui, je sais que pour certains ces pensées plus douces que le
miel, ne sont que verbiage et faible sentiment, mais qu’importe
les moqueurs ! Il faut les pardonner !
Car l’enfant, le poème, a besoin aussi de ronces, d’épines, de
charbons, d’orties et de pierres pour mieux grandir et pour
mieux s’épanouir.
Je veux entendre le tam-tam, je veux boire aux sources lamantaines.
Epaule contre épaule avec mon frère noir, mon frère blanc
retourner dans l’Eden.
Les anges à l’épée fulgurante, les anges fidèles, pas ceux qui
sont dans la tartare, laissent passer les serviteurs de celui
qui est dans les allées du paradis, paradis aux arbres chargés
de mille fruits de guérison.
Ne craignons pas, mon frère, le lion, le dragon à sept têtes,
le serpent menteur infâme. Les milliards de milliards de
séraphins du Puissant sont la femme.
Je veux entendre le tam-tam. Je veux boire aux sources lamantines,
Pour nourrir, avec mon frère noir, mon frère blanc,
notre enfant le poème.
L’entourer de pierres ininflammables. Le chaume, le bois, la paille
ne conviennent pas pour le poème. Le poème, oiseau
de hautes sphères, le poème Divin. Le poème agrée, chanté
par les soldats célestes, qui n’ont pas de chair : les étoiles
du matin. Le poème qui ne cherche pas sa propre gloire.
Le poème enfant, le poème adulte qui reconnait en tout YAVHE,
son père qui était, qui est et qui sera.