IBIS-ANUBIS
Ethiopiques numéro 04
Revue socialiste
De culture négro-africaine
Octobre 1975
Nous offrons ici à nos lecteurs un poème inédit que le grand poète antillais Aimé Césaire a réservé à « ETHIOPIQUES ».
Quelques traces d’érosion
Des habitudes de gestes (produits de corrosion) les silences
Des souvenirs aussi de raz de marée
Le chant profond du jamais refermé
Impact et longue maturation de mangrove
Sourde la sape
Toujours différé l’assaut
Il est permis de jouer les rites du naufrage
(À situer quelque part entre allusion et illusion)
La signature douloureuse d’un oiseau
Sous les alphabets incompréhensibles du moment
Je ne saurai jamais premières d’un message quelles paroles forcèrent ma gorge
Ni quel effort rugina ma langue
Que me reste-t-il ce jour sinon penser
Qu’à la face du destin à l’avance
J’éructai une vie
J’ai tiré au sort mes ancêtres une terre plénière
Mais qui blesse qui mutile
Tout ce qui abâtardit le fier regard
Ou plus lente
Ou plus riche
La curée urubu ou le rostre copilote
J’ai eu je garde j’ai
Le libre choix de mes ennemis
Couchant fantôme si s’y allume le mien
Parole grand-duc tu clameras ce cri à sa gueule d’anubis.