Culture et civilisations

IMAGE DE LA FEMME NOIRE DANS LA LITTERATURE D’AMERIQUE LATINE

Ethiopiques numéro 04

Revue socialiste

de culture négro-africaine

octobre 1975

 

Par image de la femme noire et mulâtre, entendons celle qu’en a bien voulu donner l’homme, et le plus souvent l’homme blanc. Car la femme de couleur en Amérique latine n’a pas publié ou infiniment peu ; on chercherait alors en vain une littérature écrite qui serait l’oeuvre d’écrivains du genre de Colette, ou Simone de Beauvoir ou même de Gabriela Mistral (Chilienne, Prix Nobel de Littérature).

Les raisons en sont diverses : situation de la race noire qui s’intègre, il est vrai, mais difficilement et lentement dans la société d’Amérique latine ; et surtout situation de la femme dans un continent qui fait l’apologie du « machismo ». Pour illustrer cette théorie de l’exaltation du mâle, du surmâle, voici quelques extraits révélateurs d’un conte noir du Choco, en Colombie, qui décrit une scène de ménage chez un couple d’animaux : l’époux M. Crapaud, l’épouse Mme Grenouille. « Grenouille lui répondit avec des paroles de reproche :

– Si je me suis mariée avec toi, ce n’est pas pour que tu continues à voir tes concubines.

Crapaud se mit en colère, il se précipita sur le fouet, lui administra une bonne raclée, et la traîna par terre. Grenouille répliqua, en se défendant un couteau à la main :

– Quelle brute ! Tu ne vois même pas que je suis encore enceinte » [1]. Voilà donc comment le sexe dit faible est mené par le « macho » : à la baguette, et si on le permet à la braguette aussi. Il est évident que dans ces conditions, la femme sera en premier lieu un objet.

D’un autre côté, le thème de la « Vénus noire » (ou de la « Vénus d’encre de Chine » comme dira le romancier colombien Bernardo Arias Trujillo, qui chanta la noire et magnifia ses malheurs dans son roman « Risaralda » [2] est un thème traditionnel dans de nombreuses littératures.

Cette constante va depuis le biblique « nigra sum, sed formosa » (je suis noire mais je suis belle) – du « Cantique des cantiques » – en passant par Gongora, poète espagnol du XVIe siècle, qui écrivit :

« Zambambu, je suis la brunette du Congo,

« Zambambu, je suis toute mignonnette » [3].

En passant aussi par l’Italie, avec le thème de la « belle maure », et par la France avec les baroques puis les romantiques : Théophile Gautier n’va-t-il pas dit « mer d’ébène ou ma main aimait à se noyer », en parlant de sa passion du moment. Et un des sommets de ce genre littéraire reste la série des poèmes de Baudelaire sur Jeanne Duval, la mulâtresse.

« Je plongerai ma têtes, amoureuse d’ivresse,

Dans ce noir océan… »

Ou bien :

« Sorcière au flanc d’ébène, enfant des noirs minuits » [4]

Mais que cela est froid ! Même dans « Le serpent qui danse », tentative rythmique intéressante préfigurant quelques effets négristes.

Néanmoins, cette femme noire qui apparaît dans la littérature n’est pas exclusivement modèle de beauté. Juan de Timoneda, auteur espagnol du XVIe siècle la tenait comme symbole de laideur :

« Je ne suis négresse ni mulâtresse

Pour ne point avoir d’amours » [5].

Le grand poète mulâtre cubain Gabriel de la Conception Valdès (plus connu sous le nom de Placido) qui joua un grand rôle dans la lutte de son pays pour l’indépendance, au XIXe siècle, loue de préférence la femme blanche [6]. Dans certaines de leurs « coplas », les noirs colombiens, eux-mêmes, se moquent, pas très gentiment, de leurs compagnes :

« Si une négresse ne veut pas de moi

Je ne perds absolument rien,

Je me dis que j’ai perdu

Les fortes d’un poulailler » [7]

L’amoureux transi d’une chanson brésilienne de la fin du XVIIIe chantait :

« Si tu ne veux pas venir

Va-t’en chienne

A la figure de singe

Va-t’en figure de suie

Faire la cour aux Créoles » [8].

Le poète noir brésilien Joao de Cruz E Souza, symboliste, avait l’obsession de la blancheur : on a dénombré dans les 54 poèmes de « Boucliers » le mot blanc ou ses synonymes répétés 169 fois [9].

Mais lorsqu’en 1925-1930 apparaît le courant négriste, il fit, par réaction, l’apologie exclusivement de la femme noire ou mulâtre. Il ne faudra néanmoins pas confondre la poésie négriste avec le mouvement littéraire traditionnel, cité plus haut, même si elle s’en inspira au début. En effet, ce fut la poésie de la réhabilitation esthétique de la femme noire et à travers celle-ci, toute femme ayant sa descendance, s’exprime la réhabilitation de l’ancienne race esclave. Cela s’était déjà produit en Haïti vers la fin du XIXe siècle [10], et de ce point de vue, cette littérature, comme la littérature indigéniste, tient à garder ses distances avec la littérature européenne en puisant son inspiration directement dans la terre d’Amérique, dans sa géographie, dans ses habitants. La première poésie, ouvrant l’école, apparut à Cuba en 1925 signée par Alfonso Camin ; elle porte le titre oh ! Combien symbolique d’ « Eloge de la femme noire » ; c’est le plus long poème jamais écrit sur ce sujet : 257 vers qui commencent ainsi :

« Négresse, charbon céleste, chair de tamarin… » [11].

Puis, durant une quinzaine d’années, très nombreux furent les élans lyriques d’auteurs célèbres, comme Nicolas Guillen, Emilio Ballagas, Luis Pales Matos, etc. Une femme, à tort oubliée aujourd’hui, tint un rôle important dans la diffusion de ce mouvement : la chanteuse et récitante mulâtre Eusebia Cosme qui, vers les années 30, remplissait le grand théâtre « Lyceum » de La Havane en déclamant les vers des poètes négristes et en les accompagnant de mélodies populaires [12]. Le Cubain Rafael Estenger lui dédia même un de ses poèmes : « Leyenda del Cimarron » [13].

Ruiz del Vizo Passia negra del caribe yotras areas » (p. 22). Mais il y avait déjà eu au siècle précédent des précurseurs moins connus ; par exemple en 1845, le dominicain Francisco Munoz del Monte dans sa poésie « La mulata » crie à sa « Vénus de bronze » : «  Pitié, par Dieu, pitié ! L’Homme n’est point de pierre  ». Et en 1847, l’Espagnol résidant à Cuba Bartolomé Crespo Borbon confesse dans « La mulata (lui aussi) : « C’est un piment dont la vue attire et dont le goût rend fou  » [14]. Toujours à Cuba vers 1850, Cirilo Villaverde écrivit un roman intitulé « Cecilia Valdès » dont l’héroïne, du même nom symbolise la beauté ; cette fille noire sera d’ailleurs un peu plus tard le personnage d’un opéra. Il n’est pas jusqu’à l’illustre nicaraguayen Ruben Dario qui n’ait écrit un poème sur ce thème : « La negra Dominga » en 1892 [15].

 

Sensualisme

Mais la particularité du courant négriste du XXe siècle, c’est que rapidement son lyrisme dériva en transports sensuels. Certains auteurs insistent tellement sur l’attirance physique que la femme noire ou mulâtre semble être convertie en un animal sexuel sans pensée ni sentiment. Toute l’anatomie arrondie féminine se trouva décrite ; déjà au XIXe siècle dans une chanson brésilienne, on pouvait entendre :

« Je suis la mulâtresse vaniteuse

Plus belle, plus coquette, plus délicate

Que de nombreuses blanches,

J’ai des déhanchements plus lascifs » [16].

Ah ! Ces « hanches puissantes » (comme dit José Zacarias Tallet dans sa « Rumba ») des afro-latino-américaines, on pourrait en donner un volume de citations. Autre rondeur : les fesses. Emilio Ballagas, désespéré, s’écrira :

« Je ne verrai plus mes instincts dans les miroirs ronds et joyeux de tes deux fesses ». ’

D’autres encore : le nombril ou le ventre : « Le nombril de la négresse est le centre d’un cyclone » [17].

dira Emilio Ballagas et Manuel del Cabral, dominicain, parlera du « tremblement de terre de ton ventre » [18].

D’ailleurs certains poètes n’évoqueront plus les « négresses » ou les « femmes », mais des « femelles ».

Cet excès entraînera la réaction du poète cubain Regino Pedroso (métis de chinois et de noire) en 1939 :«  Ne sommes-nous donc que rumbas, luxures noires et carnavals ? » [19].

En effet nous sommes loin de la candeur poétique des « coplas » des noirs colombiens du Choco – analphabètes – qui chantent au cours de leurs veillées :

« Tu es la rose chaste et généreuse

Le bien la lumière et le sel

La flamme de cette maison

La farine le vent et le pain  ».

Ou bien :

« La chemise de ma négrillonne

Ne la lavez pas au savon

Lavez-là à l’eau

Qui coule de mon coeur » [20].

Ou alors :

« Que peut bien faire ma négresse

Toute seule abandonnée ?

Pleurer, pleurer » [21].

Néanmoins, une explication s’impose pour comprendre cette vague sensuelle, qui n’est absolument pas une préfiguration de l’actuelle vague érotique européenne. Dans le Nouveau Monde, l’aphorisme espagnol de « me gustan todas » (je les aime toutes) se trouva être nécessité vitale pour les conquistadores où les colonisateurs qui arrivèrent le plus souvent sans famille. Cet amour pour la femme de couleur, s’il fut appétit, fut avant tout source de vie. La femme, certes, restait l’objet à conquérir mais en plus était la terre féconde. Une autre « copla » des noires colombiennes pose fort bien le problème :

« La bonne terre

Doit être brune

La femme qu’il faut à l’homme

Doit aussi être brune » [22].

La femme noire était donc pour l’homme, noir, blanc ou indien, synonyme de sensualité mais en plus de fertilité [23]. En outre, pour le Noir d’Amérique Latine qui vécut longtemps, et vit encore, en majeure partie éloigné de la culture livresque, la raison de vivre consiste à posséder une maison, un bout de terre, un chien pour garder son champ (tous ces éléments vitaux se retrouvent dans les romans du Colombien Manuel Zapata Olivella, par exemple) et à avoir des fils qui prolongent au delà de ses propres jours misérables l’image de ses formes physiques et ses angoisses palpitantes. Pour exercer cette dernière fonction, créateur et nourricier, laboureur et planteur, il a besoin de la terre de la femme pour y déposer sa patience de semeur. On peut dire que pour le paysan afro-latino-américain, chaque atome de temps est la possibilité d’un fruit certain. [24]. Dans les romans de Manuel Zapata Olivella, les hommes « sèment » les enfants dans les femmes qui « mûrissent » ; pour Alfonso Camin, la négresse est « sillon sous le soleil » [25]. Le Portoricain Luis Pales Matos identifie son île à une femme dans son poème « Antille-Mulâtresse ».

Cette équation femme = terre fertile = cosmos, trouve son origine dans les cultes de fécondité ancestraux. Lydia Cabrera dans ses « Contes nègres de Cuba », traduits en 1936 par Francis de Miomandre, nous a rapporté avec fidélité toutes les légendes qui ont traversé l’Atlantique et qui ont gardé en Amérique leur entière valeur. Un des personnages essentiels de ce panthéon est Ochun (déesse yoruba vénérée à Cuba, Haïti et au Brésil dans les divers rites afro-américains). Ochun est la déesse de l’Amour, elle personnifie l’allégresse sexuelle, elle est le prototype de nombreuses femmes de ces contes, passant, rapporte l’auteur de « plaisir en plaisir, d’amour en amour ». Ochun conçoit sans cesse, mais c’est Yemaya sa soeur, la déesse de la mer, qui élève ses enfants ; elle est décrite comme « la prostituée divine qui gouverne le monde par l’amour » [26]. Elle séduit le terrible Oggun, dieu de la guerre : ce mythe où l’on voit la force céder devant la femme féconde symbolise, selon le grand afro-américaniste Fernando Ortiz, le passage à une économie agraire. Ochun contribue aussi à pousser Chango, le dieu de la foudre, dans les bras de Yemaya, sa propre mère, commettant un inceste qui n’est pas sans rappeler le mythe d’Oedipe [27]. Ce n’est donc pas hasard si les femmes les plus sensuelles des poésies négristes s’appellent Carida quand on sait que Ochun est assimilée dans les religions afro-cubaines à la Virgen de la Caridad del Cobre (« Carida » du Cubain Marcellino Arozarena [28] ou «  Se lo dije a Carida ! » de Francisco Vergara, cubain aussi [29], par exemple).

L’histoire amoureuse de la femme noire est, comme celle de ces déesses, à la fois passion et souffrance, acceptation et viol. « Un son para ninos antillanos  » de Nicolas Guillen évoque bien cette ambiguïté :

« Sur la Mer des Antilles vogue un navire en papier…

Une négresse est à la poupe, un espagnol est à la proue…

Ah ! mon navire noir et blanc sans gouvernail.

Voyez-la la noire négresse, tout près, tout près de l’espagnol ;

et vogue vogue le petit bateau qui les emporte » [30].

Miscégénation

C’est l’histoire personnelle de Guillen, l’histoire de l’esclavage à Cuba, l’histoire douce et amère de l’Amérique Latine. Car la femme noire est à l’origine du métissage et a donné naissance à la nouvelle race latino-américaine, c’était son seul moyen de survie. Julio Ribeiro, l’Emile Zola brésilien, montre dans son roman « La chair » que l’intégration à la société brésilienne et l’assimilation à la culture luso-brésilienne passe par ce contact affectif avec la femme de couleur [31]. Nombreux sont les proverbes ou expressions courantes faisant allusion à ce fait historico- biologique qui passa plutôt par la femme ; l’homme, en effet,dut supporter plus que sa compagne et s’unissait parfois avec les Indiennes, créant ainsi le « zambo » [32]. Voila quelques proverbes : « La nécessité fit accoucher de mulâtres » ; « La poule noire pond des oeufs blancs » ; « négrillonne ne joue pas avec le plâtre,le plâtre va te teindre » ; « mon père était Catalan ; ma mère ? Ma mère est morte ! » ; « et ta grand-mère, tu l’oubliais ? » [33]. Certains autres, au contraire, comme le poète « zambo » péruvien Nicomedes Santa Cruz, n’oublient pas leur mère ou grand-mère noire :

« Ma grand-mère est venue

Toute vêtue de cauris

Les Espagnols l’ont amenée

Dans une blanche caravelle » [34].

L’idéal de la beauté féminine au Brésil est la mulâtre, peut-être au détriment de la noire, la femme brune : « a moreninha  ». On trouve ceci surtout dans la littérature dite du « mulatisme » qui correspond à la politique de miscégénation. Celle-ci peut se résumer dans une chanson qui conseillait :

« O négresse

cherche un homme blanc…

Petite blanche

éprends-toi d’amour

pour un noir

fais avec lui ta miscégénation » [35].

Mais alors le complexe racial se fait sentir chez de nombreuses afro-américaines qui, comme les mulâtresses de « Nini » d’Abdoulaye Sadji, se fardent, se teignent et se décrêpent pour se « blanchir ». Une « copla » colombienne nous apprend malicieusement que :

« Faisant de la patinette

une blondinette a chu

et c’est alors qu’on a vu

que la blonde était brunette » [36].

Une savoureuse chanson du carnaval brésilien de 1932 supplie :

« Ne renie pas tes cheveux

ô mulâtresse

puisque tu es mulâtresse de

couleur.

Mais comme la couleur ne se

donne pas

ô mulâtresse,

mulâtresse, donne-moi ton coeur  » [37].

On peut déjà conclure de tout ce qu’il en ressort pour la femme noire ou mulâtre une destinée sexuelle et physiologique inéluctable. Et, pourrait on croire le rôle de cette femme, d’après la littérature, ne fut qu’un rôle passif dans la vie latino-américaine : bel objet, ou « instrument de plaisir » durant des siècles comme l’a dit Bernardo Arias Trujillo dans « Risaralda » déjà cité ; ou bien creuset indispensable pour la survie d’une race – la noire – et d’un continent – le continent métis – en ayant parfois l’initiative. Cependant, ne trouve-t-on pas dans cette littérature une autre image : celle d’une femme plus intégrée dans la vie active de son pays et qui refléterait davantage sa place réelle dans la culture ou la société de son continent. Oui ; mais ce n’est pas dans la littérature la plus internationalement répandue que l’on découvrira l’importance socio-culturelle de la femme noire. Son rôle évidemment se fait sentir en premier lieu dans le cercle familial. Elle n’est plus alors la douce ou sensuelle inspiratrice, elle est, soit la fille, l’épouse, la mère ou même le « chef de famille ».

Là encore la littérature montre maintes fois une femme soumise à la loi créée par l’homme. Le Colombien Francisco Socarras dans « Viento del Tropico », un recueil de contes, décrit une jeune fille, Sole, qui aime Miguel, jeune homme de son village, mais elle ne pourra l’épouser car il est pauvre et son père, selon une tradition ancestrale la donnera pour de l’argent à un riche de la ville [38]. Un conte mythologique afro-cubain, d’origine yoruba, intitulé « Oba » montre cette femme, épouse fidèle, modèle de la vertu féminine : pour satisfaire les désirs de son mari, affamé, elle coupera ses propres oreilles et les lui offrira en repas. Mais ayant cesse d’être belle, l’homme l’abandonnera, et alors Oba pleurant de désespoir sera convertie «  en un fleuve… où demeure cachée la légende de la femme qui sacrifia sa beauté sur l’autel de son devoir » [39]. Un autre conte des noirs du Choco nous apprend l’aventure d’une femme pauvre mariée à un roi qui lui a fait jurer lors du banquet de noce obéissance absolue et aveugle, ainsi que bonne humeur constante. Durant une dizaine d’années, l’homme lui fera subir une longue suite de macabres épreuves : l’épouse devra accommoder divers plats ou ragoûts avec leurs propres enfants ; le roi tentera même un simulacre de divorce pour la tester jusqu’au bout. Tout sera accepté par la femme le sourire aux lèvres et tout, car c’est un conte, finira bien [40]. Mais moralité de ces récits : femmes, obéissez sans discuter ; l’homme a toujours raison. Mais reconnaissons que de nombreuses et honnêtes épouses se seraient rebellées bien avant ! Moins sûres d’elles, mais pas plus fautives.

Les traditionnels défauts féminins, universellement critiqués par le sexe opposé se retrouvent dans la littérature afro-latino-américaine ; les proverbes des vieux noirs de Cuba, recueillis par Lydia Cabrera, nous en fournissent quelques échantillons. L’infidélité féminine, mais jamais la masculine, y est souvent flétrie : « Celui qui épouse une jolie femme, épouse un cauchemar ». « Quand ta femme te dit qu’elle va voir sa compagne, vérifie bien où elle va ». « Morte dans la maison du mari, vivante et frétillante dans la maison de l’amant ». Le bavardage féminin n’est pas oublié : « Le secret que l’on peut dire à une femme est tout de suite connu du diable (Kadiempemba) ». La prétendue étroitesse d’esprit de la femme est évoquée dans un conte du Choco où l’on voit une femme pour qui « comme pour toutes les épouses, le mari était un fainéant » [41].

 

Une société matri-focale

Mais en règle générale, cette littérature n’est pas anti-féministe, et même il faut bien reconnaître que chez certains auteurs, comme Manuel Zapata Olivella, les personnages féminins tiennent dans leurs romans une place plus importante que les masculins. C’est que fort souvent, la société afro-américaine fut, disons schématiquement, matri-focale. De par le taux très peu élevé de mariages légaux -ce qui laisse une plus grande liberté à la femme et lui donne à elle toute seule le rôle d’éducateur – de par les fonctions sociales trop longtemps dégradantes qui furent celles de l’homme noir en Amérique, la femme, la mère, devint le véritable chef de famille, et le reste même encore aujourd’hui. La mère éduque son enfant par son amour et son enseignement. Un des premiers poètes noirs d’Amérique, le Colombien Candelario Obeso, a écrit au milieu du XIXe siècle deux poèmes célèbres : « A ma mère » et « L’obéissance filiale » [42]. Le désespoir de la femme noire est bien rendu dans la poésie d’Eloy Blanco, Vénézuélien, « Pintame angelitos negros » : « Mon négrillon vient de mourir, Dieu l’a voulu ainsi… », mais les anges du paradis ne sont pas noirs, dit-on. Dans un de ses contes, Francisco Socarras décrit les souffrances d’une autre mère noire qui assiste au combat aquatique de son fils contre un caïman : « Mais comment se résigner ? Coeur de mère ? Intuition maternelle ? Non, égoïsme maternel. Elle était la seule coupable. Ses entrailles se tordaient, la tête lui tournait… Dorénavant qui pourrait la consoler ? Non pas ça ! » [43]. Cette scène tragique n’est pas sans rappeler un des proverbes des vieux noirs de Cuba, profondément humain : « La noire met au monde des noirs ; la blanche met au monde des blancs, et les deux sont mères  » [44]. L’égalité de la femme dans la maternité : peu de phrases, à mon sens, résument d’aussi belle façon l’égalité des races.

L’enseignement que dispense la femme noire ou mulâtre à ses enfants prend racine loin dans le passé. Vivant fort souvent à l’écart de la société latino-américaine, parfois même en culture fermée ou « en conserve », selon le mot de Roger Bastide, la famille noire prendra ce qui lui est imposé par les hommes ou les situations : la langue, la religion, les instruments de musique, etc. mais adaptera tout cela à sa propre culture d’origine. Et là le rôle de la femme dans la transmission de la « mémoire ancestrale » fut primordial et se reflète largement dans la littérature. Il est facile d’avancer que par la femme le folklore afro-américain, avec ses danses en particulier, a obtenu ses titres littéraires. Il serait long d’énumérer toutes les oeuvres qui décrivent les danseuses de « rumba » (« rumberas »), ou de « cumbia » (« cumbiamberas ») ou de « son » comme la célèbre Ma Teodoro qui dansa le premier « son » (anonyme du XVIe siècle) de la littérature afro-américaine. Romula Gallegos, le romancier président vénézuélien, montre bien dans « Pobre negro » cette chaîne Afrique – femme – Amérique. C’est la Saint Jean à Barlovento, hommes et femmes dansent. Les hommes ont comme gris-gris « un morceau de leur propre cordon ombilical desséché pour que, demeurant ainsi toujours unis, la mère vivante ou morte les protège contre tous maux et dangers  ». Un peu avant, il avait dit : « C’est un cri de l’Afrique énigmatique ». La danse consiste en un duo ; la femme, symbole d’une réalité oubliée ou revanche du quotidien, doit faire tomber l’homme par un croche-pied, en sautant en arrière : «  Enfin elle a réussi. L’homme tombe à terre. Un cri unanime s’élève. Airo ! Airo ! Et la femme victorieuse s’élance dans une danse de triomphe autour de sa victime écroulée, tandis que le choeur répète : Saint Jean, Saint Jean, Saint Jean  » [45].

La danse, nous venons de le voir, est par moment un mélange de païen et de sacré. Un autre exemple plus caractéristique est donné par le Cubain J.Z. Tallet dans sa fameuse poésie « Rumba ». Après une danse frénétique, la négresse Tomasa entre en transe :

«  Le bongo se déchire en devenant fou ;

Le change descend dans la noire Tomasa

Pitiquiti pan, pitiquiti pan.

La négresse Tomasa roule à terre…

Le saint descend dans la noire

Tomasa, le bongo s’est déchiré,

La rumba est finie » [46].

Le bongo est un tambour des noirs d’Amérique et Ghango est le Dieu yoruba assimilé dans les religions afro-américaines à Saint Jean Baptiste ou Sainte Barbe. Il est intéressant de noter que la personne qui généralement sert d’intermédiaire entre les dieux du panthéon yoruba, qui par suite du syncrétisme avec le catholicisme ont été assimilés aux saints catholiques et les fidèles qui parfois sont des blancs est une femme ; au Brésil, la « valorisa » ou mère de saint. On retrouve cela jusque dans un pays où les religions afro-américaines ne sont presque plus pratiquées : en Colombie, par exemple, à travers le roman de Manuel Zapata Olivella « Un saint naît à Chima » [47]. L’auteur dépeint une révolte de caractère messianique, et les plus acharnées à prôner l’hérésie, ou plutôt à réclamer leur authenticité religieuse, sont les femmes, plus particulièrement la mère et les deux soeurs du « saint » de Chima.

Dans un autre domaine, toujours relié à la religion et aussi aux chants, la place de la femme est prépondérante : les veillées funèbres. Les rites funéraires des noirs en Amérique Latine durent plusieurs jours, voire plusieurs semaines. Les femmes presses à la première seconde de la vie viennent cette fois pour l’ultime adieu : de nombreux chants traditionnels ont été recueillis. Le Colombien Jorge Artel dans « Veillée du rameur adolescent » rapporte :

«  Les femmes le pleuraient dans la cour

parfumant le café de leur tristesse  » [48].

Il ne sera pas étonnant après cela de retrouver la femme dans le monde magique de l’afro – latino – américain. Manuel Zapata Olivella dans le conte « Ma tante Montana vient rechercher ses pas » [49] relate l’aventure d’un enfant noir – était-ce lui ? – qui perd sa tante, pleureuse professionnelle (les femmes l’étaient de mère en fille dans cette famille). Le jour de l’enterrement, l’enfant s’attend à revoir l’esprit de l’être cher disparu hanter la maison et vaquer à ses occupations quotidiennes. Superstition que le père, unique homme adulte qui apparaît dans le conte, esprit fort et libre penseur, ne partage pas. Ainsi, comment nier que la femme noire est indissociabledediversaspectsde la vie culturelle d’Amérique ; ce tour d’horizon serait presque complet si on mentionnait l’importance des berceuses, « nanas », chansons par lesquelles la mère endormait l’enfant mats aussi lui apprenait à parler dans la langue étrangère, remodelée par ses lèvres [50].

Il n’en reste pas moins que le rôle prépondérant de la femme noire ou mulâtre dans la vie réelle ou à travers la littérature est, en Amérique latine, un rôle social actif. Certes les métiers pour lesquelles elle fut amenée, ou qu’elle va exercer par la suite, vont la situer dans la classe sociale la plus basse ; mais cela semble changer et les femmes actuellement ne sont pas les dernières à réclamer des améliorations sociales et à revendiquer les droits de leurs sexe, classe et race.

La femme pratique avec art le traditionnel métier de cuisinière. Nicolas Guillen chante sa négrillonne qui :

« Lave, repasse, coud

et surtout, mon gars, comme elle cuisine ! » [51].

Une chanson brésilienne recommande à qui est amateur de bons mets :

« Qui veut faire un vatapa, oh !

qu’il essaye de le faire :

d’abord du fuba

puis de l’huile de palme,

qu’il cherche une négresse

de Bahia

qui sache mijoter tout cela » [52].

« Vatapa » est un plat à base de gingembre et « fuba » de la farine de riz. Et quand on parle de rôle actif on ne peut oublier que les noirs furent en Amérique durant plusieurs siècles la main d’oeuvre servile. Une des plus célèbres chansons afro – américaines « Duerme, duerme negrito » fait revivre l’histoire du petit noir qui doit dormir vite s’il ne veut pas être emporté par le grand méchant maître blanc, et dont la mère travaille aux champs. En effet, le travail féminin était aussi un travail champêtre, en plus de domestique ; les hommes s’occupant des grandes exploitations de sucre, de café ou de tabac, et du travail minier. Toutes ces modalités de vie des négresses esclaves sont évoquées dans les fort connus « Drames de Bumba-mon boeuf » qui forment un des cycles les plus importants de la littérature orale brésilienne. Mats aussi, aux temps de l’esclavage, certains auteurs valorisant le martyre moral et physique de la femme esclave, combattront l’institution ; c’est le cas des Brésiliens José de Alencar ou Bernardo Guimaraes [53]. Un court poème du Cubain blanc Diego Vicente Tejera, publié en 1876, résume bien le contenu psychosocial de cette littérature :

« Dieu, que la maîtresse est

blanche !

Dieu, que sa pauvre esclave est

noire !

Mais si les couleurs des âmes

montaient à leurs figures,

Dieu, que la noire serait

blanche !

Dieu, que la blanche serait

noire  ! » [54].

De nos jours, si l’esclavage a disparu, la situation sociale de la femme noire ou mulâtre n’a que faiblement évolué. Le Cubain E. Balalgas dans « Elégie pour Maria Belén Chacon » rappelle que :

«  Le fer à repasser dès le petit matin voilà ce qui te brûla le poumon.

Maria Belén Chacon, Maria

Belén Chacon.

Et ensuite, toute la matinée avec le linge, dans la corbeille,

Voilà comment sont partis tes grâces

tes grâces et ton poumon  » [55].

L’éternel métier féminin

Cette misère et l’abandon poussent les femmes à la prostitution. Les plus misérables des quartiers noirs de Carthagène, port de Colombie, sont forcées par vice ou par ignorance, mais surtout par un contexte social qui ne leur offre aucune autre issue, à pratiquer ce que Lydia Cabrera dans un de ses contes cubains appelle « l’éternel Endumba Picanana », c’est-à-dire l’éternel métier féminin [56]. On trouve cette situation en particulier dans certains contes du Colombien Arnoldo Palados, ou dans des romans de Manuel Zapata Olivella. Voila comment cet auteur décrit ces épaves de Chambacu : « Il aimait les négresses. Les deux Rudesindas avec leur odeur de fumier mouillé » [57]. Mais sont-ce vraiment là des femmes ? Comment lutter contre cet avilissement des personnes ? L’analphabétisme, grand responsable de tous ces maux aux yeux de nombreux écrivains latino-américains, atteint plus particulièrement les femmes, et les femmes noires : au Brésil, 15,73% de femmes noires sont alphabétisées pour 21,72 % d’hommes noirs ; 22,81% de métisses pour 30,35% de métis ; 45,30% de blanches pour 53,81% de blancs. Comme conclut Roger Bastide : « Le groupe féminin de couleur est doublement marginalisé et par rapport au groupe masculin, et par rapport aux autres groupes féminins… Cette marginalisation est inscrite dans la dynamique des relations interraciales » [58] .Certaines femmes noires, ankylosées dans leurs traditions pensent que le développement ne passe pas par le livre. Comme par exemple La Cotena, mère de l’idéaliste mais aussi actif « défenseur des pauvres » qu’est Maximo héros du roman « Chambacu » de Manuel Zapata Olivella, encore lui. Au début de l’ouvrage, La Cotona brûle toute la bibliothèque de son fils, pour ne plus avoir d’ennuis avec la police, devant les yeux des « analphabètes qui voyaient tout juste brûler du papier gribouillé  ». On croirait retrouver le curé du roman de Cervantès envoyant au bûcher les livres de chevalerie de la bibliothèque de Don Quichotte. Mais les ennemis qu’ont à affronter au XXe siècle les hommes et femmes de Chambacu, le quartier noir de Carthagène, ne sont pas des moulins à vent. Et Maximo n’est pas tout seul ; il est fortement secondé par Domitila, l’institutrice volontaire, fille d’un des premiers habitants libres du quartier. Elle a compris que les enfants devaient apprendre et que les adultes devaient s’unir : premiers pas pour sortir de leur condition misérable [59].

Selon une enquête du journaliste noir nord-américain Charles Howard, l’idéal de la femme cubaine, après la révolution castriste de fin 1958, était la noire Mariana Grajales (louée par Alfonso Camin dans son « Eloge de la femme noire »), mère des deux frères Maceo qui luttèrent et périrent durant la guerre d’indépendance contre l’Espagne à la fin du XIXe siècle [60]. Mais le symbole littéraire le plus marquant de cette femme noire ou mulâtre socialement et politiquement engagée est sans conteste la Colombienne Irène Zapata Arias, la première poétesse que nous citons, qui a écrit en particulier l’émouvant poème : « Nègre, ne meurs pas en pleine rue » [61].

Cette étude ne voulait et ne pouvait – en l’état actuel des travaux sur la littérature afro-latino-américaine – être exhaustive. Des bases ont été jetées : cette littérature d’Amérique dite latine, depuis les proverbes anonymes jusqu’aux vers les plus célèbres, de la chanson du XVIe au roman du XXe nous a montré que la femme d’origine africaine se heurte à un triple préjugé : de sexe, de race et de classe. D’autre part, parfois, cette littérature ne reflète pas la réalité du moment. Les romantiques ne pouvaient aborder dans sa tragique cruauté le problème de l’esclavage ; les négristes, à l’exception des derniers vers de Nicolas Guillen ou de quelques autres auteurs plus tardifs, se laissèrent emporter par l’envoûtement du rythme et par l’attrait des formes. Néanmoins de cet ensemble se dégage déjà une vision précise, avec des aspects positifs et d’autres négatifs.

Les négatifs proviennent du « machismo », des complexes raciaux, de l’écrasement social du hier à l’esclavage et aujourd’hui à la misère et à l’ignorance dans lesquelles vit la femme afro-latino-américaine.

Les aspects positifs peuvent se déduire si on examine en pareils lieux et pareille époque la place de la femme blanche, ou indienne. La femme d’origine espagnole a longtemps étouffé dans les carcans coloniaux ; la noire bénéficiait d’une assez grande liberté au sein de leur société ; elle a contribué à créer une nouvelle race tout en sauvegardant les principales valeurs culturelles de sa race d’origine. Peut-on avancer alors qu’elle a joué un rôle non négligeable dans la libération de la femme latino-américaine ? Il serait prématuré de répondre avant d’avoir entrepris une étude plus approfondie ; mais on peut constater que le processus amorcé depuis longtemps par quelques héroïnes d’exception tend à se développer. Par exemple au Colloque de Janvier 1974, à Dakar, « Amérique latine et négritude » deux femmes d’origine africaine furent invitées ; mais une, la Panaméenne Edilia Camargo Villarreal, arriva en retard, et l’autre, la Péruvienne Mile V. Santa Cruz, n’intervint jamais dans les débats. Hasard ou progrès lents ? Car cette littérature fut trop souvent l’oeuvre d’hommes qui parlent de la femme, généralement, d’une façon déformante et ne peuvent en donner qu’une image extérieure. Et surtout cette littérature reste méconnue, aussi bien en Amérique qu’ailleurs ; ces oeuvres que nous venons de survoler pêchent-elles par manque de qualité ? Elles ne sont pas plus mauvaises que d’autres. En fait, elles se heurtent à des problèmes de diffusion ; et là encore, la femme afro-américaine aurait, si on lui en donnait la possibilité ou si on ’y aidait -et sans pour cela oublier sa culture orale – une carte importante à jouer. Mais beaucoup reste encore à faire.

 

 

[1] Rogerio Velasquez, « Cuentos de la raza negra » in « Revista colombiana de folclore », n° 3, 2a épo. 1959, p. 22.

 

[2] Bernardo Arias Trujillo, « Risaralda », Ed. Academicas, Medellin 1960 pp. 19.

 

[3] Luis de Gongora, O.C., ed. Aguilar, Madrid 1967, p. 342. Zambambu est un instrument de musique d’origine africaine qui a donné l’actuelle « zambomba », utilisée les jours de Noël dans les villancicos.

 

[4] Baudelaire, « Les fleurs du mal », éd. A. Adam, Classiques Garnier, Paris 1961, p. 308, n. XXVI ; p. 306 n. 4 ; p. 30 v. 21 ; p. 32 v. 4 ; p. 33 XXVIII.

 

[5] Mathilde Pomes, « Anthologie de la poésie espagnole », ed. Stock, Paris 1957, p. 106.

 

[6] G. R. Coulthard, « Raza y color en la literatura antillana », ed. Escuela de Estudios Hispano-Americanos de Sevilla n° CXVI, Sevilla 1958, p. 106.

 

[7] Rogerio Velasquez, « Cantares de los tres rios » in « Rev. col. de fol. » vol. II, n° 5, 2a epo. 1960, p. 14 copla 19.

 

[8] Michel Simon in « La femme de couleur en Amérique latine » dir. R. Bastide. éd. Anthroos Paris 1974.p99.

 

[9] Roger Bastide, « A poesia afro-brasileira », Livraria Martins, Sao Paolo 1943, p. 92.

 

[10] Coulthard, o.c., p. 109.

 

[11] Alfonso Camin in « Literatura afrohispano-americana. Posia y prosa de ficcion » éd. de Enrique Noble, Xerox, Massachusetts 1973, p. 91.

 

[12] Fernando Ortiz, « Màs acerca de la poesia mulata » in « Revista Bimestre cubana » XXXVII, 2, 1936, p. 226.

 

[13] in Hortensia Ruiz del Viso Passia negra del caribe votras areas ». (p. 72).

 

[14] in E. Noble, p. 76 et p. 81.

 

[15] in E. Noble, p. 90.

 

[16] Michel Simon in o.c., p. 100.

 

[17] Emilio Ballagas, « Obra poetica », ed. Mnemosyne, Miami 1969, p .67.

 

[18] in Coulthard, o.c., p. 59.

 

[19] in E. Noble, o.c., p. 116.

 

[20] Rogerio Velasquez, « Cantares de los tres rios » in o.c., pp. 42, 43.

 

[21] Jorge Isaacs, « Maria », ed. lextos hispanicos modernos ; Labor n° 10, Barcelona 1970, p. 326.

 

[22] R. Velasquez in o.c.,p. 14, copla 11.

 

[23] Pour plus de détails sur le taux de fertilité des noires et mentisses, ct. K. Bastide in « La femme de couleur en Amérique Latine », p. 70, qui parle de « prolificité relativement élevée des noires

 

[24] R. Velasquez, in o.c., p. 41.

 

[25] in E. Noble, p. 97.

 

[26] Lydia Cabrera, « Por qué ? », ed. Coleccion del Chicheruku en el exilio. Madrid – Miami 1972, p. 44 et sg.

 

[27] in E. Noble, o.c., p. 151 et 147.

 

[28] in « Lira negra » ed. de T. Sanz y Diaz, Crisol n° 21, Aguilar, Madrid 1962. p. III.

 

[29] in « Poesia negra del Caribe y otras Areas » éd. de Hortensia Ruiz del Vizo, Ediciones Universal, Miami 1972, p. 110.

 

[30] Noël Salomon, « A propos de El son entero », in « Cuba si » n° 12, 1er tri. 65, p.8a.

 

[31] R. Bastide, in « La femme de couleur » o.c., p. 22.

 

[32] Magnus Mörner, « Le métissage dans l’histoire de l’Amérique Latine », éd. Fayard, Paris 1971, p. 44.

 

[33] Lydia Cabrera, « Refranes de negros viejos », Coleccion del Chicheruku, Miami 1970.

– Dario Espina Perez, « Diccionario de cubanismos », Ediciones Universal Madrid-Miami 1972, p. 1.

 

[34] in E. Noble, o.c., p. 36.

 

[35] M. Simon, in o.c., p. III.

 

[36] in « Europe » n° 423/424, Juillet-Aout 1964, p.109.

 

[37] M. Simon, in o.c., p. 107.

 

[38] José Francisco Socarras, « Viento de Tropico. Cuentos », ed. Zulia, Bogota 1961, « Nudo de tradicion ».

 

[39] in E. Noble, o.c., p. 141 et sg.

 

[40] R. Velasquez, « Cuentos de la raza negra » in o.c., p. 57.

 

[41] R. Velasquez, « Leyendas del alto y Bajo Choco », in R.C. d. F. vol. II, n° 4, 2a ép. 1960, p. 100.

 

[42] in « Antologia de poetas cartageneros » pp. 128,131.

 

[43] in « Europe », o.c., p. 124.

 

[44] Lydia Cabrera in « Refranes ».

 

[45] Romulo Gallegos, « Pobre negro », ed. Austral n° 307, Buenos Aires 1970, p. 9 et sg.

 

[46] in E. Noble, o.c., p. 29.

 

[47] Manuel Zapata Olivella, « En Chimà nace un santo », ed. Seix Barral, Barcelona 1963.

 

[48] in « Antologia de poetas cartageneros », p. 91.

 

[49] Manuel Zapata Olivella, « Mi tia Montana recoge sus pasos », in « El Espectador ». Edicion Dominical, Domingo, Abril 29 de 1962, pàg. 4-F.

 

[50] E. Ballagas, o.c., p. 72.

 

[51] in « Lira negra », o.c., p. 103.

 

[52] M. Simon, in o.c., p. 107.

 

[53] Adonias Filho, « Le nègre dans la littérature brésilienne » in « La contribution de l’Afrique à la civilisation brésilienne », éd. Ministère des Relations Extérieures des Etats-Unis du Brésil, s.d., p. 53.

 

[54] in E. Noble, o.c., p. 104.

 

[55] E. Ballagas, o.c., p. 61.

 

[56] Lydia Cabrera, « Cuentos negros de Cuba », Coleccion del Chicheruku en el exilio, Madrid- Miami 1972, p. 114.

 

[57] M. Zapata Olivella, « Chambacu, Corral de negros », Ed. Bedout Bolsilibros n° 22, Medellin la ed. s.d., p. 124.

 

[58] R. Bastide, in « La femme de couleur », o.c., p. 62.

 

[59] M. Zapata Olivella », « Chambacu… », o.c., pp. 93, 94.

 

[60] Jean P. Vilar, « Nicolas Guillen, journaliste de couleur », in « Cuba si », o.c. p. 15 a.

 

[61] in « Black poetry of the Americas (A biligual Anthology) » ed. de H. Ruiz delVizo, Ediciones Universales, Miami 1972, p. 106