Hommage à Cheikh Anta Diop

HOMMAGE A CHEIKH ANTA DIOP

Ethiopiques numéros 44-45

Revue trimestrielle

de culture négro-africaine

nouvelle série

– 2ème trimestre 1987

– volume IV, N°1.2

« … pour rythmer ton nom grand sur les eaux

sur les fleuves sur toute la mémoire Que j’émeuve la voix des kôras Kouyaté !

L’encre du scribe est sans mémoire ». (L.S.Senghor)

Un commentaire sur les fondements des mathématiques d’après l’introduction de Cheikh Anta Diop

(suite de la première partie)

RESUME : Nous examinerons dans ces derniers chapitres l’origine de quelques antinomies et le statut de l’axiome de compréhension.

ABSTRACT : In these last chapters we investigate the origin of some antinomies and the state of the axiom of comprehension.

PROLEGOMENES

Ces chapitres font suite à un texte contenant cinq chapitres A, B, C, D, et E(E1) qui paraît aux éditions Présence Africaine [1].

Dans ce premier travail, nous avons commenté les balbutiements de la théorie des ensembles tant au niveau de certains axiomes, qu’au niveau du langage. La crise qui s’en était suivie à l’instar des paradoxes fit, l’échec du programme de Hilbert. Ce dernier voulut démontrer la cohérence des mathématiques sans l’aide de l’infini. Le théorème d’incomplétude de Gödel qui déclencha cette seconde crise fit une découverte savante. Il consolida le statut mathématique de la logique. Selon Cheikh Anta Diop, 1982, (p.190), les résultats de ce théorème firent équivalents à ceux qu’obtint Heisenberg en Physique Quantique à travers les relations d’incertitude.

On reste c écrasé », si lisant le tableau synoptique de la logique classique présenté en appendice on est bourbakiste inconditionnel, de l’évolution considérable de cette science.

Deux grandes idées se mêlent :

. L’idée de Frege et de Russell selon laquelle la logique sert de fondement aux mathématiques. Cette idée fit contestée à la fois par les intuitionnistes et les formalistes dans sa forme et non dans le fond. Largeault, 1972 (p. 139), Epistémologicien en Sorbonne, est ému du silence conspiré contre le Norvégien A. Thoralf Skolem (1887-1963) par la communauté mathématique. Skolem apporta une contribution non des moindres à l’axiomatisation de la théorie des ensembles. Il fit le premier à découvrir les modèles non standard en arithmétique, dont Abraham Robinson fit une extension remarquable en calcul infinitésimal. Il eût été légitime en effet, que l’on rajouta à l’initiale Z.F. (Zermelo-Fraenkel) le symbole S, mis pour Skolem. Thoralf Skolem obtint le grade de Docteur en philosophie. Ce qui est relégué en France, le néopositivisme aidant, dans la catégorie ès-lettres.

Les mathématiciens ont toujours combattu à cor et cri, l’idée que d’autres sciences leur servent de fondations. Les travaux d’un philosophe n’ont d’intérêt que pour la théorie générale de la connaissance.

. L’autre aspect représenté par l’Anglais Georges Boole (1815-1864) – autodidacte en mathématiques (les algèbres qui portent son nom, sont la base même de l’électronique l’Américain Charles Peirce (1839-1914) et l’Allemand Schroeder (1841-1902) : la logique fit développée par des méthodes algèbres. Cette méthode qui facilite l’économie de la pensée, évite la redondance dans le sens leibnizien que voici :

« Ce qu’il faut, quand on raisonne, c’est avoir sous les yeux quelque chose qui concrétise la pensée, qui la stabilise, qui la peigne. L’algèbre est, à cet égard, un instrument de premier ordre » [2].

Dans ces deux aspects, la logique pure essaie de réécrire dans des structures plus stables et plus générales certaines branches isomorphes des mathématiques.

INTRODUCTION

Cheikh Anta Diop n’a pas eu tort de suspecter « la notion naïve et contradictoire, actuelle de l’infini… Elle est impliquée directement ou indirectement dans la quasi-totalité des paradoxes mathématiques » [3]. Un traitement historique et détaillé des antinomies existe dans E.V. Beth, 1955 (p. 175-198).

Mais pour comprendre l’origine des antinomies, il faut d’abord connaître les notions de relation, de classe et d’ensemble au sens de von Neumann-Bernays-Gödel dans la théorie des classes. Si dans cette théorie Mostowski, 1978 (p.23) fait remarquer que la classe, la relation et l’ensemble sont des données primitives, cela ne nous aide pas à saisir la nuance existant entre une classe et un ensemble ; le système de Frege exposé dans Grundlagen der Arithmetik dès 1884 nous paraît le mieux approprié [4].

L’axiome de compréhension exprimé primitivement en 1908 par Zermelo, conduisit à des paradoxes. La modification qu’il en fit donna l’axiome de séparation.

Nous montrons comment, partant de cet axiome Fraenkel et Skolem, indépendamment l’un de l’autre, construisirent le schéma d’axiome de substitution ou de remplacement.

E2 – Relation – Classe – Ensemble en partant du langage de Frege

E2-1 – Tableau comparatif des divers systèmes qui sous­tendent les mathématiques classiques.

Chez Frege, l’énoncé des données primitives est hiérarchisé, comme dans la théorie des types. En premier lieu, il y a des objets, puis des concepts enfin des extensions de concepts.

Au lieu de définir d’emblée chaque primitive, nous procédons d’abord par situer leur position dans le tableau ci-dessous.

(i2) Définition de la classe A (X)

Une classe est un rapport, mieux une relation binaire (au sens intuitif) entre un individu x et une relation monaire A.

C’est une situation pendant laquelle, l’individu x satisfait la relation monaire A. Cette situation est donc vraie : A est un « modèle » de x. Tel est le sens précis de l’expression frégéenne : « x tombe sous le concept A ».

Remarque : L’idée qu’une classe soit une relation fonde la théorie des classes NBG.

« Classes represent at the same time relations between sets, namely a class A represents the relation which subsits x and y if the ordered pair « xy »… is an element of A  » (Gödel, 1940, page 2, introduction).

D’où l’axiome de la є – relation du groupe B1 :

ƎA (x, y) [ A= x y]

(Gödel, 1940, p.5).

L’imbroglio réside au fait qu’on ne sait pas exactement si c’est la classe et l’ensemble qui précèdent la relation ou l’inverse.

De plus la définition d’une paire ordonnée < x y > présuppose l’existence d’un ensemble à deux éléments muni d’une relation d’ordre. En fait d’imbroglio, il y a lieu de parler de cercle vicieux.

(i4) L’interprétation que Mostowski, 1978 (p. 23) donne à la définition d’une classe est une transition satis­faisante entre le système de Frege et celui de NBG :

« Ils [5] employèrent des fonctions propositionnelles (c’est-à-dire des fonctions à deux valeurs : « le vrai » et « le faux » ) qu’il est d’usage d’appeler plutôt « classes ».

L’introduction des valeurs de vérité n’a de sens que si on adopte la démarche logique de Frege. Notre tableau qui s’en inspire, montre comment la notion de classe se déduit de celle de prédicat.

(i4) Définition d’un ensemble

Une classe A (x) devient un ensemble, si l’on fait l’inventaire, l’énumération de tous les :

– individus qui satisfont la relation monaire A

– objets qui tombent sous le concept A.

( i 4-1) Ensemble vide

La définition que les Rubin, 1963 (p. XVII) donnent à l’individu est très proche de l’axiome de définition de l’ensemble vide (voir Pabion, 1976 (chapitre V – la théorie des défini­tions) ) ;

« If x is an individual then (y) [non (y x) (An individual does not contain any elements) ».

On peut remarquer le caractère imprédicatif (voir chapitre E3) d’une telle définition. Zermelo parle d’élément primitif. Selon Beth, 1955 (p. 142) qui interprète Zermelo,

« un tel éliment primitif ne contient aucun éliment sans toutefois s’identifier à l’ensemble vide ».

Dans notre tableau comparatif, la définition d’un ensemble vide qui en découle est la suivante :

Un prédicat unaire est un ensemble vide si aucun objet ne tombe sous sa domination.

En prenant P(x) Ξ x ± x (l’élément x satisfait le concept P « non identique à soi-même ») nous avons une autre définitionde l’ensemble vide :

Ø = x/x ± x

Or cette définition est celle que Frege utilise pour définir le nombre 0 :

« 0 est le nombre qui appartient au concept (non identique à soi-même ». (Pieters, 1981, p. 30).

(i+2) Autre définition d’un ensemble

Extension du concept C : extension des objets auxquels s’appliquent ce concept C.

k est un objet de l’extension C(x).

On est plus armé de comprendre l’ordre d’énonciation des axiomes de la théorie des classes NBG et l’axiome central suivant ;

Groupe A :

1 – Cl(x) : chaque ensemble est une classe.

Sens méta-frégéen : Chaque ensemble tombe sous le concept « est une classe ». Si l’on examine l’extension (au sens intuitif) du concept

« est une classe »,

on trouve des objets qui ne sont pas des ensembles : ce sont les classes propres. En voici quelques-unes.

– Classe de tous les ensembles :

Univers V de Quine.

soit R le concept « identique à soi-même »,

soit x un objet tombant sous R, R(x),

l’extension du concept R n’est autre que V et se définit par :

V = x/x = x .

– Classe de tous les ordinaux, ON.

– Classe de tous les cardinaux, Cn.

– Classe d’équivalence.

Exercice n° 1 :

Démontrer que la classe d’équiva­lence n’est pas un ensemble.

E3 – Totalité – Impédicativité

– Paradoxes

E3-1 – L’axiome de compréhension et l’antinomie de Russell

L’un des paradoxes le plus connu, le paradoxe de Russell, illustre bien l’existence des classes qui ne sont pas des ensembles. Prenons le « principe de compréhension » :

(I) ƎE∀A (AE⇦⇨F(A)),

Il existe un ensemble, soit B, dont les éléments sont exactement tous les éléments A de E pour lesquels F(A) est vraie. Pour contredire ce principe, prenons

F(A) = non (AƐA),

la propriété définissant cet ensemble B ; l’énoncé (I) devient :

(II) ƎE ∀ A (A Ɛ E ⇦⇨ non (A Ɛ A) ).

En remplaçant dans (II) E (qui existe de droit) par un ensemble qui existe de fait ; soit X, nous obtenons :

(III) ∀ A (A Ɛ X ⇦⇨ non (A Ɛ A) ).

C’est ici qu’intervient l’astuce de la contradiction. Le fait de poser le quantificateur universel ∀ devant A, on délimite son champ d’action et, un autre ensemble comme X peut aussi tomber sous son contrôle. Il nous est par conséquent indifférent de substituer X pour A dans (III).

Ce qui donne :

(IV) X Ɛ X ⇦⇨ non (A Ɛ A).

D’où le paradoxe de Russell, en vertu du principe de la non contradiction qui n’admet pas qu’une proposition soit équivalente à sa négation. L’hypothèse qu’il existe un ensemble défini par la ropriété non (A Ɛ A) conduit à une contradiction [6].

On dit que l’on est en présence une définition non prédicative, c’est-à­-dire : l’objet à définir, ici E remplacé par X est utilisé dans la définition de la propriété F (qui en principe doit définir E) « en tant qu’élément possible du domaine de variation d’un quantificateur universel » : (Heinzmann, 1985, p. 38).

(V) Ǝ E ∀ A (A Ɛ E ⇦⇨ F(A) ).

Totalité universelle

infini actuel

Selon Poincaré : « C’est à la croyance à l’existence de l’infini actuel qui a donné naissance à ces définitions non prédicatives ». (Heinzmann, 1985, p. 34).

Pour éviter cette antinomie, on procède comme Zermelo par l’axiome de séparation [7].

(VI) V Y E V A (A E ⇦⇨ (A Y et F(A))).

Au lieu de comprimer directement dans l’ensemble B les éléments A de E satisfaisant la propriété F,

B = A ; F(A)

(c.à.d. pour tout A de E, F(A) est vrai).

Cela aboutit à des contradictions [8]. On plonge d’abord ces éléments dans un ensemble Y

A Ɛ Y et F(A).

Pour les identifier des éléments ne satisfaisant pas F, soit

A Ɛ Y et non F(A).

On les sépare (d’où axiome de séparation) et on les stocke ensuite dans E, partie liée de Y : .

E = A Ɛ Y et F(A) .

Si on remplace F(A) dans (VI) par non (X Ɛ X), l’antinomie de Russell disparaît

(VII)non X Ɛ X ⇦⇨ X Ɛ Y et (X Ɛ X).

Cependant le caractère imprédi­catif de l’axiome de séparation n’a pas disparu. E reste un candidat potentiel parmi les valeurs possibles de A dans (VI).

E3-2 – La matrice de l’antinomie

Outre le paradoxe qui porte son nom, Russell dès 1905 rechercha une méthode plus globale d’où jaillirait l’explication de toutes les antinomies : la matrice de l’antinomie (sic). Il généralisa alors l’axiome de compréhension [9].

Etant donné une propriété Ø et fonction f telles que

Si Ø caractérise tous les membres d’un ensemble U

∀ x (x Ɛ U ⇨ Ø (x))

f (U) existe toujours, prend la propriété Ø,

Ø (f(U))

et n’est pas membre de U non (f(U) Ɛ U)

Alors la supposition qu’il y a une classe W de tous les termes ayant la propriété Ø

W ∀ Y (Ø (y) ⇦⇨ y Ɛ W)

conduit à la conclusion que f(W) possède et ne possède pas la propriété Ø.

en abrégé :

∀ U [∀ x (x Ɛ U ⇨ [Ø (f(U)) et non (f(U) Ɛ U) ]] ⇨

⇨ [ W ∀ Y (Ø (y) ⇦⇨ y Ɛ W) ⇨ W [Ø (f(W)) et non (Ø(f(W))]].

Cela est contradictoire !

E3-3 . Paradou de Burali-Forti

Ainsi en prenant Ø(x) pour « x est un ordinal » ou ON(x) et f(U) pour le successeur de U, soit S(U), nous retrouvons le paradoxe de Burali-­Forti relatif à l’ensemble de tous les ordinaux.

U [ x (x U ⇨ ON(x))] ⇨ [ON(S(U)) et non (S(U))] ⇨⇨[ W ∀ y (ON (y) ⇦⇨ y W) ⇨ W [ON(S(W) et non (ON(S(W)))]].

L’ensemble de tous les ordinaux, ici W a un nombre ordinal S(W) supérieur à celui du plus grand nombre ordinal figurant dans l’ensemble de tous les nombres ordinaux. Cela est contradictoire !

 

E3-4 . Paradou de Cantor

Avec la matrice des antinomies, on génère le paradoxe de Cantor relatif à l’ensemble des ensembles.

En prenant Ø(x) = E(x) lire x est un ensemble), l’opération f(x) pour P(x) (ensemble des parties de x), nous avons :

U [∀ x (x U ⇨ E(x) ⇨ [E(P(U)) et non (P(u) U)] ⇨

⇨ [ W ∀ y [E(y) ⇦⇨ y W] ⇨ W [E(P(W)) et non (E(P(W)) ]].

L’ensemble des parties de l’ensemble de tous les ensembles P(W), est un ensemble E(P(W)), donc est contenu dans E.

Exercice n° 2 :

Générer à partir de la matrice de l’antinomie, le paradoxe de Russell.

Mais comment de l’axiome de compréhension l’on est passé au schéma d’axiome de substitution (ou de remplacement) ?

E4 . Le schéma d’axiome de remplacement

E4-1 – Les lacunes dans la théorie des ensembles de Zermelo

Mirimanoff, 1917 (p. 38) savait, à la suite des travaux de Burali-Forti et Russell sur les antinomies que l’existence de certains éléments n’enraîne pas ipso-facto celle de leur ensemble.

Il médita sur les véritables conditions de l’existence d’un ensemble d’individus. Les ensembles qui firent l’objet d’investigation chez Mirimanoff, furent des sous-ensembles dont J. Köning cherchait à construire en vain par diverses associations : à partir seulement de l’intuition d’un ensemble ; des ensembles qui contiennent des éléments simples (noyaux) et/ou des éléments qui sont leur tour des ensembles, soit

E = a, A

a est un élément-noyau ou élément primitif.

A est un élément-ensemble, décomposable à son tour comme E.

Pour mener à bien son travail Mirimanoff fut obligé d’introduire deux notions : celle de descente et celle isomorphie d’ensembles.

La descente est une suite d’éléments-ensembles s’emboîtant les uns dans les autres, qui converge vers des éléments indécomposables appelés noyaux.

Un ensemble construit grâce à une telle descente finie est un ensemble ordinaire. Si la descente est infinie, l’ensemble obtenu est extraordinaire.

Sa notion d’isomorphisme correspond dans le langage moderne à la notion classique d’équipotence utilisée dans la genèse du théorème de Cantor-Berstein (ou théorème d’équivalence). Lequel théorème est très utile pour la construction des ordinaux et des cardinaux.

Or la première version de la théorie des ensembles selon Zermelo publiée en 1908 [10] et Skolem indépendamment l’un de l’autre, donnèrent la précision suivante :

« Une propriété est dite définie pour une théorie donnée, si elle est construite à partir, des relations primitives de cette théorie uniquement au moyen des opérations logiques élémentaires, négation, conjonction, disjonction, et quantification, toutes ces opérations pouvant être combinées et itirées un nombre quelconque fini de fois ». (Largeault, 1972, p. 139). Largeault cite Fraenkel.

Ainsi l’axiome de compréhension devient une formule partant close de la théorie des ensembles (elle-même représentée dans le langage des prédicats du 1er ordre) dont les relations primitives sont x Ɛ y et x = y. (voir Skolem, 1963, p. 162). _Mais « au lieu d’un seul axiome de compréhension, c’est un schéma d’axiome que nous obtenons, dont chaque cas particulier correspond à une formule dans le langage » (Mostowski, 1978, p. 21).

« Chaque schéma étant regardé comme remplissant à lui seul une suite infinie d’axiomes » (Grzegorczyk, 1961, p.62).

Pour remédier aux deux premières lacunes, Fraenkel et Skolem (chacun travaillant pour soi) représentèrent l’axiome de substitution. L’énoncé que nous présentons est une traduction de Drake, 1985, p. 27).

Pour tout ensemble a, et une fonction F, l’image de tous les éléments de a par F est aussi un ensemble.

(i.e. F(y) / y Ɛ a)

En abrégé,

∀ x ∀ y ∀ z (F(x,y) et F (x,z) ⇨ y = z) ⇨

⇨ ∀ a b ∀ z (z b ⇦⇨ u (u a et F(u, z))).

E4-2 – Commentaires sur l’axiome de compréhension

E4-2-1 – Par rapport à la théorie des classes

La première partie de l’axiome

∀ x ∀ y ∀ z (F(x,y) et F(x,z) ⇨ y = z)

donne la définition d’une classe F qui est une opération. Selon Mostowski, 1978 (p.23) qui cite Heijenoort, dans la théorie des classes de von Neumann (sans Bernays – Gödel) la notion primitive fut celle d’opération. Bernays et Gödel donnèrent une version dans laquelle cette notion fut déduite de celle de fonction propositionnelle.

La deuxième partie de l’axiome dit que l’intersection (au sens intuitif) entre une classe F(u, z) et un ensemble a est également un ensemble, soit b.

E4-2-2 – Commentaires généraux

Il faut rappeler ici, que les éléments du langage composant l’axiome de remplacement tels que le prédicat et la fonction furent déjà présents dans la matrice des antinomies de Bertrand Russel.

Que l’on exprime au second ordre [11] l’axiome de substitution :

[∀ X ∀ w [ (∀ x w) ! Y X (x,y) ] ⇨

⇨ z V u [ u z ⇦⇨ t [ t wet X(t,u) ]]],

 

« il y a un ensemble z dont les éléments sont exactement les images par la relation fonctionnelle des éléments de z qui sont dans le domaine de la relation fonctionnelle ». (Gauthiert 1976t p. 32) ; ou au premier ordre à la manière de Draket cet axiome garde son intuition de départ. Il n’affirme pas l’existence d’un ensemble précis mais plutôt la « possibilité de » fabriquer (sélectionner) dans un ensemble donné des sous-ensembles à l’aide d’une propriété définie logiquement et axiomatiquement.

C’est Bernays et Fraenkelt 1958 (cité par Kleene, 1971, p. 197) qui dénotent l’axiome de compréhension par axiome des sous-ensembles d’un ensemble donné. Cette influence vient des travaux de Zermelo. Dans la première formulation, Zermelo appelle l’axiome de compréhension par son vrai nom :

Postulat de triage (voir Betht 1955 p. 142). La notion de triage conserve mieux l’intuition du principe de tiers-exclut que ne le fait le concept de compréhension.

BIBLIOGRAPHIE CITEE

ANTA DIOP, Cheikh :

– 1981, Civilisation ou Barbarie, Ed. Présence Africaine, Paris.

– 1982, Conclusion du colloque Philosophie Science et Religion. Les crises majeures de la philosophie contemporaine. Université de Dakar (Sénégal).

BETH, E.W. : 1955, Les fondements des mathématiques, 2éme éd. G.V.N., Paris-Louvain.

CRESSON, A. : 1958, Leibniz, sa vie, son oeuvre, PUF. .

DRAKE, Edouard S.J. : 1985, How recent work in mathematical logic relates to the foundations of mathematics, p. 27-35, Mathematical intelli­gencer, vol. 7, nO 4.

EXBRAYAT et P. MAZET : 1971, Algèbre 1, Hatier.

GAUTHIER, Yvon : 1976, Fondements des mathématiques – Introduction à une philosophie constructiviste, Presses de l’Université de Montréal

GÖDEL, Kurt : 1940, The consistency of the axiom of choice and the generalized continum hypochesis, Annals of Mathematics studies 3, Princeton University Press, U.S.A.

GRZEGORCZYK, Andrzej : 1961, Fonctions ré­cursives, éd. G.V.N., Paris-Louvain.

RAO Wang et McNAUGHTON R. : 1953, Les systèmes axiomatiques de la théorie des en­sembles, éd. G.V.N., Paris-Louvain. HEINZMANN, Gerhard : 1985, Entre intuition et analyse – Poincaré et le concept de prédicativité, ed Albert Blanchard, Paris.

KLEENE, S.C. : 1971, Logique mathématique ; Armand Colin, Paris, traduit de l’Américain par Larlreault.

LARGEAULT, Jean : 1972, Logique mathéma­tique-textes, Armand Colin, Paris.

MIRIMANOFF ; D. : 1917, Remarques sur la théorie des ensembles et les antinomies canto­riennes, Ens. Math. t. 19, p. 209-217.

MOSTOWSKI, Andrzej : 1978, Les ensembles, p. 1-36 ; Dans un ouvrage collectif, la pensée scientifique – quelques concepts, démarches et méthodes, éd.. Mouton/Unesco.

PABION : 1976, Logique mathématique, Her­mann.

PIETERS, Jean : 1981, Frege et le projet des Grundlagen, p.23-42, Cahier du Centre de Logique, vol. 2, Cabay-Louvain la Neuve.

RUBIN, H. et J.E. Rubin : 1963, Equivalents of the axiom of choice, North-Holland.

SKOLEM, A. Th. : 1963, Studies on the axiom of comprehension, p.162-170, NDJFL, vol. IV, n° 3, July.

VUILLEMIN,Jules : 1964, L’origine et le méca­nisme des antinomies dans la première philo­sophie de Russell (1903), p.59-95, Logique et analyse, n°s 25-26 ; Louvain.

ABREVIATIONS

CAD : Cheikh Anta Diop.

éd. : édition.

Ens. Math. : Enseignement mathématique.

G.N.V. : Gauthier Villan E. Nauwelaerts.

NBG : von Neumann Bernays Gödel.

NDJFL : Notre Dame Journal of Formal Logic.

  1. : numéro.
  2. : page.

PUF : Presses universitaires de France.

  1. : tome.

vol. : volume.

Z.F. : Zermelo-Fraenkel.

Nous remercions vivement M. et Mme SENGHOR lesquels, par une heureuse rencontre, nous ont fait honneur de figurer parmi les élus qui rendent hommage au Savant Africain.

Mboka KIESE

B.P. 1519 – 78205 Mantes – FRANCE

[1] Un commentaire sur les Fondements des mathématiques d’après l’introduction de Cheikh Anta Diop. (première partie), par Mboka Kiese. A paraître aux éditions Présence Africaine.

[2] A. Cresson, 1958, (p.16).

[3] CAD, 1982 (p. 462).

[4] Voir l’exposé de Pierters, 1981, (p. 23-32).

[5] Ils, mis pour Bernays et Gödel.

[6] Voir Han Wang, 1953 (p. 15-18) ou Beth. 1955 (p. 142-143).

[7] Abraham Adolf Fraenkel est né en Allemagne en 1891 et mort en Israël en 1965

[8] L’idée de compréhension ne renferme pas de contradiction en soi. C’est le fait d’accepter d’emblée que, la condition selon laquelle des éléments A ayant été caractérisés par une, certaine propriété F, une telle condition est suffisante pour fonder un ensemble, qui rend contradictoire ; ou le fait de limiter ces éléments dans une « unité fermée (ensemble) ».

(Han Wang, 1953, p. 15). Car cette condition prend diverses valeurs.

[9] Nous suivons l’idée générale exposée par Vuillemin, 1964 (p. 59). Vuillemin cite Russell.

[10] Voir Hao Wang, 1953 (p.15-18) ou Beth, 1955 (p.142-143) contenait trois lacunes :

  1. L’axiome de l’infini ne garantit que l’existence d’ensembles dénombrables tels que w ; mais ignore la descente transfinie, objet de prédilection de Cantor, du type :

w, f(w, f(f(w)), f(f(f(w)))….

w étant l’ensemble des entiers naturels.

f, une fonction substituable tantôt à l’opération successeur, tantôt à l’opération ensemble de parties.

  1. En fait de correspondance biunivoque (résultant de l’isomorphisme), les axiomes de Zermelo, ne garantissent pas si les images obte­nues par transformation ininterrompue de w forment effectivement des ordinaux.
  2. Dans son axiome de compréhen­sion, Zermelo fit intervenir la notion de « phrase définie » qui ne fut pas précisée.

En outre, cette notion présupposait l’énoncé des axiomes de la théorie des ensembles et des principes de logique.

Pour palier à cette dernière lacune, Fraenkel[[Abraham Adolf Fraenkel est né en Allemagne en 1891 et mort en Israël en 1965.

[11] Dans le langage des prédicats du premier ordre, les quantificateurs couvrent des variables individuelles. Par contre dans le second ordre, les quantificateurs portent aussi sur des prédicats et fonctions. C’est le cas ici du prédicat « grand X.. et de la variable individuelle « petit D.