Critique d’art

VERBE HUMANISTE ET PRESENCE PLASTIQUE CHEZ UN AFRICAIN PEINTRE : IBA NDIAYE

Ethiopiques n° 64-65 revue négro-africaine

de littérature et de philosophie

1er et 2e semestres 2000

INTRODUCTION

L’année 2000 voit l’artiste peintre sénégalais Iba Ndiaye, porter ses 72 ans avec une constante dignité dans l’action et un riche itinéraire jamais interrompu de plus de quarante cinq ans de métier, s’interroger alors sur un tel parcours signifie d’emblée chercher à découvrir les raisons d’une telle fidélité à un métier et surtout les marques de la réception que lui réservent ses contemporains. C’est en même temps tenter de comprendre pourquoi ses œuvres continuent de faire et de refaire le tour du monde des galeries avec toujours le même intérêt affiché par les collectionneurs et la critique ? Comment expliquer une telle longévité professionnelle ? Comment ne pas chercher les raisons de ce souffle de jouvence dans les arts plastiques au Sénégal créé par l’Exposition des œuvres de Iba Ndiaye à la Galerie de l’Arche de Saint-Louis du Sénégal au début de Janvier 2000 ? Qu’est-ce qui fait que des toiles de 1980, et 1970 continuent d’être admirées comme si elles venaient tout juste de sortir de l’Atelier du grand peintre ?

Des interrogations qui ne doivent pas cependant faire perdre de vue celles plus récursives de Iba Ndiaye lui-même qui dans chacune de ses œuvres, dans chacun de ses propos nous interpelle sur notre quotidien, sur la force des valeurs humaines et sur la réalité de ce que nous avons regardé dans les formes et les couleurs qu’il nous présente. Avons-nous bien vu ? Savons-nous les niveaux de signifiés exprimés ? Sommes-nous capables de comprendre l’accord entre deux teintes ou le désaccord entre deux lignes ? C’est parce que cet artiste semble avoir mis au cœur de ses préoccupations techniques et thématiques le souci de communiquer avec l’autre dans le respect rigoureux des exigences du verbe plastique qu’il a choisi. De là sans doute son refus des caractérisations prêt-à-porter et des jugements de valeur rendus une fois pour toutes.

Pourtant, on ne peut s’empêcher de porter le regard sur Iba Ndiaye lorsqu’on parle d’ «  africain peintre » dans l’art contemporain. C’est comme si, paradoxalement, une telle caractérisation lui «  collait à la peau », qu’il l’acceptait volontiers et que toute son œuvre continuait de s’en réclamer. C’est parce que, peut-être, il a été le premier à poser son africanité non pas comme un poids ou une marque qu’on cherche à exhiber quotidiennement, mais comme composante du sang qu’on ne sent pas couler dans les veines, qu’on ne peut détacher de la personne vivante. Iba Ndiaye explique :

« l’africanité, on la porte en soi. Je ne me la pose comme un dogme. Elle ne me pèse pas, elle, est en moi. Je ne m’interroge même pas. Je la transporte en moi, je la véhicule, je la vis » [1].

En posant ainsi sa personnalité hors de tout folklorisme, Iba Ndiaye martèle : « Je ne suis pas un peintre africain, je suis un africain peintre » [2]. Une boutade restée célèbre pour traduire le refus de cet artiste d’être enfermé dans un ghetto « africain » où toutes les images devraient porter la même couleur et les mêmes traits d’un univers culturel qu’on suppose homogène. C’est surtout sa liberté de choisir le langage plastique qui lui convient et les thématiques correspondant à ses pulsions intimes que Iba Ndiaye pose avec force.

Sans doute ! Mais un regard porté sur l’expérience picturale de Iba Ndiaye à la lumière de l’état de la peinture en Afrique moderne, permet-il de confirmer ses impressions que l’artiste veut nous faire garder à travers ses confidences et déclarations ? Qu’est-ce qui dans l’architecture du verbe dans son œuvre autorise à parler d’une continuité dans l’expression de ses convictions, de ses rêves, de ses souvenirs ? Peut-on dire que le traitement de l’espace pictural chez Iba Ndiaye ne doit rien ni au classicisme européen ni à l’esthétique africaine ? De quoi dépend précisément cette personnalité esthétique de l’auteur de La Ronde à qui le tour ? Et qui lui permet de s’identifier comme « africain peintre » et non peintre africain ? En quoi l’œuvre de Iba Ndiaye peut-elle encore faire preuve de présence au sein d’un monde de l’art marqué par toutes sortes de turbulences de styles et de sujets ?

QUELQUES MARQUES DE L’ESPACE PICTURAL CHEZ IBA NDIAYE

L’œuvre de Iba Ndiaye offre suffisamment de repères pour qui veut découvrir l’évolution plastique de ce peintre qui s’est très tôt intéressé à l’art d’occident. En effet, né en 1928 à Saint-Louis du Sénégal, Iba Ndiaye a été très tôt fasciné par les images colorées des cartes postales, les peintures sur toile à l’église et les affiches de cinéma qui faisaient naviguer son imagination d’adolescent vers d’autres horizons ? Il quittera Saint-Louis à l’âge de vingt ans pour des études d’architecture à Paris avant de se décider pour la peinture. Ce fut alors une fréquentation assidue des musées et des galeries d’Europe pour mieux visiter Poussin, Goya, Vélasquez, Rembrandt, mais aussi Picasso, Matisse, Cézanne. Iba Ndiaye, crayons en main interroge tous les styles et tous les thèmes. Il se familiarise avec l’écriture abstraite, visite les réalistes et porte son intérêt sur tout ce qui touche l’esthétique, que cela vienne d’Europe ou d’Amérique, de l’Extrême-Orient ou de l’Afrique.

Quand de telles fréquentations le prédisposaient tout naturellement à être un élève, studieux des Grands maîtres de l’art d’occident, quand plus de dix ans d’études à l’Ecole des Beaux-Arts de Montpellier puis à l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris devaient faire de lui un peintre européen à la peau notre, Iba Ndiaye fut au contraire submergé par un faisceau d’influences de sources africaines. Plus exactement des formes de la statuaire nègre qu’il eut à transcrire graphiquement s’imposèrent à lui comme des piliers majeurs de sa peinture. C’est cette personnalité esthétique forte de l’assimilation des vertus plastiques d’occident et du langage multimillénaire de l’art d’Afrique, qui donne à l’espace pictural de Iba Ndiaye cette architecture en quatrain.

En quatrain ? Pour désigner ainsi la première marque de cet espace pictural qui présente de façon constante un rythme en quatre temps que l’on peut retrouver dans chaque œuvre. Qu’on regarde par exemple, Portrait d’Anna [3], huile sur toile (116 x 80 cm) de 1962 : les quatre temps ici sont sans équivoque à travers l’image forte d’Anna qui partage l’espace avec la couleur de fond de l’image. A côté de ces deux temps, le regard vivant de Anna est relevé par la place accordée à la lumière pour que l’attention du lecteur saisisse d’emblée la spécificité de chacun des temps qui rythment l’espace pictural. C’est le même rendu d’une tranche de vie que l’on découvre, plus de vingt ans après, en 1986 dans Le trompettiste [4], (111 x 79) en huile sur toile. Ici les temps posent leur évidence à travers le fond général de l’espace qui suggère l’atmosphère des night-clubs, le corps du trompettiste qui se dégage à peine de cette fumée du milieu, la trompette campée dans son arrondi, l’effet de la lumière qui annonce les sons et éclaire en même temps toute l’œuvre dans la même ambiance de jazz. Iba Ndiaye réussit à l’aide des couches de pigments et vernis à poser de façon réaliste l’univers de ses personnages et à nous donner cette impression de déjà vécu.

Il serait aisé de rechercher dans cete architecture en quatrain, ce qui relève de l’influence de l’Occident et ce qui appartient à l’Afrique, aussi aisé que’ de distinguer à l’œil nu, ce qui dans l’eau relève de l’oxygène et de l’hydrogène ou ce qui dans le sang est globule rouge ou globule blanc ! Pour souligner encore l’intégration parfaite que cet artiste fait de ses divers emprunts dans son itinéraire.

Par contre, en nous arrêtant sur une autre marque de l’espace pictural de Iba Ndiaye, on peut parler de la prédominance de caractéristiques de sa culture. En effet, le choix des couleurs dans la plupart des œuvres semble s’imposer à l’artiste comme une victoire de la mémoire sur le présent. Tantôt c’est l’environnement né de la saison qui occupe tout l’espace pictural comme dans Savane en hivernage, huile sur toile (60 x 80 cm) de 1989 [5] : le tableau tout entier, par sa couleur d’hivernage fait défiler les parfums et les bruits de la campagne durant les quatre mois de la saison des pluies au Sahel. Tantôt, c’est le travail des couleurs chez les teinturières de Saint-Louis dans leur recherche d’effet visuel fort, qu’on retrouve chez Iba Ndiaye, lorsque l’arrière-plan de l’œuvre est soit gratté, soit mis en réserve.

On peut citer également l’huile sur panneau (24 x 50 cm) de 1983, intitulée Crépuscule, comme une autre illustration de cette prédominance de la culture de l’artiste dans son œuvre : ici, c’est l’espace pictural travaillé et teinté qui impose à lui seul la beauté de l’œuvre [6] ; tout autre élément n’y venant que pour relever la composition et offrir l’angle d’approche le meilleur. Par ailleurs, dans ses aquarelles ou autres travaux au brou de noix sur papier, l’occupation de l’espace dans les traditions textiles à Saint -Louis ou sous l’inspiration des paysages dogons visités, apparaissent sans équivoque.

Chaque fois, Iba Ndiaye exploite sur son espace pictural différentes couches de couleur appliquées sur la toile ou le papier par glacis transparents. Ce qui contribue à créer cette présence visuelle intense qui attire souvent avec force notre regard. Cela explique la séduction de Lowery Sims au contact de la peinture de Iba Ndiaye. Les travaux de cet artiste, disait-il, « rappellent les paysages les plus construits de Claude Lorrain et ceux d’autres artistes de l’âge classique, dans lesquels la nature, son chaos et sa puissance ont été disciplinés par le souci d’ordre et de discipline des créateurs » [7].

Iba Ndiaye est ainsi classé parmi les plus grands noms de peintres ayant travaillé avec réussite l’espace pictural dans le traitement des paysages. Mais le peintre sénégalais ne s’arrête pas à ce seul aspect. La prédominance de la mémoire de sa culture dans son travail convoque d’autres préoccupations. C’est le cas de sa célèbre huile sur panneau (250 x 150 cm), La ronde à qui le tour ? 1970 [8] : les couleurs sang et ocre suffisent pour camper l’atmosphère des sacrifices du mouton pour la Tabaski. Pourtant les images de réjouissance chez les enfants, de prière et de fête pour tous, sont fortes à cette occasion. Le fait que l’artiste ait choisi l’image sanglante pour occuper chaque coin de l’espace pictural, est suffisamment révélateur de son intention de poser chaque partie du tableau dans sa plénitude expressive et surtout d’inviter son lecteur à aller au-delà de l’image religieuse pour lire le destin de la docilité et de la soumission.

Une troisième marque de l’espace pictural chez Iba Ndiaye est ce qu’on pourrait appeler un champ de liberté pour le pinceau. C’est Iba Ndiaye lui-même qui avoue que l’espace pictural qu’il choisit entre en complicité avec son inspiration, pour laisser ensuite l’image se poser et poursuivre son itinéraire. Il explique qu’il en est ainsi, parce que tout le processus de création doit laisser libre la main dans ses divers mouvements sur la toile, parce que la main a aussi son mot à dire dans une œuvre. Donnant l’exemple de ses paysages, Iba Ndiaye indique qu’aucune des étapes de son travail n’est gratuite :

« Esquissé en camaïeu à l’essence du térébenthine mélangée à l’huile de lin dosée au compte gouttes, la toile, fixée d’abord sur un chevalet, est ensuite posée au sol ; je peux ainsi me permettre des gestes plus larges, la travailler au couteau à palette et réaliser des empâtements sur les places réservées. Après quelques jours de séchage, je replace ma toile sur le chevalet où elle restera le temps plus ou moins long qui m’est nécessaire pour que, par ajouts et par retrait j’en arrive au stade qui me satisfait. C’est à cette étape qu’intervient la reprise du dessin qui structure le tableau » [9].

Bien sûr, ces explications dépassent le champ pictural. C’est toute l’œuvre qui y est considérée dans les diverses phases de sa création. L’œuvre d’art en effet n’est pas une juxtaposition de parties fussent-elles bien préparées les unes à la suite des autres. L’avantage de Iba Ndiaye par rapport à beaucoup d’artistes est que, chez lui, l’idée ou le sentiment qui donne naissance à l’œuvre ne se perd jamais en cours de route : le souvenir est toujours là, vivace, pour revigorer l’inspiration et encourager la main dans l’exercice de sa liberté. Et il ne fait aucun doute que Henri Focillon aurait cité l’œuvre de Iba Ndiaye comme témoignage éloquent du rôle de la main dans la réalisation du Beau.

On se rappelle que dans son hymne à la main, Focillon soulignait que « l’art se fait avec les mains. Elles sont l’instrument de la création, mais d’abord l’organe de la connaissance » [10]. Focillon voyait dans le travail de la main une action inséparable de l’état de conscience de l’artiste. « Donnez-moi un centimètre carré de toile, disait-il, reprenant le mot de Gustave Mirabeau, et je saurai si c’est un vrai peintre » [11]. Un exercice qu’il serait facile d’entreprendre sur une toile de Iba Ndiaye pour mieux mesurer cette marque de son espace pictural faite de liberté accordée à la main.

Il faut dire qu’une telle marque peut se trouver en même temps que les deux autres (architecture en quatrain, prédominance de caractéristiques de sa culture) dans chaque œuvre. La distinction ici opérée vise principalement à faciliter une correcte lecture à partir de piliers centraux clairement identifiés.

STRUCTURE DU VERBE PLASTIQUE DANS L’ŒUVRE DE IBA NDIAYE

En analysant l’œuvre de Iba Ndiaye, on peut retenir trois directions essentielles structurant la plasticité du verbe de l’artiste. Chacune d’elle dépassant les caractérisations ethnographiques ou paresseusement touristiques indique au contraire une composante d’un système complexe de couleurs et de formes qui disent le temps vécu, pensent le sentiment et annoncent toujours un futur pour l’Homme.

Disons tout de suite que parler de verbe chez un artiste qui se méfie du mot et qui a choisi l’écriture plastique pour communiquer, n’est pas une vue de l’esprit pour tous ceux qui comprennent que les langues des hommes donnent au verbe la force d’évoquer, l’autorité pour dire l’état ou le devenir. La langue française voit dans le verbe un concept et une réalité dont le propre est d’être toujours sous-tendu de temps : passé, présent, futur. Le wolof fait un clin d’oeil entre « wax », « waxtu » et « waxtaan » pour faire comprendre les logiques complémentaires entre le verbe-parole (wax), le temps-choisi (waxtu) parfois aussi la perte de temps en verbiage (waxtu) et les propos choisis (wax-taan). Nous ne ferons pas allusion au Verbe des saintes Ecritures compris comme Parole de Dieu et source de toute création. Mais nous voulons bien signifier par tous ses rapprochements sémantiques que parler de verbe chez un peintre comme Iba Ndiaye, pétri de culture wolof et française et créateur d’œuvres de beauté, c’est poser les fondements de sa créativité, les sources de son inspiration, sa façon à lui de gérer le temps de la vie, son Temps.

D’où les trois directions annoncées dont la première concerne toutes ses œuvres exprimant le cri de l’exilé. Iba Ndiaye comme on le sait a choisi l’exil et son cortège de déchirements, pour vivre sa passion, maîtriser son métier. Ces œuvres laissent apparaître son refus de l’oppression, de l’injustice et de l’exploitation. Le cri qui y est lancé dépasse la personne du peintre pour couvrir les malheurs de tout un continent. Le lavis d’encre sur papier, Le cri (45 x 37,5 cm) de 1987 [12] est une parfaite illustration du sentiment et de la situation signifiés. Par cette œuvre majeure, le cri devient une réalité palpable dans sa férocité et dans sa puissance rendue par toute la place faite à la bouche et à la gorge du personnage dont la tête en gros plan occupe tout l’espace pictural. C’est un cri de révolte de toute l’Afrique dont les fils sont victimes de racisme, de discrimination, de mépris.

Il y a eu auparavant Le droit à la parole, autre lavis d’encre sur papier (64 x 49 cm) de 1976 [13] qui traduit le même refus du silence ou du fatalisme de la déchéance. Le gros plan est toujours là pour mettre en exergue les éléments de la parole parlée : bouche et gorge, mais aussi le regard et la main fixes. Autant d’indications pour rendre vivace le vœu de l’artiste de nous dire son combat contre le silence coupable, la passivité, le suivisme.

Des maux contre lesquels, Iba Ndiaye se lève encore dans La ronde à qui le tour ? [14] Tout dans ce tableau – du défilé des moutons dans un environnement ensanglanté, au choix même de cet animal considéré comme le plus docile des animaux domestiques – concourt à interpeller les locataires de l’indifférence et de la docile soumission par rapport à ce qui les attend. Iba Ndiaye le dit lui-même sans équivoque : « ce thème me permet de montrer qu’il ne faut pas être mouton dans la vie parce qu’on n’égorge que les moutons » [15].

Un appel qui s’adresse à ses compatriotes et par delà eux à tous les hommes et femmes pour qu’ils refusent la médiocrité, l’assistance qui lie et qui étouffe tout potentiel d’initiative et d’action, car conclut Iba Ndiaye, « la carence d’une conscience de révolte amène toujours à être le mouton de quelqu’un d’autre » [16].

Iba Ndiaye puise ainsi au tréfonds de sa conscience d’exilé la puissance du signifié qu’il faut accorder à chaque œuvre, à chaque mouvement de la personnalité humaine. C’est là où apparaît la seconde direction de cette structure du verbe plastique faite de sincérité dans l’expression des contenus et des formes. Il est vrai que la science n’a pas encore inventé le « sincèromètre », cet appareil qui pourrait quantifier le degré de franchise et de sincérité de l’homme notamment dans ses productions intellectuelles. Mais l’aisance avec laquelle il réussit à combiner divers thèmes dans ses œuvres autorise à parler de sincérité comme marque d’un verbe pertinent pour reprendre le vocabulaire des linguistes. Iba Ndiaye parle de choses réellement vécues ou passionnément senties. Chaque coin ou recoin de l’œuvre est le témoignage d’efforts persévérants mis par l’artiste pour faire sentir à l’autre la justesse d’un cri du cœur ou d’un trait de mémoire.

Ainsi dans Souma Dome Görfitt. Du courage mon fils [17], diptyque en encre de chine sur papier de 1992, (chaque dessin faisant 56,5 x 38 cm), l’artiste offre l’image d’une mère insufflant le courage à son fils. Une image symbolique des appels de Iba Ndiaye pour que ni le découragement, ni la peur n’aient droit de citer dans la vie d’un homme digne. Il faut recevoir également Hommage à Bessie Smith [18], huile sur toile (130 x 195 cm) de 1986, pour comprendre davantage la réalité vécue par Iba Ndiaye dans la représentation de ces tranches de vie de cabaret, l’artiste ne cherche pas à faire sortir de l’opacité du night club les visages des musiciens. Bien au contraire, il les y enfonce pour mieux suggérer par l’équilibre des couleurs et la composition de la lumière, le rythme du jazz. C’est comme si l’artiste cherchait à rendre physiques les sonorités pour mieux laisser dans l’abstrait trompettistes et autres saxophonistes emportés par leurs improvisations habituelles. Il faut ajouter que cette œuvre est en même temps un vibrant hommage à la figure de Bessie Smith chanteuse de jazz victime du racisme et de la bêtise humaine.

Dans un tout autre rythme, l’huile sur toile de 1991, Guiss Rapp [19] en 100 x 65 cm, est une traduction de l’univers surréel qui accompagne l’homme depuis la nuit des temps. Quelle civilisation ignore la présence de l’irrationnel dans son identité profonde ? Qui ose proclamer l’infantilisme du couple esprit /matière ? Iba Ndiaye ne se pose pas la question de savoir si c’est là une spécificité nègre ou pas. Il évoque simplement des croyances vécues sur la force des esprits malfaisants. Une évocation qui s’accompagne d’un rare don de suggestion dans la présentation des formes qui semblent défier le réel : la tête du personnage se perd avec l’espace pictural, pendant que son buste est sans limite précise et son regard inexistant. Le tout placé dans un univers sombre cassé par endroit par un ciel de crépuscule pour mieux fixer le néant qui engloutit la forme humaine et annonce l’apparition des esprits-djinnés dans leur invisibilité palpable. Le pinceau de Iba Ndiaye parvient ici, à réaliser un condensé de croyances au surnaturel. Plus que mille discours philosophiques sur la réalité de l’irréel, le tracé des formes et l’illusion de leur transparence font de ce tableau un espace où l’invisible est capturé par la créativité d’un artiste.

On pourrait multiplier les exemples de cette aisance de Iba Ndiaye à peindre divers domaines de son moi profond et de son environnement socio-culturel. C’est une telle constante dans son œuvre qui amène à s’interroger sur la place de la raison dans l’expression des signes. Une interrogation qui fonde la troisième direction que nous appelons dialogue cœur/raison, pour reprendre le mot de Senghor selon lequel l’art nègre serait essentiellement marqué par la prédominance de l’autorité du cœur, alors que l’art du Blanc serait sous la tyrannie de la raison : on connaît la boutade, « l’émotion est nègre, la raison est hellène » [20].

Il s’agit ici, pour ce qui concerne Iba Ndiaye d’apprécier son aptitude à poser avec équilibre sur la toile ou le papier ses choix plastiques, fruit d’une expérience qui n’est pas juxtaposition d’influences mais assimilation et recréation. Loin d’une plate soumission à l’art nègre consacré ou à l’art occidental primé, Iba Ndiaye ne se veut ni fondamentalement « nègre », ni brillamment « hellène ». Un équilibre affirmé dont on ne trouve nulle part, la recherche factice. Qu’on regarde à ce propos Le poète et sa muse [21], huile sur toile de 1966 (150 x 250 cm) : il n’est pas exagéré de présenter cette œuvre comme un modèle d’équilibre par la plénitude de sa composition, et le suggéré du contenu qui concerne l’artiste quels que soient ses horizons culturels. Aucun détail n’est négligé. Que ce soit dans l’expression attentive du poète guettant le souffle fécondant de la muse, que ce soit dans l’écho du trompettiste, ou dans le parfum des fleurs ou encore dans l’envol rythmé de colombes au coin de la toile, partout, l’artiste pose des marques d’un pinceau appliqué. On pouvait changer à volonté l’origine géo-culturelle d’une telle œuvre, sa capacité à assurer le dialogue cœur/raison resterait intacte.

Le dialogue cœur/raison, c’est donc le souci minutieux de l’artiste d’offrir des repères de lecture pour chaque composante de la condition humaine. On le trouve aussi dans l’huile sur toile de 1993, intitulé Sahel [22] et qui se présente en 97 x 130 cm. Une œuvre qui pourrait revêtir la signature de n’importe quel grand pinceau d’occident. Iba Ndiaye y révèle une telle maîtrise de l’abstraction, une telle réussite dans le traitement des couleurs qui imposent ici les formes, qu’on pourrait bien douter de l’africanité de ce peintre. On pourrait en effet évoquer la culture dite faussement de l’oralité [23] de ses compatriotes pour conclure que Iba Ndiaye sera un « incompris », un « assimilé » aux valeurs culturelles occidentales, et que son œuvre n’est pas dialogue mais continuation des fortes influences des règles de l’esthétique d’occident. C’est une telle compréhension qui avait amené Pierre Paret à dire que Iba Ndiaye est un « Goya africain » [24], alors que Barbel Reitter parlait de l’œuvre de Iba Ndiaye, comme la manifestation d’un « Rembrandt africain  » [25].

Des caractéristiques justifiées lorsqu’on s’arrête à la surface de l’œuvre et à une lecture rapide de l’itinéraire occidental de Iba Ndiaye.

L’artiste lui-même reconnaît avoir fréquenté de façon assidue les Grands Maîtres de la peinture occidentale, que sa célèbre toile La ronde à qui le tour a été surtout inspirée par le Bœuf écorché de Rembrandt, que Goya l’a inspiré dans plusieurs métaphores… Et c’est là justement où l’on découvre un artiste qui ne copie pas mais re-crée, qui n’emprunte pas à un tel mais, s’approprie toutes les valeurs positives qui lui permettent de mieux exprimer l’humaine condition dans ses laideurs ou ses ravissements, dans ses peines ou ses joies. A l’arrivée, on a, non pas un Goya ou un Vélasquez, mais des Iba Ndiaye.

Reprenons encore La ronde à qui le tour ?, œuvre significative par le symbole du sacrifice rituel du mouton, qui permet de rattacher, par cette pratique, le pays natal de l’artiste aux générations de croyants de divers peuples qui depuis le Prophète Abraham, continuent le même acte. Cette œuvre porte aussi en elle les démarches des fabulistes Esope et La Fontaine et du conteur Amadou Koumba qui ont privilégié le règne animal pour offrir à l’homme le miroir de sa propre condition.

Michel Leiris sentait cette profonde fécondité dans la créativité de Iba Ndiaye, lorsqu’il avertissait que Iba Ndiaye connaît les moindres recoins des arts traditionnels d’Afrique.

« Mais, ajoutait-il, il ne veut pas les imiter stérilement, et dans ses peintures exécutées selon les techniques les plus modernes, il ne retient de l’Afrique que le sujet » [26].

Leiris devait simplement préciser que le sujet de Iba Ndiaye n’est pas exclusivement l’Afrique, et que sa technique porte bien le sang de son univers. D’ailleurs Iba Ndiaye ne cessait de rappeler qu’il se moque du « goût du jour », du « folklorisme » qu’attendent des nègres, les Européens en mal d’exotisme.

« Je refuse, dit-il, sinon je n’existerai qu’en fonction de l’idée (que ces gens là) se font de l’artiste contemporain africain, une idée ségrégative qui semble vouloir le confiner totalement dans le domaine du naïf, de l’insolite, du surréalisme, de l’art bizarre » [27].

C’est dire donc que Iba Ndiaye tire de son expérience et de la maîtrise de son métier cette capacité d’équilibre thématique et plastique, composante essentielle de l’architecture de son verbe. Une architecture dont chacune des directions indiquées pose le souci humaniste de l’artiste. Et il est facile de relever que le cri de l’exilé, la sincérité des formes choisies ou le dialogue cœur/raison constituent les axes d’une même préoccupation d’un homme jaloux de sa dignité et fier de voir ses frères et tous les hommes s’accorder sur des valeurs d’éthique contre la paresse et toute forme de tricherie.

Voilà pourquoi nous avons dit verbe humaniste pour signifier ce sens de l’homme, le seul chemin qui intéresse en dernière analyse Iba Ndiaye, au-delà des particularismes nègres ou berbères, hellènes ou sémites.

Il reste cependant à s’interroger sur les capacités de résistance et de renouvellement de telles conditions dans les turbulences actuelles des arts du continent africain et de l’art contemporain. Iba Ndiaye peut-il toujours garder cette même passion pour le travail bien fait quand de partout se lèvent des modes bousculant bien d’héritages du passé ? Le bavardage des styles de toutes sortes, les penchants dits post-modernistes de certains collectionneurs et galeristes de Paris, Londres ou New-York ne risquent-t-ils pas de réduire la portée des voix de Iba Ndiaye, de brouiller les chemins qu’il s’est choisis ? Est-on fondé à un questionnement sur l’actualité ou non du modèle Iba Ndiaye, sur des possibilités de saturation esthétique ?

QUESTIONNEMENT AUTOUR DE LA PRÉSENCE PLASTIQUE D’UN PEINTRE

Il faut reconnaître d’abord que la notion de « modèle » rapportée à Iba Ndiaye ne trouve aucun répondant lorsqu’on interroge son itinéraire plastique. Car, on le sait, Iba Ndiaye ne s’est jamais posé comme la Perfection personnifiée et, par ailleurs, la variété de tons dans son œuvre interdit une telle entreprise. Ensuite que pourrait bien signifier l’idée de modèle dans le domaine de l’art qui exige sincérité dans l’expression de choses vécues, et maîtrise personnelle d’un métier ? Quelle assemblée d’artistes, de critiques ou de collectionneurs s’est donné des pouvoirs pour nommer des modèles ?

Cependant la longévité de la carrière de cet artiste et sa constance dans la synthèse de tous les apports fécondants, encouragent des questions sur le futur de sa personnalité esthétique. Est-il possible d’avoir un autre Iba Ndiaye ? La nouvelle génération d’artistes se pose-t-elle les mêmes questions que celles de Iba Ndiaye ? L’air du temps avec ce qu’on appelle les Installations, la Récupération ne risque-t-il pas d’étouffer les piliers majeurs de l’œuvre de Iba Ndiaye ? Que veut bien dire fidélité aux principes classiques d’un métier dans un monde devenu sans frontières à la suite des gigantesques progrès des sciences et des techniques, quand l’informatique réclame son droit artistique, quand Internet bouleverse les notions de droits d’auteurs et de propriété intellectuelle en général, quand d’autres rêves sont possibles avec les découvertes spatiales ?

Un questionnement qui situe la présence plastique de l’œuvre de Iba Ndiaye au cœur de la réflexion sur les spécificités actuelles de l’art, à l’heure de ce qu’il est convenu d’appeler la mondialisation. Et c’est le lieu de rappeler que Iba Ndiaye a su très tôt comprendre qu’il n’y a pas d’avenir pour la création artistique hors d’une démarche ouverte. Il martelait de telles convictions contre ceux qui plaidaient pour un « négrisme » exacerbé. L’artiste nègre disait-il, doit repousser « toute compromission avec ce primitivisme de bon aloi » qu’on attend trop souvent de lui, et il doit par conséquent enrichir son expérience et sa culture esthétique « au combat des créateurs d’autres continents » [28]….

Iba Ndiaye reste donc bien actuel dans sa conception d’une créativité qui n’est ni nègre, ni blanche mais fille d’un apprentissage patient et d’une constante rigueur. La créativité restera toujours vivace, disait-il, si l’artiste continue d’acquérir des connaissances, de travailler son métier, d’avoir une « discipline consentie, personnelle, pour ensuite sortir de cette discipline et essayer de s’envoler. Car, la discipline est un tremplin qui permet de s’extraire de soi » [29].

Une recommandation qui se passe de commentaire. Iba Ndiaye accorde une forte place à la responsabilité individuelle de chaque créateur de beautés : le renouvellement de la créativité n’est ni fonction de la fidélité à tel ou tel grand maître, ni d’une adhésion à la mode du moment qui permet de « bien vendre » et d’être « bien connu », mais, soutient-il, de l’effort de dépassement intarissable chez la personne si elle sait se donner des motifs d’aller toujours de l’avant.

Voilà pourquoi ceux qui ont vu en Iba Ndiaye un « Goya africain » ou un « Rembrandt noir », ou un « farouche classique de la peinture contemporaine », appauvrissent l’art par ce genre de rapprochement réducteur, restrictif et folklorique. Que pourrait bien signifier d’ailleurs, pour suivre une telle logique de caractérisation, un Picasso baoulé, un Iba Ndiaye finlandais ou mongol ? Comment peut-on, en effet, dans un domaine aussi large et hétérogène que le monde de l’art trouver une identité de vues et de techniques dans l’œuvre même d’un seul artiste ?

Que dire alors des œuvres de deux artistes de mêmes horizons culturels et historiques ? Ou encore de celles d’autres artistes séparés par des frontières de toutes sortes et des siècles d’existence ? A qui appartient, pour l’éternité le rouge, le bleu ou l’ocre ? Qui peut soutenir que la problématique de l’amour, de la révolte ou de la fraternité lui est propre ? Même si l’usage de la toile dans les arts d’Afrique semble être une importation de valeurs occidentales, à qui appartient le droit de goûter ce qui attire nos sens ?

Pour dire donc, que la volonté de trouver des repères communs entre artistes ne saurait justifier les raccourcis souvent empruntés par une critique pressée de parler par allusion. Bien entendu, un peintre peut être influencé par un autre peintre, par un musicien ou par un sculpteur. Mais cela ne suffit pas pour gommer les personnalités esthétiques, évacuer les nuances dans les tons ou les niveaux de traitement du matériau.

Il est vrai, des copistes habiles existent de même que des faussaires en tout genre. Mais nulle part, ils n’ont réussi à se poser comme autorité par la constance dans leur production et par la longévité de leur carrière. L’histoire de l’art fourmille en exemples d’artistes auto-proclamés qui finissent par des reconversions spectaculaires dans des domaines aux antipodes de la création intellectuelle. On cite encore ces artistes peintres devenus par « la force des choses » coursiers en tout genre dans le domaine de l’habitat social ou heureux mareyeurs, quelque part sur la côte atlantique. Le tarissement de l’inspiration et la mévente des œuvres n’expliquent pas tous les pinceaux cassés.

Pour dire encore que la personnalité esthétique n’est pas une abstraction. Elle permet d’identifier la force de caractère du pinceau et les leviers de la fécondité d’un artiste. Autrement dit, s’il est facile de se proclamer artiste et de cacher ses carences par les sempiternels slogans sur « mes œuvres ne sont pas à expliquer mais à aimer », ou « je ne m’adresse à personne, j’exprime simplement mes états d’âme », il est bien plus difficile d’être artiste créateur, auteur d’œuvres intéressant diverses générations à travers divers horizons. C’est parce qu’aussi l’œuvre d’art, loin de la copie servile, est fruit de pulsions vécues, de conformité entre ce que dicte le cœur et ce que la main accepte de rendre pour le régal des sens de l’Homme. Autrement nos étudiants en Beaux Arts, par leur habilité à reprendre en exercices scolaires les dessins de Dürer, Vasserely ou Signac seraient les plus indiqués à la consécration avant de s’engager dans une carrière professionnelle.

Tout ceci pour souligner qu’il y a Iba Ndiaye, il y a Goya ! Et plus largement encore, il y a plusieurs Iba Ndiaye qui utilisent la peinture non pas comme un moyen pour être fidèle à telle tendance dominante, mais comme « nécessité intérieure, un besoin d’expression sur les problèmes existentiels » [30]. C’est là une assurance dans la créativité qui permet à l’artiste de varier ses thèmes et ses techniques non par pour suivre les conseils de « généreux » critiques ou de galeristes soucieux des désirs de leur clientèle, mais pour se faire l’écho profond de ce qu’il ressent. C’est ce qui fait que Iba Ndiaye donne l’impression de revenir souvent sur des thèmes déjà travaillés, sur des techniques utilisées dans des œuvres antérieures.

Mais à l’analyse, on se rend compte que cette impression n’est qu’apparente car aucun sujet n’est traité de la même manière ni dans les dimensions choisies ni dans les effets créés. Judith Meyer-Petit explique bien ce processus lorsqu’elle fait comprendre que chez 1ba Ndiaye, le « travail de la mémoire joue à différents niveaux : d’abord en favorisant la maturation des impressions, l’approfondissement de la vision. Mais la mémoire fait bien davantage. Elle élabore les thèmes, les dépouillant de tout ce qu’ils peuvent avoir de circonstanciel pour n’en garder que les éléments permanents dignes de la mémoire des hommes » [31].

Un point de vue qui indique que la créativité chez Iba Ndiaye restera d’une rare fécondité, du moins tant que les facultés de se souvenir de l’artiste seront intactes.

On peut ainsi regarder n’importe quelle huile de Iba Ndiaye, on trouvera sans doute des ressemblances avec telle autre de ses créations, mais jamais identité parfaite. Le contraire serait d’ailleurs nier l’âme humaine dans sa palpitante vitalité. Le martiniquais Aimé Césaire, commentant l’œuvre de Iba Ndiaye, en était arrivé lui, à la conclusion qu’une telle œuvre est de celles « qui redonnent confiance dans l’avenir de l’Afrique » [32]. Parce que Iba Ndiaye sait peindre les problèmes majeurs du continent et offrir en même temps des directions de visions prospectives pour que s’installe le goût du travail et du combat quotidien contre la facilité et contre toutes les formes de soumission. Des thèmes toujours actuels et au cœur des convictions de cet artiste qui considère que, pour lui, la peinture « n’est pas un art de loisir, mais un moyen de combat » [33].

Les fondements de la créativité de Iba Ndiaye ainsi posés, s’ils peuvent rassurer sur la fécondité continue d’un artiste ne dispensent pas des interrogations sur la valeur de sa présence plastique au contact d’autres modes de travailler la toile ou d’assurer la transparence des lavis. Iba Ndiaye a-t-il les moyens plastiques de continuer son chemin sans aucun risque d’être diverti ou entraîné par l’activisme de galeries voulant faire du « contemporain » ? Est-il possible pour un « adepte » de cet artiste de fréquenter sa technique et ses thématiques sans y ajouter quelques troncs d’arbre, quelques cornes d’animaux ou quelques cauris pour faire vraiment style néo-nègre ?

Bien évidemment, pour qui a fréquenté de façon assidue l’œuvre de Iba Ndiaye, de telles questions n’appellent qu’un sourire amusé. Parce que cet artiste a toujours refusé de s’embarrasser de tout ce qui n’a rien à voir avec la « limpidité » des moyens techniques permettant de fixer sur la toile ou le papier son dire artistique, et de tout ce qui est contraire à la « fluidité » d’une composition qui donne des repères pour une perception agréable de l’œuvre.

Des choix plastiques donc qu’il s’est imposés dès le début de son itinéraire. Car, après ses études et ses tournées en Europe et en Amérique pour mieux fréquenter les Grands maîtres, Iba Ndiaye s’est donné plus d’une décennie de recul et d’assimilation (de digestion, devait-on dire), avant de commencer à exposer. Une persévérance très loin de la précipitation de certains artistes qui n’attendent même pas le premier anniversaire de leur sortie de l’Ecole des Beaux-Arts pour exposer. « La valeur n’attend point le nombre des années » est devenue malheureusement dans le monde des arts un adage passe-partout pour justifier toutes les aventures. Tout le contraire donc de Iba Ndiaye qui a su se donner le temps de parcourir « la grammaire, le vocabulaire et la syntaxe » indispensables pour savoir parler de façon audible le langage de l’art [34]. Ce qui fait que chacune de ses œuvres loin d’être une momie, est un mouvement et une invitation à penser, à rêver, à agir.

Qu’on s’arrête par exemple sur la série de « croquis » et autres « études » de Iba Ndiaye réalisés en encre sur papier. Que ce soit Etude des fleurs de 1993 (50 x 65 cm) ou Etude d’atelier de 1993 aussi (25,5 x 32,5) ou Petite chanteuse de 1977, l’habileté de l’artiste à suggérer le mouvement est partout présente. Avec La femme qui crie [35] , huile de 1986 (163 x 130 cm), le contraste voulu entre le fond de la toile et l’habillement de ce cri de détresse transformé en femme, est d’un saisissant réalisme. Parcourrez l’architecture des bras et du visage ; puis jetez un regard panoramique sur toute l’œuvre, vous découvrez alors non pas une figure humaine écrasée sur un espace sans vie, mais divers repères d’une idée sculptée qui vous interpelle.

C’est ce qui faisait dire à Lowery Sims que « c’est dans le rendu sculptural de la figure humaine, particulièrernen1 dans le traïtemeT1t de la tête, que Iba Ndiaye témoigne de la plus valable et de la plus puissante expression, et cela à la fois dans ses dessins, ses gravures et ses études à l’huile » [36].

Il faudrait ajouter que pour Iba Ndiaye, tout est dessin, parce que base véritable de toute expression plastique qui se veut opportunité de communication avec l’autre. Quelle que soit l’œuvre considérée, le tracé du pinceau établit une structuration qui privilégie l’expression des formes à la place des masses brutes. Et par une grande place accordée au jeu de la lumière, Iba Ndiaye dépasse l’influence des toiles abstraites de Hans Hartung ou les procédés du dripping pour parvenir à une précision remarquable dans le marquage gestuel et l’incision de la surface des œuvres offertes au plaisir de la rétine.

On est loin de l’écriture « spontanée et instinctive » que d’aucuns ont essayé de faire passer pour une caractéristique fondamentale de tout artiste africain. Iba Ndiaye d’ailleurs, a toujours considéré comme suspecte cette façon de présenter l’artiste africain et pire encore les prétentions d’en faire le fondement d’une éducation artistique chez les jeunes nègres. Non, dit-il, il ne peut y avoir de « particularisme forcé », de « spontanéisme forgé de toutes pièces ». L’apprentissage du métier est une dimension incontournable, de même que la remise en cause permanente des certitudes. Une fois ces exigences accomplies, poursuit-il, « on ne se rend même plus compte de cette spontanéité, parce qu’elle nous habite. Lorsque vous avez travaillé votre métier à fond, que vous êtes ouverts à toutes les voies de la peinture, vous ne cherchez même plus, lorsque vous peignez, lorsque vous tirez un trait, à faire de l’exotisme » [37].

Une conviction qui pourrait être partagée par des artistes d’autres univers culturels, parce que le naturel pour lequel plaide Iba Ndiaye est le fruit d’efforts soutenus, de persévérance et d’apprentissage jamais achevé. Des valeurs qui ne sont pas des spécificités nègres et qui révèlent la profonde préoccupation de cet artiste de peindre pour l’Homme. Il est possible de faire autrement semble dire Iba Ndiaye, puisque, quelles que soient nos tentations de nous recroqueviller sur nos particularismes et nos subjectivismes, malgré les aventures de l’européocentrisme ou les errements du paternalisme nous avons toujours en partage avec tous les autres hommes le même besoin de nous faire comprendre, de communiquer c’est-à-dire de retrouver en l’autre des aspects essentiels de notre identité. Car, souligne, cet africain peintre, « personne, quelle que soit la civilisation, ne peut dire que son originalité est simplement une originalité de terroir. Elle dépasse le territoire originel grâce à l’acquisition et au contact avec autrui. Il y a donc toujours métissage. Le métissage, c’est une forme universelle de l’être humain » [38].

Les mots sont lancés : « métissage », forme universelle de l’être » comme indications identifiant les destinataires de l’œuvre de Iba Ndiaye. Il est facile de vérifier cette logique de métissage dans laquelle s’inscrit l’artiste dans chaque recoin de son œuvre, une logique de dialogue en direction des composantes plurielles de l’identité humaine. Iba Ndiaye est ainsi un témoin de l’homme dans l’esprit par lequel en parlait Pierre Henri Simon à propos de l’œuvre de Sartre, Malraux et Camus. Parce qu’il révèle dans le choix de ses couleurs et de ses formes, de ses thèmes et de ses images rythmées que l’homme dans sa quotidienneté décrite avec franchise et précision est le même partout qu’il remonte au siècle de Louis XIV, au temps de Béhanzin ou à celui de Soulages.

C’est un tel constat qui avait permis à Senghor, après avoir salué Iba Ndiaye comme « l’un des meilleurs artistes sénégalais », de dire qu’avec l’œuvre de cet artiste «  la tradition est transcendée pour atteindre un langage universel, auquel la technique picturale, assimilée à Paris, apporte sa confirmation » [39]. Pour qui connaît la rigueur de Senghor dans l’appréciation esthétique, on peut mesurer la valeur du témoignage qu’il fait ainsi sur la marque universaliste de l’œuvre de Iba Ndiaye. L’artiste lui-même ne se prive pas d’insister sur cette marque qu’il considère comme le trait majeur de toutes ses œuvres lorsqu’il confie : « je ne peins pas simplement pour les Africains. Je m’exprime avec un langage universel et je voudrais que ce langage soit compris par tout le monde » [40].

Ainsi dans le diptyque en huile Les femmes à la fontaine [41] de 1979 (195 x 260 cm), il y a la thématique universelle portant sur une activité domestique de la femme. L’exemple du Sénégal est suffisamment éloquent parce que bien des points d’eau y ont des noms qui résument parfaitement les conditions dans lesquelles les femmes y remplissaient cette tâche : « robinet laobé », « robinet bagarre ». Par ailleurs le choix plastique du diptyque qui ouvre pour l’œil une pluralité de zones de lecture, consolide la place de Iba Ndiaye dans la Peinture.

Certains croquis sur papier réalisés par l’artiste, d’après des statuettes africaines [42], ne posent non plus aucune difficulté pour la reconnaissance de leur universalité. On peut ne pas connaître leur origine géoculturelle, mais on ne saurait ignorer la finesse des lignes et le rendu des ombres qui habillent chaque image re-présentée. C’est ce qui faisait dire à Gilles Plazy que les œuvres de l’artiste sénégalais sont pour l’humanité tout entière car, » elles ne s’inscrivent plus dans aucune tradition parce qu’elles en transcendent l’opposition en se situant d’emblée au cœur de toute tradition » [43].

Malgré tout le devoir de vigilance s’impose non pas pour contester la profonde présence humaniste des thématiques et des choix plastiques de Iba Ndiaye, mais pour mesurer davantage leur vitalité. Il faut rappeler ici le mot de Valery, qui, dans une appréciation des professions de foi et confidences d’artistes faisait remarquer « qu’il faut toujours craindre de définir quelqu’un. Ses ouvrages, les propos mêmes que l’on recueille de sa bouche, ce ne sont pas les moins trompeuses des données, ni celles qui nous conduiront assurément au secret qui fait notre envie » [44].

Même si de tels propos devaient être appliqués à Valéry lui-même (en considérant comme « trompeur » son appel à la vigilance), cela ne devrait pas permettre de sous-estimer l’importance du recul du critique par rapport aux certitudes affichées d’un artiste. L’artiste et ses œuvres doivent toujours faire l’objet de re-lectures sans relâche avant que le jugement de valeur ne soit formulé soit pour confirmer ou sanctionner négativement les intentions affichées et la production présentée.

Iba Ndiaye lui-même, semblait bien prendre conscience de la possibilité de telle situation parfois difficile pour l’artiste lorsqu’il invitait à la fin des années soixante dix la jeune génération d’artistes africains à ne jamais s’arrêter dès les premiers « obstacles », à faire preuve de « très grande responsabilité » pour la crédibilité du métier d’artiste et pour dépasser « tout piège » de quelque nature que ce soit qu’on pourrait tendre sur leur chemin : « Prenez garde à ceux qui exigent de vous d’être Africains avant d’être peintres ou sculpteurs, à ceux qui, au nom d’une authenticité qui reste à définir, continuent à vouloir nous conserver dans un jardin exotique. Nous ne sommes pas nés plus doués que les autres, la plupart d’entre nous ne sont pas issus de familles d’artistes traditionnels, au sein desquelles le métier se transmettait de génération en génération, mais sont fils de villes africaines, créées pour la plupart à l’époque coloniale, creuset d’une culture originale, dans laquelle suivant les pays, dominent des apports étrangers ou autochtones… Nous devons nous rendre maîtres des techniques qui seules nous permettent de dépasser le stade de l’imagerie enfantine, de nous renouveler et nous donner l’audace d’aborder les thèmes iconographiques de l’Afrique contemporaine, continent éclaté, plus que jamais victime, mais dont les artistes doivent contribuer à donner l’image future d’un continent qui, libéré de contrats léonins, élaborera, une nouvelle africanité » [45]

Un appel qui dépasse le seul aspect universaliste de l’œuvre pour embrasser ce qui devait être selon Iba Ndiaye le code de conduite des artistes africains contemporains. C’est en même temps une réponse sans équivoque sur la vitalité de la présence plastique de Iba Ndiaye. « Mon art sera toujours actuel » semble dire l’artiste sénégalais, pourvu que mes compatriotes africains et moi-même parvenions à rester nous-mêmes dans notre naturel, dans notre imprégnation continue à la vie du continent, et dans notre capacité à faire nôtre tout apport positif d’où qu’il vienne.

CONCLUSION

L’examen du verbe humaniste et l’interrogation sur la présence plastique chez Iba Ndiaye révèlent ainsi la personnalité d’un artiste préoccupé d’équilibre et de liberté à la fois dans le traitement de l’espace pictural et dans l’invitation à saisir les niveaux de signifiés. Une aptitude qui lui permet hier comme aujourd’hui de poser son œuvre comme repère utile dans l’apprentissage des chemins sinueux de la peinture, et dans la formulation d’une esthétique qui place l’homme au cœur de la créativité.

Chemins sinueux ? Parce que la peinture est l’une des rares formes d’expression artistique où le talent et la fécondité du verbe ne suffisent pas à garantir des chefs-d’œuvres. Ici, il faut une conversation soutenue et régulière avec les muses, davantage de persévérance dans l’apprentissage et beaucoup d’audaces et d’initiatives pour dépasser les obstacles de toutes sortes qui, tantôt poussent à la copie servile de tel ou tel maître, tantôt rendent illisibles les meilleures intentions plastiques.

Que Iba Ndiaye ait réussi à contourner le plus souvent les obstacles pour que son œuvre soit vue comme composante d’une esthétique pan-humaine, est un fait. Qu’il continue par là même à interpeller l’art contemporain sur son identité hors des barrières socio-culturelles, est une constante dont la plus nette manifestation a été le cri unanime des artistes africains lors de la Biennale de l’Art africain contemporain Dak’Art 96, selon lequel « l’art africain n’existe pas ! ». Un cri qui reprenait et assumait l’appel constant de Iba Ndiaye pour l’affirmation de chaque personnalité esthétique. Un cri qui traduisait donc non pas la non existence de spécificités culturelles africaines, mais le refus d’une ghetto-isation et d’un folklorisme exacerbé de l’art fait par les Africains.

Iba Ndiaye est bien de son temps ! Sa présence plastique ne fait aucun doute au regard de l’écho que chacune de ses expositions continue de susciter auprès de ses contemporains et au regard de la fierté ressentie par ses cadets artistes chaque fois que l’itinéraire de cet homme est évoqué. Comme une boussole, Iba Ndiaye continue d’indiquer le sens de l’Art avec une passion du Vrai jamais démentie. Cette passion qui a habité Raphaël, Poussin, Vélasquez et qui fait que, quelles que fussent les variantes de leur style, leurs œuvres continuent de parler au nègre de la savane tropicale, au berbère de Kabylie ou au russe de Gorki. Qu’elles soient entendues… est un autre problème qui interpelle l’éducation esthétique de chacun et de tous.

Ce qui reste, est que la peinture de Iba Ndiaye autorise la formulation d’une esthétique pan-humaine qui se construira à partir d’un rejet des lourdeurs et des incohérences d’une classification de l’art en générations, en aires culturelles, en écoles, en mouvements. Parce que le domaine de la création artistique anarchique par définition, est un domaine de liberté qui ne saurait s’accommoder de « fidélités doctrinales », de « tendances » ou de la désignation d’héritiers. C’est un domaine qui encourage dans sa vie palpitante, que tous ses acteurs s’inscrivent dans une spirale de remises en cause constantes pour des découvertes infinies. A chaque artiste donc, à l’instar de Iba Ndiaye, de savoir se faire fils de tous les courants plastiques et de toutes les époques, mais en même temps, père d’une personnalité dont l’expression ne laissera intact aucun lecteur. A chaque public aussi de savoir fréquenter les créations artistiques pour que l’œil apprenne à regarder certes, mais à voir, surtout à bien voir.

BIBLIOGRAPHIE

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2 – Biennale des Arts (1992) : Catalogue Dak’Art 92 s.d ; 192 p. (1996) : Catalogue Dak’Art 96 s.d. 99 p. (1998) : Actes de la Biennale Dak’Art

3 – Blunt Anthony (1964) : Poussin. Lettres et propos sur l’art Paris, Hermann

4 – Catalogue (1966) : Premier Festival Mondial des Arts Nègres. Dakar, 1-24 Avril 1966, 127 p.

5 – Catalogue (1977) : Iba Ndiaye – Dakar Musée Dynamique, 32 p.

6 – Catalogue (1994) : Iba Ndiaye Paris,Sépia /NEAS 77 p.

7 – Daix Pierre (1968 : Nouvelle critique et art moderne Paris, Seuil 204 p.

8 – Delange J. et Leiris M. (1967) : Afrique noire. La création plastique Paris, Gallimard, 447 p.

9 – Diop Cheikh Anta (1959) : L’unité culturelle de l’Afrique noire Paris, Présence Africaine

7 – Daix Pierre (1968 : Nouvelle critique et art moderne Paris, Seuil 204 p.

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9 – Diop Cheikh Anta (1959) : L’unité culturelle de l’Afrique noire Paris, Présence Africaine

10 – Diouf Saliou (1999) : Les Arts plastiques contemporains au Sénégal Paris, Présence Africaine 239 p.

11 – Ducourant Bernard (1989) : L’art du dessin de Dürer à Picasso Paris, Bordas 192 p.

12 – Focillon Henri (1996) : Vie des formes, suivi de Eloge de la main Paris, P.U.F.131 p.

13 – Gaudibert Pierre (1991) : L’art africain contemporain Paris Cercle d’art 175 p.

14 – Gimpel Jean (1968) :Contre l’art et les artistes Paris, Seuil 204 p.

15 – Gombrich (1963) : L’art et son histoire, des origines à nos jours Paris, Julliard (trad. par J. E. Combe)

16 – Kaiser F. W. (1966) : Iba Ndiaye Nederland, Palais Lange Voorhout Eindhoven

17 – Leiris Michel (1992) : Un génie sans piedestal Paris, Fourbis

18 – Lier Henri Van (1979) : Les arts de l’espace Bruxelles, Casterman, 250 p.

19 – Millin A. L. (1808) : Dictionnaire des beaux-arts Paris Desray

20 – Ndiaye Francine (1995) : De l’art d’Afrique à l’art moderne Sisteron, Sépia, 90 p.

21 – Notes : Voir ci-dessus les références pour les ouvrages et articles cités.

22 – Panovsky ElWin (1967) : Architecture gothique et pensée scolastique Paris Ed. de Minuit (trad. par P. Bourdieu)

23 – Parramon José (1990) Le grand livre de la peinture à l’huile Paris, Bordas 191 p.

24 – Passero R. (1962) : L’œuvre picturale et les fonctions de l’apparence Paris Vrin

25 – Piles R. de (1715) Abrégé de la vie des peintres avec des réflexions sur leurs ouvrages et un traité du peintre parfait Paris, J. Estienne

26 – Présence Africaine (1967) : Colloque sur l’art nègre (Rapport du premier Festival Mondial des Arts Nègres Paris, Présence Africaine

27 – Présence Africaine (1999) : 50ème anniversaire de la revue Présence Africaine Paris, Présence Africaine.

28 – Revault d’Allones O. (1973) : La création artistique et les promesses de la liberté Paris, Klincksieck

29 – Revue noire (1993) : n° 7 Déc. 1992 Janv. 1993 Paris, Ed. Bleu Outremer 65 p.

30 – Sylla Abdou (1998) : Arts Plastiques et Etat au Sénégal Dakar, PSIC, 167 p.

[1] NDIAYE. Iba (1987) « A propos de l’art africain contemporain » : les écoles de Poto-Poto et Dakar » in Balafon n° 37. Oct. p. 37, 70.

 

[2] Cité par CAPPONE, mario (1994) « Un africain peintre » in Iba Ndiaye.Dakar-Paris, Neas-Sépias. p. 62.

[3] Portrait d’Anna (1962) – Huile sur toile. 116 x 80cm. Collection R. Lehuard.

[4] Le Trompettiste (1986) – Huile sur toile, 11 x 79 cm. Collection Marie Kiriloff.

[5] Savane en hivernage (1989) – Huile sur toile. 60 x 81 cm.

[6] Crépuscule (1983) – Huile sur panneau. 24 x 50 cm

[7] SIMS, Lowery (1982) “lba Ndlaye : Evolution of a style.” – New-York. Catalogue du Metropolitan Museum of art.

[8] La ronde à qui le Tour ? (1970) – Huile sur panneau, 250 x 150 cm. Collection de l’artiste. L’artiste nous a confié que cette œuvre avait été rachetée par lui-même, quand il a eu à constater que le collectionneur qui l’avait acquise n’en prenait pas soin comme il se devait.

[9] NDIAYE, Iba (1994) Iba Ndiaye. Op. cit. p. 66.

[10] FOCILLON. Henri (1996) Vie des formes suivi de l’Éloge de la main. Paris. P.U.F.. p. 112

[11] Ibid. p. 117.

[12] Le cri (1987) Lavis d’encre sur papier. 45 x 37.5 cm Collection Leroy

[13] Le droit à la parole (1976) Lavis d’encre su papier, 64 x 49 cm. Collection de l’artiste.

[14] La ronde à qui le tour ? œuvre citée.

[15] Cité par CAPPONE, M. « in africain peintre » peintre. Clt. P ; 58.

[16] Op. cit ; P : 58.

[17] Souma Dome, Gôrfitt. Du courage mon fils (1992) Encre de chine sur papier. Deux dessins faisant chacun 56 x 38 cm. Collection de l’artiste.

[18] Hommage à Bessie Smith (1986) – Huile sur toile. 130 x 195 cm. Collection de la Présidence de la République du Sénégal,

[19] Guiss Rapp (1991) – Huile sur taire. 100 x 65 cm. Collection de l’artiste

[20] SENGHOR. L.S. (1964) « L’esthétique négra-africaine » in Liberté 1 – Paris. Seuil. p. 202. 217.

[21] Le poète et sa muse (1966J – Huile sur toile. 130 x 195 cm. Collection de l’Université de Dakar. Faculté des lettres.

[22] Sahel (1993) – Huile sur tone, 97 x 130 cm. Collection Dr. Hélène Fox.

[23] Il faut souligner que l’idéologie coloniale a réussi à développer une vaste entreprise obscurantiste qui a réduit durant des siècles l’identité culturelle de l’Afrique à une sorte de ghetto oral. Toute une littérature paternaliste relayée par diverses écoles dites africanistes n’ont fait que perpétuer jusque dans les universités africaines post-indépendance, la confusion entre l’oralité – infime partie des valeurs de civilisations noires – et la plasticité caractérisent les ressources intellectuelles par lesquelles l’histoire était fixée, le présent magnifié et le futur symbolisé.

[24] PARET. Pierre (1977) « Iba Ndiaye à Royan » in Le Sud Ouest. n°23. Bordeaux. mars 1977.

 

[25] REITER. Barbel (1987) -Dans le champ de tension de deux cultures, un peintre sénégalais au Völkerkunde Museum de Munich Catalogue de l’Exposition

[26] LEIRlS, Michel (1964) « L’Afrique aux cent cultures » in France 0bservateur du 19 Novembre 1964.

[27] Cité par JOLIOT, Catherine (1969) « Entretien avec Iba Ndiaye, peintre et sculpteur sénégalais, in L’Afrique littéraire et artistique n° 11.

[28] NDIAYE. Iba (1987) « A propos de l’art africain contemporain : les écoles de Poto-Poto et Dakar » Op : cit. P. 37. 70

[29] Cité par CAPPONE. M. (1994) « Un africain peintre » op. cit.. P. 61.

[30] Cité par JOLOT, C. (1969) « Entretien avec Iba Ndiaye » Op. cit.

[31] – MEYER-PETIT, Judith (1974) « Peindre est se souvenir », in catalogue de la maison de culture d’Amiens.

[32] CESAIRE, Aimé (1966) Dédicace de Césaire à Iba Ndiaye, sur la page de garde d’un exemplaire du Cahier d’un retour au pays natal.

[33] Cité par JOLIOT, C. (1969) « Entretien, avec Iba Ndiaye » Op. cit,

[34] Cité par CAPPONE. M. « Un africain peintre » Op. cit.

[35] La femme qui crie (1986) Huile sur toile. 163 x 130 cm. Collection Africa Museum

[36] – SIMS. L. (1982) “Iba Ndiaye : Evolution of a style”. New-York ; Op. cit.

[37] Cité par CAPPONE. M. op ; cit. 38 – Op ; cit ; p. 65

[38] Op., cit ; p. 65

[39] SENGHOR. L.S. (1977) Catalogue de l’Exposition du Musée Dynamique de Dakar.

[40] NDIAYE. Iba (1987) « A propos de l’art africain contemporain » Op. cit.,

[41] Les femmes à la fontaine (1979) Huile sur toile en diptyque. 195 x 260 cm. Collection privée.

[42] Série de croquis en encre sur papier : ibo, dan, wé, eskimo.

[43] PLAZY, Gilles (1980) « Un safari dont l’homme est la victime » Préface du Catalogue de l’Exposition Le cri d’un continent. Maison de la Culture de Bobigny.

[44] VALERY, Paul « Discours en l’honneur de Goethe ». Variétés, Bibliothèque de la Pléiade I. p. 531.

[45] NDIAYE, Iba (1978) « A propos des Arts plastiques dans l’Afrique d’aujourd’hui ».Cahiers de la Maison de la Culture de Reims, Fev. 1978.