LA TERRE EST NOTRE ANGOISSE
Ethiopiques n°86.
Littérature, philosophie et art
2ème semestre 2010
Le crépuscule consume le vieux balcon
Où nos lèvres de vingt ans furent offrande
Et nos caresses, bouquets de folie.
Ce couchant que je vois à présent est une clarté
Qui s’éloigne de mon rêve, le chagrin d’un ciel
Qui cherche dans ta présence le lyrisme de la mer.
A présent, qu’ai-je besoin de soleil ?
Ton regard dans ma mémoire m’éclaire comme jamais
Astre n’a illuminé le monde. Fais-moi une place
Sous le portique de tes paupières,
Mon souffle s’enflamme, mon amour.
Au seuil du soir, c’est vers toi que s’envole ma pensée,
M’apportant au bout de l’exil absolu
La divinité de tes mains d’argile qui ne sont plus
Que poussière. Le soir m’arrache tant de souvenirs,
Je revois le bourgeon des étoiles dans ta première berceuse,
Les jasmins à tes pieds parfumant ta démarche et
Je redécouvre la nuit dans ton visage
Qui mesure l’horizon de ma tristesse.
Que la mort est cruelle !
Nos chagrins ne se sont pas dispersés dans le vent :
Depuis la naissance du soir,
Je t’écris un poème qui s’achèvera avec l’aurore
Car cette ombre dans tes yeux qui ne sont plus
Me dit plus long que mille fibres de lumière,
Que mille cordons de pluie…
La mort guette mes mots et froisse mon poème,
Qu’importe ? N’es-tu pas à m’attendre, seule
Au bout de mon voyage, les mains chargées de fleurs,
Le cœur plein de promesses, vêtue de blanc
Comme cette île martyre qu’enveloppe un clair de lune ?
Ne t’éloigne pas de mon corps, mon amour,
Ton ombre fleure le rosier qui éclot dans mes rêves. Ibnou BEYE