Culture et Civilisations

LEOPOLD SEDAR SENGHOR ET LA NEGRITUDE

Ethiopiques numéro 22

révue socialiste

de culture

négro-africaine 1980

Léopold Sédar Senghor et la négritude [1]

Je crois – si ma mémoire ne me trahit pas – que c’est le très séduisant écrivain français, Albert Camus, né sous le soleil d’Afrique, continent de lumière, donc de joie, de la joie de vivre, « la joie, la vraie joie, la joie sans maquillage, la joie nue, la joie originelle » [2] – oui, c’est certainement Albert Camus qui risqua ces mots sublimes : « Il est des heures dans l’histoire où celui qui ose dire que 2 et 2 font 4 est puni de mort » [3]

Tous les peuples, toutes les nations, certaines races, ont connu ces heures douloureuses, en un moment donné de leur évolution. L’angoisse, la souffrance ne sont l’apanage d’aucun peuple, d’aucune nation. Nous avons eu aussi – nous, peuples négro-africains – nous avons nos angoisses, nos inquiétudes, nos souffrances,nous avons connu des heures -qui-rongent, des heures – qui- tuent et ces maux, ces risques, ont tissé, entre nous, des liens de solidarité, ont forgé, pour nous, bon gré mal gré, un destin commun sur lequel il n’est guère nécessaire d’insister ici.

Tout se passe comme si, en ce bas monde, à toutes situations qui engagent la vie d’une communauté, en un moment donné de son évolution, Dieu répond, en désignant, de son doigt puissant, un homme ou un groupe d’hommes pour sauver l’Homme [4] C’est en pensant à de telles situations que la réflexion d’Albert Camus nous semble particulièrement émouvante.

Quarante années se sont écoulées depuis, pour la première fois, qu’un Nègre d’Afrique osa proclamer, à la face d’un monde alors hostile ou incrédule, la dignité de l’homme noir. Des sourires courtois s’ébauchèrent. Des rires violents éclatèrent. Des regards à la fois inquiets et inquisiteurs se braquèrent sur lui. Le Sénégalais Léopold Sédar Senghor venait de lâcher le mot de Négritude avec son ami, le grand Martiniquais, Aimé Césaire. Je pense encore à Camus, à l’éminent penseur de notre époque, si belle quant à son esprit créateur, si redoutable quant à ses actions quotidiennes.

Il est fréquent d’entendre dire que la Négritude est dépassée, parce qu’elle prêche un retour impossible à des valeurs désuètes, incapables de s’adapter aux réalités actuelles. Nous souscririons volontiers à cet argument si l’on parvenait à nous convaincre sur les deux points suivants, en nous prouvant le contraire :

– Aucune communauté humaine, aucun peuple ne peut vivre, pendant des siècles, sinon des millénaires, sans valeurs précises, réelles. Cette loi universelle n’épargne pas les peuples d’Afrique. Toute grande valeur, produit du laboratoire de l’homme, tout en prétendant à l’éternité, est tristement relative. Toutes nos valeurs, quelles que séduisantes qu’elles apparaissent, sont appelées à s’effriter, à se décomposer ou (et surtout) à se métamorphoser. Mais ces valeurs, bien que périssables individuellement, sont déterminées, en elles-mêmes et dans leur rapport avec les autres, quant à leur naissance, leur effritement et leur disparition, par un processus général de créativité, qui caractérise l’esprit du peuple – esprit sans cesse en mouvance. Ce qui est donc à sauver chez chaque peuple, c’est ce processus général qui le caractérise, qui constitue son apport à l’effort universel et qui, donc, constitue sa dignité.

– A examiner de près les différentes définitions que Léopold Sédar Senghor donne de la Négritude, on est surpris d’entendre des intellectuels africains rejeter ce concept avec une énergie parfois si violente qu’elle ne nous semble pas être dictée par la mauvaise foi, mais, certainement, par le malentendu. Qu’est-ce que la Négritude selon Senghor ?

De la négritude

« Elle est l’ensemble des valeurs de civilisation du monde noir, c’est-à-dire une certaine présence active au monde : à l’univers » (« la Négritude est un humanisme du XXe siècle, in « Liberté 3 »).

« La Négritude est fruit de la Révolution, par action et réaction ». (« Francité et Négritude », in « Liberté 3 »).

« Elle est enracinement en soi et confirmation de soi : de son être. La Négritude n’est rien d’autre que l’african personality des Négro-Africains de langue anglaise. Rien d’autre que cette « personnalité noire » découverte et proclamée par le mouvement américain du New Negro » – (id.).

En quoi peut-on dire que la Négritude est dépassée ? Pourtant, à sonder de près les préoccupations de nos intellectuels (partisans ou contempteurs de la Négritude), il est aisé de constater que, plus que jamais, le retour aux sources négro-africaines n’est aussi ardemment prêché. Témoin nos productions littéraires et artistiques, les différents thèmes des colloques et séminaires des universités africaines et occidentales ; témoin les directions prises par les chercheurs africains ; témoin le succès devenu, du reste, inquiétant, au plan politique, de la notion d’identité (raciale, ethnique, culturelle, nationale…) au point de menacer l’unité nationale de certains pays. Il semble que c’est plutôt le terme qui rebute les intellectuels, à cause, probablement, de la notion de couleur qu’elle renferme. Pourquoi nos frères anglophones, tout en acceptant le concept, préfèrent-ils à Négritude le terme d’african personality ? Pourquoi le Zaïre de Mobutu lui préfère-t-il le terme d’authenticité ? Pourquoi l’intellectuel africain de ce dernier quart du XXe siècle prêche-t-il, avec ardeur, le retour aux sources négro-africaines, tout en évitant de prononcer le terme de Négritude, sinon que pour le rejeter ? Ne s’agirait-il donc que d’une querelle de mots ?

La théorie de la Négritude est devenue, incontestablement, tant par l’action quotidienne de ses représentants que par celle de ses contempteurs, tant par les œuvres réalisées que par les réactions heureuses ou malheureuses qu’elles ont suscitées auprès des intellectuels et du grand public, la théorie de la Négritude est devenue un humanisme digne du XXe siècle finissant. En fait, de quoi s’agit-il ?

Il y a eu, chez nous, ce qu’on peut appeler la « grande Rupture ». Elle comporte deux phrases, l’une aussi tragique que l’autre.

Du XVe au XIXe siècles, plus de cent millions d’hommes [5] pour la plupart des adolescents, des êtres solidement bâtis, furent arrachés de force à l’affection des leurs. Ils sont devenus les hommes de la Diaspora, les hommes de la grande Rupture. On les éparpilla à travers le monde comme des produits exotiques, contre leur volonté et la volonté des dieux. Que de prières pour réconcilier l’homme avec l’homme ! Que de prières pour demander aux éléments de la Négritude d’intercéder auprès de l’homme qui niait l’homme ! Que de larmes versées aux pieds des dieux ébahis !

L’autre phase de la Rupture, certainement la plus inquiétante, parce qu’elle engage l’avenir de tout un continent, a consisté à nous empêcher de nous développer normalement, conformément à l’histoire de nos peuples [6] Qu’est-ce à dire ! Nous nous sommes vus contraints de renoncer à des habitudes, des modes de vie, de renoncer à nos manières d’être et de vouloir être ; de renoncer brutalement à des valeurs que nos ancêtres avaient laborieusement forgées, à travers des millénaires. Que nous a-t-on proposé à la place ? Certes, des valeurs qui ont fait leurs preuves, mais des valeurs forgées sous d’autres cieux, dans des situations qui nous étaient étrangères. En d’autres mots, cette Rupture d’avec notre être nous a empêché, pendant longtemps, de demeurer maîtres absolus de notre destin.

Comprenez donc que l’intellectuel africain, que le Nègre d’Afrique soit las d’être à la traîne de l’Autre ; qu’il soit allergique aux idéologies importées ; qu’il éprouve, comme une nécessité impérieuse, le besoin violent de penser et d’agir par et pour lui-même. C’est bien là la grande leçon que nous propose la théorie de la Négritude. Il nous fallait- il nous faut – un regard neuf sur nous-mêmes et sur nos réalités. Mais vers qui se tourner ? Par la théorie de la Négritude, Léopold Sédar Senghor nous propose le retour aux sources ancestrales, l’interrogation des valeurs séculaires de la Race. Retourner aux sources non pas pour récupérer les valeurs à jamais englouties dans le temps, par les exigences de la vie moderne, par l’implacable loi de l’évolution, mais aussi par la volonté du colonisateur ; retourner aux sources non par goût pour un passéisme béat et inopérant, mais pour nous découvrir et mieux appréhender l’avenir ; retourner aux sources pour prouver à l’Autre que nous avons participé, à notre manière, avec les moyens que la Géographie – le milieu – a mis à notre disposition, à la longue et pénible marche de l’humanité vers le progrès spirituel, intellectuel et matériel. Retourner aux sources, enfin, pour nous ressaisir de l’esprit créateur de nos peuples, fourvoyé par les surprises de l’Histoire, cet esprit qui, seul, est capable de nous ouvrir des chemins pleins de lumière, donc des chemins de la dignité et de la grandeur [7] Quel homme, quel mage indiqua ces chemins au poète sénégalais ? « Au moment que sévissait encore, au Quartier latin, la théorie du « primitivisme nègre » et de la « mentalité prélogique », nous révèle Léopold Sédar Senghor, un ethnologue – un savant allemand, doublé d’un philosophe – nous restituait notre vérité : notre dignité. Cette vérité est que, loin d’être inférieure à la « civilisation du fait » de la logique et de la raison discursive, la civilisation négro-africaine, appelée « éthiopienne » par Frobenius, est simplement autre. Elle aussi tient compte des faits, mais c’est pour les éclairer, en transparence, par l’énergie intérieure qui, en les transformant, leur donne un sens. C’est que Frobenius définit cette civilisation comme « civilisation du sens », du « réel » et de la raison intuitive. La qualité d’une civilisation tient donc moins à son histoire qu’à sa géographie, à sa nature plus qu’à son âge. Et, pour accomplir notre dignité, remarque Senghor, Frobenius assimile la civilisation allemande à la civilisation « éthiopienne » [8]

Vous devinez ce que Léopold Sédar Senghor doit au savant allemand ; mais, vous devinez également la très grande honnêteté intellectuelle du chercheur sénégalais.

En tous lieux, en toutes circonstances, il a toujours su rendre à César ce qui est à César [9] .

Enracinement et ouverture

Or donc, le voilà engagé, profondément engagé dans le combat. Comme il dira quelques décennies après, le combat a cessé faute de combattants. Il lui fallait provoquer une « crise de la conscience » à la fois chez le colonisateur et chez l’intellectuel africain, produit de l’Université occidentale. Et il insista d’abord, dans ses premières œuvres, sur l’enracinement dans notre identité, premier volet de la Négritude, avant de dégager les valeurs de l’ouverture à l’Autre, par souci de complémentarité, second volet de Sel théorie [10]

Pour un peuple longtemps dominé, longtemps fasciné par les valeurs étrangères, l’enracinement peut paraître redoutable, voire illusoire et futile [11] Ne serait-ce pas une tentative de vouloir nous faire assumer des valeurs mortes, nous traîner dans les ornières poussiéreuses des êtres et des valeurs qui ont à jamais vécu ? Question fréquente sous la plume des contempteurs de la Négritude. L’erreur fondamentale, commise par ces contempteurs, consiste à croire ou à faire croire que l’intellectuel africain, formé à l’Université occidentale, constitue la meilleure et l’authentique image de l’Afrique de nos jours et de demain. Grave illusion ! Car l’Afrique connaît encore plus de 90 % d’hommes et de femmes n’ayant pas fréquenté l’école occidentale, ne s’étant pas frottés aux valeurs intellectuelles de l’Occident. De quoi vivent-ils ces vivants, ces contemporains, ces hommes du XXe siècle, sinon des valeurs ancestrales ? Fascinés par les valeurs occidentales, pouvons-nous nous permettre, nous intellectuels formés à l’Université occidentale, de rompre impunément avec ces contemporains qui nous ont donné le jour ? Ne Devons-nous nous abandonner à l’illusion de penser que l’éducation parentale, le milieu social n’ont laissé aucune trace sur notre formation intellectuelle ? [12] Léopold Sédar Senghor, cet éminent universitaire, nous propose la voie de la sagesse : vivre en nous, vivre avec les nôtres, dans le respect de notre passé culturel. Il n’y a pas d’arbre qui pousse sans racines, sans sève. Il n’y a pas d’homme qui vive sans valeurs, sans culture. Il s’agit donc, pour l’universitaire africain, de retourner aux sources de vivre avec son peuple, dans la dignité et la gloire ou de rompre avec lui et de vivre, sans discernement, des valeurs que d’autres peuples ont élaborées pour répondre à d’autres exigences. Et Senghor de nous dire par la voix du Prince :

« Enfants à tête courte, que vous ont chanté les koras ?

« Vous déclinez la rose, m’a-t-on dit, et vos Ancêtres les Gaulois.

« Vous êtes docteurs en Sorbonne, bedonnants de diplômes.

« Vous amassez des feuilles de papier – si seulement des louis d’or à compter sous la lampe, comme feu ton père aux doigts tenaces !

« Vos filles, m’a-t-on dit, se peignent le visage comme des courtisanes

« Elles se casquent pour l’union libre et éclaircir la race !

« Etes-vous plus heureux ?

Quelque trompette à wa-wa-wa

« Et vous pleurez aux soirs là-bas de grands feux et de sang.

« Faut-il vous dérouler l’ancien drame et l’épopée ?

« Allez à Mbissel à Fao’y ; récitez le chapelet de sanctuaires qui ont jalonné la Grande Voie

« Refaites la Route Royale et méditez ce chemin de croix et de gloire.

« Vos Grands Prêtres répondront : Voix du Sang ! » [13]

On comprend que Léopold Sédar Senghor, devenu Président de la République du Sénégal, fonde sa politique sur les valeurs de notre peuple. On comprend que sa poétique et l’ensemble de son œuvre poétique attirent l’admiration du monde, puisque fortement enracinés dans les valeurs morales intellectuelles et sociales de notre peuple. Il a accepté de mourir à bien des privilèges que lui accordent les diplômes universitaires et la maîtrise de la langue d’emprunt.

Il lui fallait s’oublier pour panser les blessures infligées à la Race pour lui faire retrouver son équilibre antique. L’homme n’est pas une molécule capable d’être abandonnée à l’air ambiant ; il lui faut des racines pour pouvoir résister aux violences des tempêtes venues de loin. Il n’est pas dans nos intérêts, dans ceux de l’Occident, que des peuples, sur cette Terre, devenue si étroite, si petite, vivent, coupés de leurs racines vivotent, en se nourrissant des valeurs étrangères. Car ce serait la dépersonnalisation et un peuple sans personnalité, sans identité n’est pas un peuple mort, mais un peuple aux réactions imprévisibles, un monstre dont le voisinage est dangereux.

La Négritude, c’est donc, d’abord, l’enracinement dans nos valeurs sociales, culturelles, voire spirituelles. Je devine les objections ! Ne serait-ce pas de l’autarcie culturelle ?

Toute autarcie culturelle est mortelle. Oublions-nous déjà que l’autre phase de la Négritude est l’ouverture à l’Autre ? Léopold Sédar Senghor, le théoricien de la Négritude, en est parfaitement conscient. N’est-ce pas lui qui écrivait, en traitant le thème : « Négritude et germanité ? »

« Il y a aussi, il y a que seules m’intéressent les civilisations qui consomment à la mienne – à la Négritude- ou lui sont fortement étrangères. J’ai toujours eu besoin de m’enraciner dans mon identité ou de m’accomplir par complémentarité. Il en est ainsi des Nègres en général » [14]

En fait aucun peuple ne peut tenter de vivre, en ce XXe siècle finissant, dans l’autarcie culturelle. L’ouverture est un phénomène inéluctable – inéluctable comme les lois de la Nature. Et l’enracinen1ent, quant à lui, dépend exclusivement de l’expression délibérée de la volonté [15] Cependant, l’ouverture, qui s’accomplit de gré ou de force, a besoin d’être contrôlée. Et c’est par la rencontre et la fusion harmonieuses, parce que conscientes, des valeurs de l’enracinement et de celles de l’ouverture, que nous nous acheminons vers ce que Léopold Sédar Senghor appelle « la civilisation de l’Universel » – non la civilisation universelle comme le voulait l’Euramérique. Et le philosophe sénégalais de nous prévenir :

« Ce qui s’impose donc, en ce dernier quart du XXe siècle, c’est le Dialogue des cultures, pour parler comme Roger Garaudy, qui a décidé d’y consacrer le reste de sa vie ». « Ce mouvement de révolution culturelle » – et nous concluons par cette conclusion de Léopold Sédar Senghor – « ce mouvement de révolution culturelle, né dans les douleurs des conquêtes, des massacres et des déportations, grandi dans les hasards des voyages, des partages, des traités, il s’agit de l’organiser maintenant d’une façon rationnelle, et humaine en même temps : dans un dialogue où chaque race, chaque nation, chaque civilisation, recevant et donnant en même temps, chaque homme pourra, en se développant, s’épanouir en personne ».

Voilà un des multiples visages de la Négritude. N’est-ce pas bien là un humanisme digne du XXe siècle ? S’agit-il, sincèrement, d’une théorie dépassée, qui divorce d’avec les réalités de notre époque, comme le prétendent les détracteurs ?

[1] Conférence donnée à Florence, au mois de décembre 1979, à la Faculté des Sciences politiques, à l’occasion du séminaire organisé par le Centre d’Analyse des relations internationales, avec le concours du Ministère des Affaires étrangères, sur le thème : « Les idéologies et la politique extérieure ». Le texte suivant ne porte que sur l’aspect culturel du mouvement de la Négritude.

[2] Eza Boto (Mongo Béti) : « Ville cruelle », roman, Présence Africaine. Paris, 1971

[3] Cité de mémoire

[4] « Je sais (…) Que je bondirai comme l’Annonciateur, que je manifesterai l’Afrique comme le sculpteur de masques au regard intense… » Léopold Sédar Senghor (poème « A la mort », « Chants d’Ombre », in Poèmes) Ed. du Seuil 1964).

[5] Cf. « Histoire de l’Afrique » de Joseph Ki-Zerbo. L.S. Senghor, quant à lui, parle de 20 millions de déportés et 200 millions de morts. Cf. son discours à l’ouverture de l’Université des Mutants, 20 octobre 1978

 

[6] Nous ne prétendons pas que nous aurions pu nous passer des valeurs techniques de l’Occident. Mais nous prétendons que le processus normal de notre évolution (cf. note 1) intellectuelle, spirituelle, morale, technique, a été tragiquement arrêté par l’invasion des forces étrangères à l’Afrique. Nous vous renvoyons à l’importante œuvre de Roger Garaudy : « Comment l’homme devint humain », Ed. Jeune Afrique, 1978.

Les intellectuels les plus lucides savent aujourd’hui que l’immense œuvre qui fait en ce XXe siècle, la fierté de l’Occident est une œuvre que tous les peuples du monde ont patiemment élaborée et que ce n’est que dans une époque toute récente qu’elle fut récupérée par l’Occident.

[7] « Toute révolution véritable est retour aux sources : à l’homme vivant. Pour paraphraser André Gide, la littérature la plus nationale, la plus raciale est, en même temps, la littérature la plus universelle », Léopold Sédar Senghor, allocution à l’ouverture du « Colloque sur la littérature africaine d’expression française », Université de Dakar, mars 1963, in « Liberté 3 ».

[8] Léopold Sédar Senghor, « Liberté 3 », Ed. le Seuil, Paris 1977.

[9] « Frobenius, par sa prédilection pour l’Afrique noire, nous avait rendus à l’authenticité de la Négritude. D’où la ferveur que nous lui portâmes d’abord. Mais cette dignité recouvrée ne manqua pas de susciter un orgueil qui, parfois, faisait le racisme. En ouvrant à la Négritude une porte vers nos frères les autres hommes, le professeur penseur nous invite à la « convergence panhumaine », chère à Teilhard de Chardin. D’une négritude de ghetto, il nous aide à faire une « négritude ouverte » . Nous devions, à l’humaniste du XXe siècle, ce modeste hommage ». Léopold Sédar Senghor, « Liberté 3 ».

[10] La signification profonde de la térangasénégalaise (hospitalité) est que l’Autre n’arrive jamais à nous les mains vides : il est porteur de valeurs. Son séjour à nos côtés ne peut que nous enrichir. Nous vous renvoyons aux nombreux contes et nouvelles négro-africains qui traitent du thème de l’hospitalité : un étranger arrive dans une maison ; il est mal accueilli, à cause de son port vestimentaire très rudimentaire. Il quitte la maison. Après son départ, on se rend compte que c’était un génie ou un grand homme porteur de valeurs, de grâce. Il s’agit là d’un thème largement exploité par la littérature négro-africaine dite « traditionnelle ».

[11] Ce thème a été développé dans notre essai-anthologie : « K uma-Interrogation sur la littérature nègre de langue française », Nouvelles Editions Africaines, Dakar-Abidjan. 1978.

[12] Dans la perspective qui est, ici, la nôtre, ce témoignage de Léopold Sédar Senghor est éloquent : « Les griots du roi m’ont chanté la légende véridique de ma race aux sons des hautes kôras ».

[13] Léopold Sédar Senghor, Chants d’Ombre, in Poèmes, Editions du Seuil, Paris, 1964

[14] Introduction à « Liberté 3 », id.

[15] Que nous répondions présents à la renaissance du Monde.

Ainsi le levain qui est nécessaire à la farine blanche » L.S. Senghor (id).