Développement et sociétés

TRANSFORMATIONS SOCIALES ET IMPLICATIONS CULTURELLES

Ethiopiques numéro 34 et 35

revue socialiste

de culture négro-africaine

nouvelle série

3ème et 4ème trimestre 1983

volume I n°3 et 4

La recherche d’un équilibre harmonieux, c’est-à-dire l’adéquation entre les moyens et les faits, la pensée et l’action, l’être et l’avoir, l’essence et l’existence, a, de tout temps, préoccupé l’humanité. Tout se passe comme si l’on ne pouvait guère obtenir qu’un équilibre précaire, constamment menacé par le surgissement de contradictions nouvelles qui provoquent des crises plus ou moins profondes. Ce sont des crises d’identité, de croissance etc… dont le dépassement permet d’atteindre à un nouvel équilibre. Les bases de cette nouvelle harmonie diffèrent, au moins en partie, des précédentes. A travers les crises, les sociétés (comme les êtres) se développent : par acquisition, adaptation, élimination… Cet enrichissement consécutif à la résolution des diverses crises s’accompagne de transformations sociales. Puisque l’équilibre nouveau s’établit sur des fondements nouveaux, les valeurs qui rendaient compte, jusque-là, des rapports entre les hommes et la nature, entre les hommes et le divin, peuvent-elles demeurer valables ? En d’autres termes, les changements sociaux n’impliquent-ils pas nécessairement des changements de mentalité, de conduites ? L’installation d’une unité industrielle dans une zone rurale entraîne la transformation du marché du travail, produit une certaine mobilité de la population, amène des changements dans les mœurs et la culture de la communauté rurale. Qu’en est-il de certaines théories encours dans le Tiers-Monde et notamment en Afrique où l’on prône les valeurs authentiques comme idéologies, non seulement, de libération mais aussi comme moteur de développement économique et social ?

Les traditions de l’Afrique telles que ces idéologies en rendent compte, sont sur plusieurs points, en contradiction avec les méthodes de développement qui dominent le monde et, notamment, avec le mode de développement capitaliste qui est le plus répandu dans le continent même si, partout, il ne dit pas son nom.

Dans les pages qui suivent nous essayons de décrire sommairement les changements intervenus dans les sociétés africaines en montrant les principaux facteurs (colonisation, introduction de techniques de langues, de formes d’organisation nouvelles…) qui sont si solidement ancrés que l’essentiel des valeurs africaines a du mal à suivre là où ces changements sont déjà intervenus profondément.

Tout porte à croire que pour permettre à ces valeurs de s’épanouir, il faut leur donner des bases sociales et économiques nouvelles propres à un développement communautaire.

La greffe tradition-modernité n’a produit que de l’hybride et ne satisfait même pas ceux qui sont, matériellement, comblés. Ce que l’on gagne vaut-il ce que l’on perd ? Les acquis compensent-ils les pertes ? Il y a permanence d’un déséquilibre social causé par la superposition de deux civilisations différentes qui malgré les multiples points de rencontre ne se sont pas intégrées harmonieusement. Apparemment aucune symbiose ne se profile à l’horizon. Tandis que, sur le même terrain, rune progresse l’autre recule, malgré une forte résistance. Nous verrons comment la tradition survit dans les cités modernes. C’est la « ruse des valeurs » qui cherchent à s’exprimer dans diverses formes d’organisations sociales ou religieuses (mbootaay ou dahira ). Besoins de retrouvailles ou simple nostalgie de la vie communautaire dont les bases ont été démolies ?

Notre monde va-t-il changer de base ?

Si, comme nous l’affirmons au Sénégal la culture est au début et à la fin du développement, il nous faut créer des structures adaptées à notre conception de la vie, de la société et du développement communautaire. Des expériences sont tentées, mais la conjoncture n’est pas des plus favorables.

Tant que le Tiers-Monde continuera d’être intégré dans la division internationale du travail, telle qu’elle est actuellement, il restera à la traîne des pays industrialisés et l’Afrique ne connaîtra pas un développement viable, répondant à l’attente des africains. Exis­te-t-il une stratégie de rupture pouvant conduire à un développement endogène et communautaire ?

I – Les facteurs et agents du changement social

On appelle changement social « toute transformation observable dans le temps qui affecte d’une manière qui ne soit pas provisoire ou éphémère la structure ou le fonctionnement de l’organisation sociale d’une collectivité donnée et modifie le cours de son histoire ». Un changement social doit pou voir être identifié dans le temps à partir d’un point de référence dans le passé. A partir de là, on doit pouvoir dire ce qui a changé et dans quelle mesure ça a changé. Ainsi, de la colonisation qui a profondément modifié les structures et l’organisation politique et socio-économique des pays colonisés. De même, l’indépendance, avec le développement de certaines industries, du syndicalisme et des parties politiques, a constitué un changement social global.

Le changement social s’opère à travers des agents plus ou moins conscients qui agissent sur des facteurs sociaux.

Un facteur social est selon G. Rochet, un élément d’une structure qui, du seul fait de son existence ou de l’action qu’il exerce, entraîne ou produit un changement. Ainsi l’introduction de nouvelles techniques de production dans une usine peut entraîner des modifications dans les méthodes de travail, dans l’organisation des équipes ; même l’installation d’une usine dans une zone rurale entraîne la transformation du marché de l’emploi, produit une mobilité de la population, même des changements dans les mœurs, dans la culture et dans l’organisation sociale de la communauté rurale ».

Les agents de changement « ce sont les acteurs et les groupes dont l’action est animée par des buts, des intérêts, des valeurs, des idéologies qui ont un impact sur le devenir d’une société ».

Dans l’action historique les agents du changement privilégient certains facteurs sur d’autres. Les facteurs dominants semblent être le milieu physique, l’état des connaissances, le développement technologique, les croyances religieuses, les idéologies, les conflits, la race, la démographie… Existe t-il un facteur réellement dominant qui détermine les transformations sociales ? ou encore, dans l’histoire humaine, doit-on accorder plus d’importance aux idées qu’aux choses, aux facteurs culturels qu’aux facteurs structurels ? La réponse à cette question est loin d’être simple, claire et définitive. Comme le montrent les diverses approches que les philosophes et sociologues entre autres ont proposées

Le passage de la société traditionnelle fondée sur la solidarité mécanique à la société industrielle fondée sur la solidarité organique constitue une transformation radicale des sociétés. Cette transformation résulte, selon Durkheim, du progrès de la division du travail. « Lorsque dans une société la population est peu nombreuse dispersée sur un vaste territoire, elle peut survivre sans recourir à une division complexe du travail ». Des ressources relativement limitées et peu diversifiés (agriculture. élevage, chasse, pêche…) peuvent permettre aux groupes et familles de suivre. Cependant une importante augmentation de la population nécessite une division du travail social. Ainsi donc la démographie constituerait un facteur déterminant de transformation sociale.

Cette thèse, comme toutes celles qui privilégient un facteur sur tous les autres, révèle des faiblesses évidentes. En effet si la population s’accroît alors que les ressources et le développement techniques ne permettent pas de donner une relative satisfaction aux besoins résultant de cet accroissement, il est probable qu’on assiste à une régression plutôt qu’à un progrès. C’est pourquoi dans bien des pays sous-équipés, techniquement, et pauvres en ressources naturelles, on surveille la démographie pour éviter le surpeuplement.

Le marxisme a insisté sur le poids, tout particulièrement, des bases matérielles de l’économie comme facteur dominant dans les transformations sociales. Mais on sait que le matérialisme historique a mis surtout en évidence l’action réciproque de l’infrastructure sur la superstructure. Il reste que l’accent se place, incontestablement, sur le premier terme : « le facteur économique se voit attribuer la prédominance. » L’erreur provient selon le sociologique Henri Jane (dont les sympathies pour la pensée de Marx sont évidentes), en dernière analyse, de l’élaboration du raisonnement en terme de causalité classique ; la dialectique de Marx, dit-il, l’eût conduit à des résultats entièrement corrects, si elle avait été fondée sur le principe de corrélation entre les facteurs ».

D’autres théories privilégient la superstructure, l’idéologie, en un mot les facteurs culturels. L’action des hommes dans la société vise des buts ; elle est orientée par des intentions, des idées, des connaissances des projets que formulent et entretiennent les acteurs. C’est en fonction de ces connaissances et de ces buts que s’opèrent les options décisives sur le type de société, les orientations à prendre, les voies à rejeter… Ainsi les valeurs culturelles peuvent apparaître comme facteur dominant dans la mesure où elles s’incarnent « dans un système idéologique proposé comme explication et comme projet à l’ensemble d’une communauté ». Toutefois, il arrive qu’une idéologie parfaitement claire et cohérente, proposant un nouveau type de société reste sans grandes influences sur les transformations sociales. (Le Marxisme au Sénégal, jusqu’à présent).

Tout se passe comme si, à chaque cas particulier de transformation sociale, correspondait un facteur dominant qui peut relever de l’infrastructure ou de la super­structure. « Dans la sociologie contemporaine, écrit Guy Rocher, même ceux qui continuent à mettre l’accent sur un facteur particulier reconnaissent que le changement social est toujours le produit d’une pluralité de facteurs qui agissent simultanément et qui interagissent les uns sur les autres ». Il n’existe pas de facteur qui soit partout et toujours dominant. Aucun facteur n’est absolument déterminant dans la diversité des formations sociales et la succession des événements historiques. Le relativisme s’impose : l’étude concrète d’une situation historique déterminée permet de connaître le facteur dominant. Mais cette prédominance se trouve tempérée par la présence de facteurs « secondaires » dont l’existence crée ou achève la réalisation des conditions indispensables à l’accomplissement d’un changement social.

II – La société traditionnelle

La société traditionnelle africaine se caractérise par une organisation basée sur les valeurs communautaires. Ces valeurs se traduisent pratiquement par une solidarité matérielle et morale sans faille et à tous les niveaux. Une éducation conséquente y prépare la jeunesse et lui permet d’assumer pleinement son rôle. C’est un système éducationnel viable parce que global, cohérent et permanent qui intègre l’ensemble des activités sociales.

Selon l’âge ou le sexe, l’enfant suit les diverses étages de l’initiation dont le but est de l’intégrer harmonieusement dans la société.

L’individu apparaît comme « un centre de participation » où se retrouvent les ancêtres du clan les membres de la famille large, les compagnons de jeu et de travail, les initiés qui appartiennent à la même classe d’âge. Par conséquent, il ignore la solitude. Il ne se considère pas comme pouvant librement donner ou refuser son adhésion au groupe. « L’homme fait partie de sa classe d’âge, de son clan, de son village, il n’y adhère pas. Il ne choisit pas les grands moments de sa vie (circoncision, mariage) son groupe en a fixé le rythme et les modalités. Il n’existe que par et dans la communauté qui lui donne sinon la vie, du moins, la seule possibilité de la conserver ». (L.V. Thomas).

Le fait communautaire découle d’une conception de la vie fondée sur la recherche d’un équilibre harmonieux au sein du groupe ainsi qu’entre la société, la nature et le sacré.

L’homme qui vit en harmonie avec la nature entre dans les grâces de la divinité.

L’esprit communautaire se traduit dans la vie de tous les jours par le travail collectif (chasse, pêche, activités agricoles) dans les classes d’âge : Un groupe de la même classe d’âge peut travailler dans le champ de l’un de ses membres, qui n’aura que le repas du jour à offrir. Il arrive qu’un célibataire mobilise sa classe d’âge pour travailler dans le champ de sa future belle-famille. L’honneur exige, alors, qu’on cherche à se surpasser, le prétendant peut pousser l’ardeur jusqu’à mépriser la soif et refuser toute nourriture.

Dans la production comme dans la consommation, dans la joie comme dans l’adversité, (événements familiaux : deuil, baptême…) la solidarité morale et matérielle imprègne la vie de la communauté. Si la communauté ne jouit pas du minimum vital, il est du devoir de ceux qui ont des surplus, quelle qu’en soit la provenance, d’assurer la subsistance. Il est impensable d’accumuler des richesses pour en jouir, égoïstement, avec les seuls membres de sa famille quand les autres sont dans le besoin.

La nature des relations sociales exclut la lutte des classes. Ici pas de haine de classe « borom ngadd falle wul boroom pane ». Le lien de consanguinité réelle ou fictive est encouragé et loué par la tradition. L’accomplissement en commun d’une œuvre commune n’est que l’occasion de revivifier les liens de parenté, de solidarité et les sentiments qui fondent la communauté lignagère (L.V. Thomas). Ainsi les sociétés africaines avaient réussi à organiser la sécurité de leurs membres en créant des rapports sociaux qui ne favorisaient pas le développement de graves contradictions internes. Les grands défis à affronter provenaient, essentiellement, de l’extérieur et surtout de la nature : sécheresse, inondation, épidémie etc… Les contradictions sociales étant mineures, ces sociétés se sont figées dans ce qu’on a appelé « la sagesse africaine », parfois « refus du risque ».

III – Le choc des civilisations

  1. Contacts préliminaires

C’est par la côte atlantique que les Européens commencèrent leur pénétration en Afrique en remontant les cours d’eau et en installant des comptoirs de commerce sur les baies accessibles aux navires des trafiquants et des négriers. Selon Amadou Hampathé BA, les premiers Européens qui visitaient l’Afrique étaient considérés par les Noirs non pas comme des hommes, mais des esprits « fils de l’eau » qui ne prenaient une forme humaine que pour venir offrir aux habitants de la terre les merveilles qui se forgeaient dans leurs cités, bâties sous la mer ».

Avec l’installation des Blancs à Gorée (1617) cette légende cessera, progressivement, d’être valable pour les nègres de la côte, mais persistera à l’intérieur. On ne tarda pas longtemps à s’apercevoir que c’est l’appât du gain (or, défenses d’éléphant, peaux de fauves… et surtout « bétail humain ») qui attirait les Européens et les amenaient à multiplier les comptoirs et à s’installer sur le continent.

Avec l’occupation effective du territoire, apparaissent de nouvelles institutions administratives et politiques. Le commerce européen se développe. L’homme blanc impose aussi sa religion qui entre en conflit avec les religions traditionnelles, lesquelles cessent de s’épanouir là où le colonialisme s’installe. Les dieux locaux s’étaient laissé profaner sans qu’il en résultât de conséquences. Aussi beaucoup de nègres, surtout dans les grands centres, finirent-ils par perdre confiance en leurs divinités. Ils n’eurent qu’une idée s’européaniser et rapidement.

  1. L’assimilation

L’administration coloniale avait besoin d’interprètes et d’auxiliaires indigènes. C’est ainsi que des écoles ouvrirent leurs portes avec un programme conçu spécialement pour les Africains et dispensant une instruction élémentaire appelée « primaire indigène ». Le but de la scolarisation était d’occidentaliser les « sauvages » et de les convertir à la « vraie religion », dans l’espoir de les voir grossir les rangs des citoyens utiles au royaume (cf. lettres de Louis XIV et de Colbert aux Gouverneurs, aux intendants et au Clergé de la Nouvelle France les enjoignant de franciser les sauvages).

Cette école ouvrit des horizons, orienta les espoirs et forma les mentalités en les rendant plus sensibles à l’appât du gain, de l’aisance matérielle et politique dont le gage était « être citoyen ».

Le but visé par tous les scolarisés de l’école française était de s’affranchir et de ressembler, le plus possible, aux Européens. Le droit de « citoyen français » fut d’abord accordé aux habitants des quatre communes sénégalaises : Gorée, Saint-Louis, Rufisque et Dakar.

Toujours dans le but d’occidentaliser les nègres, une loi sur la naturalisation des sujets français fut promulguée. « Aux termes de cette loi, il fallait savoir lire et écrire et renier par écrit ses coutumes et traditions, divorcer d’avec ses femmes à l’exception d’une seule. Cependant les citoyens des quatre communes pouvaient épouser jusqu’à quatre femmes s’ils étaient nés musulmans ».

  1. Le réveil et le refus

Le mythe de la supériorité des Européens persista tant que les Noirs ne voyaient que les administrateurs et leurs subordonnés qui occupaient, partout, des positions privilégiées. Avec les deux guerres mondiales de nombreux Africains débarquèrent en Europe sur différents fronts. Ce fut pour eux, l’occasion de voir les Européens chez eux et de constater que « rien de ce qui est humain ne leur était étranger » ; pauvreté, infirmités, chômage, misère…

« Ils étaient des hommes avec toutes les qualités, mais aussi, tous les défauts physiques et moraux, qui caractérisent le fils d’Adam ».

Le mythe du blanc transcendant étant complètement ruiné, il n’était plus question de continuer à accepter d’être traités en inférieurs. « Ceux qui accomplissent les mêmes devoirs doivent avoir les mêmes droits » tel était le slogan pertinent des assimilationnistes.

Les revendications s’étendirent à tous les secteurs de la vie politique ; économique et socio-culturelle. Des marginaux (intellectuels, syndicalistes…) constituent des groupes d’études qui réfléchissent sur les rapports Afrique­Europe, faits de domination et d’exploitation ; ils dénoncent les injustices et revendiquent l’égalité. Mais l’égalité s’avère impossible entre colonisés et colonisateurs. C’est pourquoi, à mesure qu’ils rejetaient les valeurs occidentales qui justifiaient la domination et son cortège d’injustices, les Africains redécouvraient les cultures traditionnelles de leurs peuples. Ils reconnaissent leur différence d’avant les Européens et affirmait leur identité. Dès lors, la revendication d’égalité visait non plus l’assimilation, mais l’indépendance. La volonté d’indépendance s’exprimait à travers les slogans politiques mais aussi les actes de rébellion et de lutte de libération nationale.

L’évolution des idées et des événements eut raison des hésitations des colonisateurs et conduisit, petit à petit, à la souveraineté nationale.

IV – Mutations sociales et culturelles

« Le monde va-t-il changer de base ? »

Tout se passe comme si l’organisation de la production économique et des échanges secrétait son modèle de culture. Les pays nouvellement indépendants d’Afrique ont hérité du système colonial un type l’économie capitaliste qui se superpose au système de production traditionnel.

Le premier, lié à la naissance des centres urbains où vit l’élite intellectuelle occidentalisée est soumis aux règles d’économie de marché. Puisque ce type d’économie repose sur l’importation des produits étrangers pour la consommation des élites, elle apparaît comme parasitaire et « engendre des structures de sujétion et de dépendance, qui, pour satisfaire leurs besoins et leurs aspirations culturelles, se tournent résolument vers l’Occident. Il est peut-être temps de combattre le luxe et les futilités importés. L’autre type d’économie demeure agricole et artisanal. Comme nous l’avons vu plus haut, c’est une économie de subsistance, toutefois, face au dynamisme de l’économie de marché qui cherche à se généraliser, l’économie traditionnelle est obligée de s’ouvrir à des échanges, limités, certes, mais indispensables.

Devant sa concurrente, elle apparaît, de plus en plus, faible et la culture qu’elle secrète, de plus en plus, inapte à répondre aux besoins nouveaux de la collectivité et aux agressions extérieures. Les techniques modernes de production importée du monde industrialisé, d’Europe et d’Amérique, surtout.

Au nom de la productivité, de la rentabilité et de l’efficience, les traditions populaires, l’artisanat et les métiers traditionnels végètent ou régressent.

Comme les métiers constituaient des sources de cultures authentiques, leur disparition progressive et, apparemment, irrémédiable provoque des implications culturelles dans les traditions auxquelles ils avaient donné naissance et qu’ils illustraient réciproquement (Bakk, kanou, xass). Alors s’opère une rupture profonde d’avec les valeurs ancestrales. Cette rupture sans être brusque, est manifeste dans la distorsion ville-campagne et traduit la différence entre les économies urbaines et rurales.

Dans les communautés villageoises, la misère était socialisée, humanisée, domestiquée et rendue supportable ; elle ne causait pas de désespoir : la morale et l’idéologie sociales permettaient de la supporter dignement, car personne n’était méprisé pour sa pauvreté, sauf quand elle était le résultat de sa propre paresse. Dans les centres urbains, il en va, souvent, autrement. Le triomphe du « matérialisme » s’exprime dans la recherche du gain rapide, la lutte pour la réussite, le désir d’accumuler des richesses matérielles, d’en imposer aux autres, même par des moyens illégaux : « récolter où l’on n’a pas semé » (enrichissement illicite). Où sont enfouis les sentiments de solidarité, d’honneur et de devoir ? Le mot d’ordre semble être « enrichissez-vous ». Et l’efficacité apparaît comme la mesure de tout acte, le critère qui fait le départ entre le bon et le mauvais. « Est bon ce qui réussit, mauvais ce qui échoue ». L’acte est dit efficace lorsqu’il atteint le but visé. La morale n’intervient pas dans la détermination du but : c’est l’intérêt égoïste au poste de commande. L’homme devient un loup pour l’homme. Dans notre continent aussi, l’argent est entrain de devenir la mesure de toutes choses.

L’économie monétaire, l’industrialisation et l’urbanisation font naître de nouvelles valeurs et distendent les liens de parenté. L’instruction introduit des clivages dans les familles étendues et les fait éclater. Les allégeances tribales, les attaches entre personnes originaires d’un même village ou d’une même région se relâchent plus ou moins selon la conjoncture politique et sociale et parfois se reconstituent sur des bases nouvelles (clientélisme, amicales). Si les liens de parenté demeurent leur expression est de moins en moins obligatoire.

« Les organes s’atrophient ou deviennent plus forts ou plus subtils selon que le besoin qu’on a d’eux croit ou diminue », il en serait de même des valeurs culturelles.

De même que les activités professionnelles traditionnelles étaient sources de valeurs, de même les activités professionnelles modernes secrètent des valeurs ou s’organisent selon des valeurs souvent différentes, mais, pas nécessairement, supérieures ou inférieures. Leur opérationnalité les rend valables, à travers leur efficacité.

Ceux qui, dans les villes, sont habitués à consommer le produit du développement des sociétés occidentales, sont souvent amenés à penser que le développement culturel consiste à adopter purement et simplement le modèle de ces sociétés, considérées comme système de référence absolu. Comme si les pays sous­développés devaient, nécessairement, mais seulement au terme d’une longue genèse, assimiler la culture des sociétés occidentales développées en adoptant leur modèle de développement. C’est à croire que le même modèle de développement économique implique le même modèle de société et de culture. Par conséquent nos cultures traditionnelles issues d’un modèle de développement socio-économique bien déterminé ne peuvent rester identique si ce modèle générateur se transforme. Il est certain qu’il n’y a pas de culture statique, cependant le problème de l’authenticité se pose.

Une économie puissante est, en principe, porteuse (soutien et illustration) d’une culture dynamique qu’elle véhicule et fait pénétrer partout où elle se développe. C’est pourquoi la consommation des produits importés ne saurait être neutre. Une économie faible et stagnante est porteuse d’une culture qui peut être riche, mais limitée faute de moyens d’expression et d’expansion. Ne pouvant pas se faire connaître et apprécier, elle résiste mal à la concurrence et ne se maintient qu’avec difficultés dans son milieu d’origine. Elle est de plus en plus sous­estimée et déconsidérée, sinon rejetée par les couches les plus dynamiques et les plus ouvertes de la population qui règlent leurs problèmes en dehors d’elle, sans se référer à elle.

Qu’est-ce qu’une richesse qu’on ne peut pas faire fructifier et dont on ne peut jouir ? L’expérience des anciens n’éclaire pas les voies nouvelles. On ne fait appel à elle que pour se défendre contre l’envahissement arrogant et menaçant de l’étranger. Mais comme on l’a dit plus haut, un organe qui ne sert plus s’atrophie, de même les valeurs qui ne servent plus s’étiolent et disparaissent. Par conséquent la sauvegarde des valeurs passe par une organisation sociale et économique qui leur permette d’être vécues et qui favorise le développement de leurs lignes de force. Dans l’élaboration de la charte culturelle nationale il conviendra de penser à doter le Sénégal de structures de participations conséquentes en vue d’un modèle endogène de développement.

Ainsi le développement culturel de notre pays ne se réduira pas à la création et / ou à la promotion de certains arts : cinéma, théâtre, littérature, sculpture architecture, musique, danse… et à l’édification de « tombeaux de la culture » ; pompeusement baptisés musées, que les populations censées être concernées ne visitent même pas.

V – Une culture du développement

Les sociétés traditionnelles africaines sont des sociétés de subsistance peu tendues vers la mobilité sociale et la diversification d’activités de production. Il y règne un esprit dominé par la conservation des acquis et tourné plus vers le passé que vers l’avenir : faire comme les ancêtres ont toujours fait, vivre selon leur exemple plutôt que d’innover. Le développement de l’esprit inventif n’est pas particulièrement favorisé. L’expérience des anciens est la référence.

La créativité suppose l’acceptation de remise en cause, dans plusieurs domaines, de ce qui a toujours été, donnant la possibilité de concevoir et de réaliser de nouvelles associations dans les secteurs les plus divers. « Vous les jeunes ne vous laissez pas enterrer par les vieillards. Mettez-les sous terre avec leur égoïsme. Que de rêves brisés, que d’ambitions avortées pour avoir écouté les conseils d’un aîné (dépassé) ».

Les rapports avec la nature ne peuvent être véritablement harmonieux que si l’homme comprend les lois de la nature et organise sa vie en conséquence de ses besoins réels. Dans les sociétés traditionnelles fondamentalement dominées par la pensée religieuse, le mode de connaissance est la pénétration sympathique, intuitive, en un mot, la participation. Ce mode de connaissance a ses limites. Les pratiques magico-religieuses qui l’accompagnent ont révélé leur inefficience dans la solution des problèmes sociaux qui nous paraissent les plus importants actuellement. Ces problèmes se posent à d’importants groupes sociaux et ne peuvent pas se résoudre par des remèdes singuliers ne concernant que quelques individus. Ils réclament des solutions générales, rationnelles et efficaces.

Les incantations liées aux différents cultes, la participation sympathique, la recherche de l’harmonie avec les choses de la nature ne contiennent pas les solutions des problèmes de l’heure qui se résument en un mot : sous-développement. Le culte du feu peut-il survivre malgré l’introduction de l’électricité ? La signification des semailles et des récoltes change nécessairement avec les techniques qui procurent l’abondance. Si les centres d’initiation se vident progressivement, c’est parce que le type de savoir qu’ils dispensent ne répond plus correctement aux besoins nouveaux, aux préoccupations actuelles. De même qu’on exige l’adaptation de l’école moderne à la vie actuelle, de même la tradition mérite si possible, d’être réajustée à la vie du temps présent.

La méthode rationnelle d’acquisition de la connaissance exige l’analyse, donc la décomposition, la séparation avant la recomposition qui est une synthèse. Le sujet connaissant ne peut s’empêcher de prendre une certaine distance vis-à-vis de l’objet à connaître. Il le découvre, le dévoile, en brise, s’il le faut, l’unité, avant de le recomposer. C’est ainsi qu’il le pénètre en l’expérimentant et le connaît en le comprenant. Il ne naît pas avec lui, il le prend avec lui, il l’intègre, il l’assimile plutôt que de se fondre en lui. La connaissance nécessite une initiation, mais c’est un apprentissage dépouillé, de plus en plus de l’ésotérisme traditionnel. La raison à l’œuvre ne se reconnaît aucun maître et considère toute limitation comme obstacle provisoire. C’est un instrument dont il faut se servir dans l’organisation du travail comme dans celle de la collectivité. Le développement de l’esprit scientifique et le travail acharné pour le bien-être de la communauté sont indispensables pour résoudre les problèmes du développement. Quelque soit le type de société à bâtir, la participation active, consciente et enthousiaste de toutes les couches de la population est nécessaire. La participation des femmes au développement déborde les activités ménagères de toute part. Il n’y a pas que l’école moderne et l’emploi salarié pour les jeunes. L’imagination créatrice, l’esprit d’entreprise et d’innovation sont devenus indispensables.

Ainsi certains diagnostics dont l’expérience a montré le caractère simpliste doivent être réputés inexacts, afin de permettre de progresser vers la résolution des problèmes qui continuent de se poser avec acuité. . Par exemple, on a souvent entendu les animateurs socio-culturels (responsables à des degrés divers de mouvements de jeunes) avec l’enthousiasme et le désintéressement qui les caractérisent, dire que la jeunesse est livrée à elle-même, sans encadrement adéquat, ce qui la pousse à des activités malsaines. Selon eux, il suffirait de créer des centres de cristallisation, des foyers d’animation, d’organiser des activités sportives et de jeunesse, de remettre à l’honneur les fêtes et jeux traditionnels pour freiner l’exode rural.

Il ne semble pas que la réactivation des manifestations et jeux traditionnels, ainsi que la multiplication des foyers de jeunes puissent redonner à nos campagnes leur animation d’antan et suffire à y maintenir les jeunes.

En effet, l’exode rural découle moins d’un manque de distractions que d’une situation économique insatisfaisante dans un environnement peu clément.

Le maintien des jeunes dans les campagnes va avec l’amélioration des conditions d’existence : l’intensification et la généralisation des efforts tendant à la formation des jeunes ruraux et à leur regroupement en associations de producteurs dans les domaines de l’élevage, de la pêche, de l’agriculture, de l’artisanat… et en les aidant à ces activités.

Il reste que la maîtrise de ces techniques qui procurent sinon l’abondance, du moins l’autosuffisance, s’accompagne d’un changement de mentalité. La signification des semailles et des récoltes change avec les méthodes culturales modernes. Si, par ailleurs les centres traditionnels d’initiation se vident progressivement c’est parce que le type de savoir qu’ils dispensent ne répond plus correctement aux besoins nouveaux et aux préoccupations actuelles.

Les valeurs d’une société (attitudes religieuses, orientations philosophiques…) peuvent favoriser ou retarder le développement de la science et de la technologie. C’est ainsi que Robert K. Merton, confirmant l’analyse de Marx Weber peut dire que l’éthique religieuse qui découlait de l’enseignement de Calvin favorisait un état d’esprit et une orientation à des valeurs qui invitaient à la poursuite des sciences naturelles.

Ce qui précède montre bien que si, dans les transformations des sociétés du Tiers-Monde, la technologie constitue une « variable lourde » (l’industrialisation s’accompagne d’un changement de mentalité, d’attitude face à la nature, d’une modification de la conception du temps et même des rapports entre les humains, son influence réelle ne peut s’apprécier qu’en fonction du contexte culturel ou elle s’implante. En effet, la technologie relève en même temps du monde des choses (infrastructure) et de l’univers de la pensée, des attitudes et des valeurs (superstructure). On pense que c’est le renforcement mutuel de la morale protestante et de la culture de la classe bourgeoise qui a favorisé, aux XVIIe, XVIIIe et XIXe siècle le développement de l’esprit scientifique et de la technologie et a fait de la société occidentale ce qu’elle est devenue actuellement.

Tout ceci invite à une attitude critique par rapport à l’héritage socio-culturel. La réactivation des fêtes traditionnelles peut être considérée comme partie intégrante de la sauvegarde du patrimoine culturel national. Cependant, il faut étudier de manière approfondie, l’esprit qui sous-tendait telle ou telle manifestation religieuse ou profane et voir dans quelle mesure il ne s’oppose pas à l’unité nationale, à une vision du monde plus large, une compréhension plus grande et plus scientifique de la nature et de l’évolution des sociétés humaines.

C’est ici que les principes de l’enracinement et de l’ouverture prennent tout leur sens et méritent d’être bien compris dans leur mouvement dialectique, faute de quoi, s’installe une impasse pouvant entraîner un rejet des valeurs traditionnelles.

Les transformations qui s’opèrent chez nous et en nous, parfois malgré nous, exigent le développement de l’esprit inventif, l’innovation suppose l’acceptation de remises en cause, dans certains domaines, ouvrant ainsi la possibilité de concevoir et de réaliser de nouvelles associations qui, dans les secteurs les plus divers, favorisent la marche en avant à partir de nos propres réalités.

Pour un nouvel ordre culturel national, des choix lucides s’imposent.

L’essentiel demeure la définition du type de société que l’on veut construire. Une fois l’option faite et les orientations précisées, il faut, compte tenu de toutes les pesanteurs, mobiliser l’ensemble des ressources humaines et matérielles pour son édification.

Au Sénégal, nous voulons bâtir une société socialiste basée sur nos valeurs fondamentales : solidarité matérielle et morale, opiniâtreté et persévérance dans le travail, justice et paix.

Il est désormais reconnu que les systèmes sociaux et économiques, le niveau de vie plus ou moins élevé, le progrès en général, ne sont pas uniquement des faits objectifs. Ils découlent, en partie, de certains choix de valeurs, de certaines conduites, de certains modes de vie.

Notre option socialiste implique un mode de vie et des conduites qui valorisent et honorent l’homme. Par conséquent, tout le transfert de technologie moderne doit tenir compte de ces valeurs dans lesquelles nous avons choisi de nous enraciner et qui, fort heureusement, ne s’opposent pas à l’épanouissement de l’esprit scientifique.

Ainsi se trouvent justifiés les principes de l’enracinement et de l’ouverture, fondement de notre politique culturelle.

Si dans la conjoncture difficile que nous traversons la priorité est accordée à l’économie, la primauté reste à la culture sans laquelle un développement endogène intégral est inconcevable.

L’idée se répand que les voies de développement suivies par les Etats africains, depuis l’indépendance, n’ont fait que les intégrer davantage dans la division internationale du travail. Dans ce système, ils jouent comme la plupart des Etats du Tiers-Monde, le rôle de carrière de matières premières destinées à l’usine de production des pays industrialisés. Les revenus tirés de ce commerce n’ont pas permis de jeter les bases d’un développement réel. Depuis quelques années, la détérioration des termes de l’échange rend caduc tout espoir d’un décollage économique rapide. Sans doute existe-t-il certaines conditions indispensables au décollage : des institutions financières (banques) fonctionnement les investissements augmentent, le commerce se développe et des usines s’installent. Cependant ces conditions ne sont pas suffisantes. Les mutations ne concernent qu’un secteur restreint de la population et de l’activité économique à l’intérieur d’une société qui demeure traditionnelle et dont la productivité générale reste faible. La croissance exige que cette économie de faible productivité qui ne répond pas aux besoins essentiels de la vie et qui n’assure même pas une consommation locale suffisante à court terme, se transforme en une économie de production industrielle.

Mais, comme on le sait, l’industrialisation des pays sous-développés se heurte à des obstacles majeurs.

– Les capitaux nécessaires aux investissements font défaut. Il semble indispensable de faire appel à des capitaux et des techniques venus de l’étranger. Et plus les investissements étrangers sont considérables dans l’économie, moins le pays est souverain, c’est la porte ouverte aux diverses formes de néocolonialisme économique, culturel, social et politique.

– Une main-d’œuvre abondante et bon marché existe, mais elle n’est pas préparée aux emplois disponibles.

– L’industrialisation doit s’accompagner de la formation massive de personnels compétents. Il faut assurer l’instruction après en avoir défini les orientations. Or les systèmes éducatifs ne semblent pas chercher à répondre aux besoins du développement. L’analphabétisme et l’ignorance entretiennent le sous-développement.

Pourtant des moyens réalistes ont été proposés en vue de réduire considérablement, sinon supprimer définitivement ce fléau. Citons, entre autres la possibilité offerte aux Etats d’exiger que chaque candidat au baccalauréat fournisse une pièce montrant que, durant son cycle secondaire, il a alphabétisé cinq personnes au moins.

Une culture de développement est nécessairement une culture capable d’animer les populations laborieuses de soutenir leurs efforts. Par conséquent, elle doit être véhiculée, principalement, par les langues nationales, afin de bien éclairer les actions du véritable développement, lequel ne se mesure pas seulement en croissance du taux de la production brute, mais aussi et surtout, en amélioration générale des conditions d’existence en fonction d’un idéal social.

Cet idéal doit imprégner l’ensemble de la vie sociale et orienter les rapports entre les membres de la société. Il privilégie des valeurs comme la solidarité (matérielle et morale) le travail, l’effort persévérant, la justice et naturellement la paix (jam : ca la lepp xej).

Une culture du développement favorise l’épanouissement de l’esprit scientifique, en admettant des remises en cause et des réajustements. C’est une culture dynamique et ouverte apte à susciter et à assumer les innovations tout en sauvegardant les valeurs essentielles.

Ainsi se trouvent sauvegardées la sécurité morale, matérielle et sociale, de même que la responsabilité, grâce à la participation du grand nombre (sinon de tout le monde) à la conception des idées et à l’élaboration des projets de développement.

Dans un pays sous-développé la sécurité, passe aussi par la satisfaction des besoins fondamentaux : d’abord, manger, se vêtir, s’éduquer, se loger. Il est nécessaire de retrouver l’autosuffisance alimentaire qui, dans les villages traditionnels assurait un réel équilibre (parfois précaire) qui protégeait de « la hantise du lendemain ». Les cultures céréalières, justement, appelées cultures vivrières, détrônées par les cultures industrielles d’exportation, sont en train d’être revalorisées en vue d’une reconquête de l’autosuffisance alimentaire, base d’une relative tranquillité (aussi bien morale, matérielle que spirituelle).

La conquête coloniale avait créé un traumatisme et nous avait fait douter de nos valeurs. En établissant les bases d’un développement cohérent, on favorise un enracinement lucide, indispensable au dialogue fécondant, qui permet les comparaisons et les choix libres parmi toutes les solutions proposées à nos difficultés.

L’intérêt national bien compris commande la solidarité dans l’élaboration et la mise en œuvre de certaines grandes idées, de certains projets, dont la réalisation accroît la prospérité des masses travailleuses et s’accompagne ou favorise l’acquisition de connaissances et de techniques plus efficientes parce que mieux adaptées à leur objet.

Il ne s’agit pas d’entretenir n’importe quelle forme d’organisation sociale sous prétexte que la diversité est source d’enrichissement. A travers les transformations, c’est l’esprit d’une culture qu’il faut sauvegarder, afin qu’elle anime et éclaire notre marche en avant vers la prospérité et le bonheur.