Culture et civilisations

LE THEME DE L’IDENTITE CULTURELLE ET SES VARIATIONS DANS LE ROMAN AFRICAIN FRANCOPHONE

Ethiopiques n° 42

Revue trimestrielle de culture négro-africaine

3e trimestre 1985 volume III n°3

Auteur : Mohamadou KANE [1]

 

Je commencerai cet exposé par confesser mes manquements à l’usage. D’abord, aucune définition de l’identité culturelle ne sera donnée, ici, au risque de porter atteinte à une tradition académique solidement établie. Le thème de l’identité culturelle se situe au cœur de la littérature africaine. Il y commande tout, il permet de rendre compte de tout. En outre, l’identité culturelle a fait l’objet de tant de tentatives éclairantes de définition, à la suite des poètes de la négritude, qu’il nous paraît plus commode de tenir ce concept pour acquis.

Ma désinvolture ne s’arrêtera pas là, car il ne sera pas question ici des corollaires nécessaires de ce thème, à savoir l’affirmation, la défense, l’illustration de l’identité culturelle. Autant de rubriques qui de toute évidence participent de litanies d’un autre âge.

Situant plus fermement mon propos dans le logique de ces prises de position, j’examinerai le thème de l’identité culturelle non pas dans la poésie africaine, la poésie de la négritude – ce qui a été fait et refait – mais dans la mouvance du roman africain. Il est singulier que, dans la littérature africaine, le roman ait été si longtemps à la remorque de la poésie, qu’il se soit bien souvent contenté de prolonger des thèmes originaires de la poésie. Cela reste d’autant plus vrai, ici que le thème de l’identité culturelle ne peut pas être séparé de l’école de la négritude dominée par les poètes, que ce sont ces derniers qui ont les premiers et avec le plus d’éclat magnifié l’identité culturelle à la lumière des travaux des africanistes. Si bien que l’on a perdu de vue le dynamisme, la souplesse, l’adaptabilité du roman qui, s’il n’a pas joué, ici, un rôle initiateur, a conféré à ce thème une dimension plus large et même rendu compte de son dynamisme. L’identité culturelle que les poètes exaltent est une chose immuable, immémorable, défiant le temps et les événements, dans un splendide isolement. L’identité dont parlent les romanciers est historique. Elle est une référence, un stimulant, elle est partie intégrante et peut-être un élément moteur du devenir culturel. Les gens meurent ou échouent pour l’avoir voulu occulter ou ignorer, d’autres se déterminent en toutes occasions en fonction d’elle.

Tout cela légitime le choix d’examiner ce thème dans le roman et non dans la poésie, non pas dans le dessein d’opposer ces deux genres mais pour montrer combien les romanciers, dans l’exploration de ce thème, prolongent l’action des poètes tout en sauvegardant leur originalité et comment le thème de l’identité devient central dans le roman ou glisse à l’arrière-plan. Il reste cependant partout présent.

L’un des paradoxes du roman africain réside dans la place qui y est dévolue au thème de l’identité culturelle et dans ses variations. Faut-il rappeler que le roman africain semblait n’avoir pas d’autre vocation que de prolonger le roman colonial français, d’en donner comme une version africanisée. Il n’y a pour s’en convaincre qu’à relire Roland Lebel [2] ou Mme Martine Astier-Loufti [3]. Le roman africain devait dans une très large mesure participer au courant exotique abondamment exploité par le roman colonial. Sa mission était de décrire la vie africaine, de souligner l’étrangeté des mœurs, la barbarie des coutumes, la violence des révoltes comme la sincérité des conversions.

C’est par l’exotisme, ce goût du singulier, de l’extraordinaire, l’abus du romanesque – et l’africanisme aidant – que l’identité s’imposera au roman africain pour finir par y occuper le premier rang.

On assiste comme au gauchissement – c’est le cas de le dire- du profil romanesque attendu par le public français des années 1920 et 1930. Le roman devait servir à la révélation des modes de vie, de coutumes, de croyances – pour le moins fantastiques des Noirs. Mais voilà, ces éléments que l’on tenait pour disparates, abracadabrant, les preuves patentes de la barbarie et de l’incurie des Noirs, une lecture africaniste les investit d’une cohérence et de significations singulières :

Mais c’est aller vite en besogne, procéder par raccourcis, résumer de façon cavalière une réalité plus complexe. L’identité n’a pas toujours occupé le premier plan dans le roman. Son rôle dans la thématique romanesque n’a pas toujours été déterminant. Les romanciers ne l’ont pas toujours perçu comme un thème positif à même d’engendrer un quelconque progrès.

En vérité, ce thème devenu par la force des choses central, dans le roman, est passé par des variations remarquables. A l’origine, il a été comme occulté, passé en second plan. Les romanciers comme le public, accaparés ailleurs semblaient ne se préoccuper que des rapports nouveaux que la conquête coloniale allait imposer aux Blancs comme aux Noirs. Disons qu’il s’agit de la phase de l’identité culturelle occultée. Ensuite l’africanisme réussit son entreprise de revalorisation des cultures africaines et le thème de l’identité culturelle se trouve porté au premier plan de l’investigation comme de la création littéraire. C’est la phase de l’identité culturelle revendiquée, illustrée, magnifiée par l’école de la négritude. Lorsque l’accession à l’indépendance des anciennes colonies françaises se traduit comme par une baisse de tension culturelle et change le rapport du public africain et de son passé, le thème de l’identité se trouve comme placé sous un éclairage qui en favorise et tout à la fois légitime l’examen critique, pragmatique. C’est la phase de contestation du concept de la négritude et de l’identité éclatée ou en question.

 

On le voit tout débouche sur ce concept s’il n’en est pas l’initiateur. Il est si présent, important, qu’il permet une périodisation de l’histoire du roman africain. C’est d’ailleurs par ces trois phases que ce problème sera abordé.

Dans la première phase, qu’il est loisible de faire partir du milieu du siècle dernier, pendant que la conquête coloniale est loin d’être achevée, que l’Afrique reste encore mal connue et que l’opinion française friande d’exotisme s’interroge sur l’opportunité, la légitimité et la rentabilité de ces opérations périlleuses menées aux antipodes des Africains font leurs premiers pas dans la production littéraire moderne. Ce sont des métis de Saint-Louis qui publient des ouvrages de vulgarisation pour mieux faire connaître la colonie, du Sénégal et ses problèmes. En 1853, l’Abbé Boilat publie Esquisses Sénégalaises [4], en 1855 Paul Holle et Frédéric Carrere donnent De la Sénégambie française [5]. Ces œuvres, destinées à un public exclusivement français, sont des oeuvres de circonstances tant elles correspondent aux préoccupations du moment. En effet, il ne s’agit de rien d’autre que de présenter la colonie et ses habitants, de donner à ce sujet le plus d’informations possibles. Le préfacier de la récente édition d’Esquisses Sénégalaises ne s’y est pas trompé qui qualifie cet ouvrage de « document ethnographique… qui enrichit nos informations sur les populations du Sénégal au milieu du XIXe siècle ». Il en décèle du même coup le « projet idéologique ». L’Abbe Boilat, métis sénégalais, donne des réalités culturelles de son pays une lecture marquée par l’idéologie du moment et les projets politiques en cours d’élaboration.

C’est peut-être Roland Lebel qui rend le mieux compte de l’objectif de ces premiers écrivains. Après la conquête, explique-t-il, vient la phase de reconnaissance, de prise en main effective de la colonie. Ces premiers écrivains qui tirent partie de la vogue de l’exotisme pourvoient le public par leurs commanditaires d’informations parfaitement exploitables sur le plan de l’administration et de la politique.

Il va sans dire que l’identité culturelle n’est pas la préoccupation de ces écrivains qui opèrent dans un contexte où on la refuse aux Noirs. Le monde de l’Abbé Boilat s’avère tristement manichéen. Ce qui ne précède pas de la civilisation occidentale, ce qui n’est pas d’essence chrétienne ne peut-être que d’obédience diabolique et appelle sa destruction par la colonisation des esprits. On sait ce que la politique d’assimilation culturelle a de redevable à cette position.

On comprend de même que les premiers écrivains noirs, à la suite de leurs prédécesseurs métis, ne posent pas les problèmes d’actualité en termes d’identité culturelle, de conflits culturels. Les maîtres du moment affichent le mépris le plus total pour les cultures africaines, mépris que fonde une totale ignorance des réalités locales. Ils les encouragent à développer une littérature du progrès, du mouvement et non de la résistance culturelle. Ces écrivains sont tous convaincus de la légitimité de la colonisation qui a engendré la paix et une relative prospérité économique. Le premier préfacier de la Bataille de Guilé, en 1912, voit dans l’oeuvre de Duguay Clédor le signal le plus évident du redressement moral (du Sénégal) et son évolution vers le progrès » [6]. Mapaté Diagne dans les Trois Volontés de Malic [7] n’a pas besoin de porte-parole, il s’improvise thuriféraire de l’action coloniale. Il s’exalte parce qu’elle se résume à ses yeux à la pacification et à la modernisation. En fait, Mapaté est le premier écrivain à jeter un regard sombre sur les traditions et cultures africaines, à porter sur elles une condamnation sans partage. Il n’est pas loin d’y voir ce que Robert Randeau baptisera « les fatalités ancestrales » [8] des Africains. Il refuse tout débat culturel. L’Afrique profonde, l’Afrique des traditions ne peut à ses yeux enfanter que le désordre, la régression. Pour aller de l’avant, il faut jouer loyalement la carte de la colonisation. Son héros choisit le monde nouveau que les étrangers, les colons, sont entrain d’imposer. Il condamne l’inertie de l’Afrique traditionnelle devant les perspectives de changement qui sont ouvertes. Il précise que « ce n’est pas le moment de parler d’origine et de caste. Les hommes se distinguent par le travail, par l’intelligence et par leurs vertus. Nous sommes gouvernés par la France, nous appartenons à ce pays où tous les hommes naissent égaux » [9]. En fait, Mapaté jette sur les réalités culturelles africaines le même regard que les colons. Il devait pourtant être l’initiateur de nombre de thèmes qui ont fait la fortune du roman africain.

L’auteur de Force-Bonté [10] n’accorde pas d’attention particulière au problème culturel. De cela, on connaît les raisons. Bakary Diallo fait figure de transfuge. Il s’est évadé du monde peul sans pour autant s’imposer dans le contexte français. A son départ pour l’armée française, sa jeunesse ne pouvait que traduire son manque d’expérience. Inculte et analphabète, il ne pouvait mener en Europe qu’une existence marginale. Le débat culturel n’occupe pas de place dans son œuvre qui est vouée à l’exaltation de la France et à une postulation de la fraternité – hélas trahie.

Ces premiers écrivains jouent la carte de la colonisation en toute sincérité. Ils occultent la dimension culturelle de la rencontre de l’Europe et de l’Afrique. Cela est d’autant plus singulier que Duguay Clédor était parfaitement informé de l’évolution du panafricanisme dont il avait rencontré les leaders [11] et que Mapaté était un enseignant averti. Ces écrivains sont moins préoccupés d’illustrer l’identité culturelle que de convaincre, de séduire le public du moment et de servir de caisse de résonance à la propagande colonialiste. A l’exception de Bakary Diallo, ce sont ou des métis de Saint-Louis ou des habitants des « quatre communes du Sénégal ». Le concept d’identité culturelle, partout implicité, cependant, n’est perceptible que chez leurs préfaciers. Celui de la Bataille de Guilé se démarque du contexte traditionnel, celui de Force-Bonté, pourtant homme de gauche, s’embarrasse de coquetteries d’inspiration paternaliste. On comprend que toutes ces œuvres aient été accueillies sur l’heure avec ferveur tant par les colons que par les Africains. Elles témoignent en fait d’une occasion manquée par les colonialistes, d’une période où les Africains étaient disposés à s’intégrer à la politique d’assimilation, à marchander leur identité culturelle contre le progrès et la modernisation.

Au vrai, on ne relève de signe avant-coureur du dépassement de cette situation que dans la préface de L’esclave [12] où Félix Couchoro, qui vivait en Afrique, donc à l’écart du courant africaniste aborde – certes avec force gaucherie – le problème de l’identité culturelle.

Il n’a pas été touché par la grâce africaniste. Son information trop mince ne lui permet pas de poser le vrai problème en terme adéquat. Il affirme l’unicité de la nature humaine et récuse la distinction entre « êtres civilisés et sauvages ». Il s’évertue à montrer que les prétendus sauvages sont capables de passions, de dévouement, que l’amour, la religion, les plaisirs de l’esprit occupent leurs vies. Couchoro ne revendique aucune identité culturelle, il essaie d’obtenir pour l’Afrique un statut de culture Universelle. Quand bien même il ne saisirait pas en toute lucidité la finalité de son action, qu’il définirait les termes de sa quête sans s’être au préalable libéré de l’idéologie du moment, il aurait ressenti comme un besoin profond de récuser l’habitude prise de procéder comme si l’Afrique était dépourvue de culture. Couchoro a cependant tout contre lui, l’heure est au colonialisme triomphant, sûr de lui-même et dominateur. Les élites africaines n’ont pas d’autre choix que l’adhésion pleine et entière à cette politique.

 

Au vrai, les mutations procèderont de l’africanisme dont l’effet en Afrique même est comme feutré et par trop atténué par la distance. Il y touche plus les colons que les indigènes, plus les administrateurs des colonies Delafosse, Brevié et autres… que les élites politiques ou intellectuelles africaines. La force du courant africaniste est telle au lendemain de la première guerre mondiale parmi les responsables de la colonisation que les prises de positions se multiplient et qui sont favorables à la définition d’une politique qui tienne compte des réalités culturelles. Ce point de vue sous-tend l’essai de Georges Hardy, Pour une conquête, Morale [13]. Il y affirme la spécificité des cultures africaines qu’il ne tient pas pour égales aux cultures européennes, il plaide cependant en faveur de leur insertion dans les programmes scolaires.

C’est sans conteste à Paris que le courant africaniste atteindra de plein fouet les romanciers de la seconde génération qui placeront le problème de l’identité culturelle au centre de leurs productions. Toutes leurs œuvres se feront l’écho du débat culturel, qui porte sur l’identité, la diversité culturelle, les mutations et le métissage culturel. Ce dernier thème ne doit pas être séparé de la dimension politique. Il va sans dire que dans le contexte de la colonisation pure et dure des années trente, toute revendication de l’identité culturelle africaine aurait été sévèrement réprimée. Poètes et romanciers pour faire passer la pilule l’ont assortie de la profession de foi de métissage culturel. En définitive, on ne peut leur trouver rien de subversif ni de véritablement original, car ils se plaçaient dans le sillage de G. Hardy et des plus progressistes des agents de la colonisation.

Ousmane Socé, le premier, donne dans Karim [14] une illustration convaincante de la spécificité culturelle. Mais à peine l’a-t-il fait entrevoir qu’il se préoccupe de prêcher le mouvement tant il redoute l’immobilisme que peut engendrer une trop grande fascination du passé. Il ne perçoit pas l’identité culturelle en terme de conflit ni même dans un contexte de domination. Il ne l’appréhende pas pour la défendre, ou pour revendiquer un quelconque progrès politique. Il a conscience de se trouver pris dans un monde en pleine mutation, de devoir combattre toute régression, tout immobilisme culturel. Il jette sur les mœurs et traditions un regard critique. Adhérent pleinement à l’idéologie de l’Eurafrique, qui postule l’émergence d’un ensemble franco-africain, il professe la nécessité de procéder à un tri des valeurs culturelles africaines pour ne retenir que les valeurs fécondantes à même d’être à l’origine du monde nouveau. Socé, en fait, s’attache plus aux implications de la modernisation qu’au débat autour de l’identité.

Il en va différemment de l’auteur de Doguicimi [15] qui a l’avantage d’être un ethnologue de formation et aussi d’avoir été plus impliqué dans le mouvement africaniste. Ici, l’intention d’affirmation, de revalorisation de l’identité culturelle est plus nette, plus systématique. C’est-à-dire que Hazoumé la précise, la décrit en tout, dans toutes les manifestations de la vie culturelle, religieuse, sociale… Là où Ousmane Socé est préoccupé par l’urgence de l’intégration de l’Afrique dans un ensemble moderne et dynamique, Hazoumé s’emploie à réparer une injustice, à laver l’Afrique de l’accusation de barbarie, d’être un néant culturel. Il explique, il décrit, il justifie. Il fonde la spécificité culturelle sur l’antiquité de la race et des croyances. S’il ne nie pas la nécessité d’une évolution, il trouve plus urgente la dénonciation des thèses assimilationnistes. C’est ainsi qu’il s’emploie à faire ressortir l’extrême profondeur, la grande richesse et diversité de l’identité culturelle de ses ancêtres. L’identité permet de rendre compte de la nature des pouvoirs politiques, des rapports sociaux, des croyances. La description de cette identité lui offre l’occasion d’infliger un démenti à ceux qui voyaient partout ou de la barbarie ou de l’exotisme primaire.

Ni Ousmane Socé, ni Paul Hazoumé ne sont des théoriciens, ils se bornent à donner un prolongement littéraire à un débat très riche qui se déroule autour d’eux. Si l’on tient compte des rapports entre ces écrivains et leurs parrains négrophiles acquis à la colonisation, on comprend que Socé et Hazoumé aient fonctionné comme des écrivains de transition entre ceux de la période de l’identité implicitée ou occultée et ceux de l’identité revendiquée parce qu’ils auront saisi le message africaniste dans toute son ampleur.

En cela, ils sont servis par les circonstances, au lendemain de la guerre. Disons pour aller vite que l’école de la négritude s’exprime avec netteté. Elle évolue d’une phase où le débat culturel était prioritaire à une autre ou le culturel est mis au service de la politique et où l’africanisme trouve un écho plus grand auprès des intellectuels français. Il insère son action dans une perspective militante. Le développement du thème de l’identité culturelle ne confine plus à une certaine forme de romantisme passéiste. Il sous-tend la contestation. L’identité culturelle est conçue comme une arme dans la lutte contre l’asservissement, l’assimilation culturelle des Africains. Cette idée lancée avant la guerre par les poètes, ne triomphe chez les romanciers que dans les années 50. Il faut voir à cette mutation une influence de l’émergence de jeunes écrivains militants et celles des thèses existentialistes sur l’engagement.

Camara Laye dont l’Enfant Noir [16] a, sans conteste, été le plus grand succès romanesque de l’époque, s’attache à préciser l’identité culturelle de son peuple sans donner la moindre coloration politique à son propos. On sait la querelle que l’on lui fit à cette occasion entre autre par ces jeunes écrivains dont l’avènement vient d’être mentionnée. Camara Laye n’avait pas eu d’autres préoccupations que d’évoquer l’univers de son enfance, son « royaume d’enfance ». La nostalgie que lui inspire cette évocation se confond avec elle qui habite l’Africain qui évoque ses origines culturelles. Il s’agit d’un monde en pleine mue et menacé de disparaître à jamais. On reprocha à Laye de n’avoir pas donné au thème de l’identité culturelle toute son ampleur, de ne l’avoir pas placé sous l’éclairage des préoccupations idéologiques et politiques de l’heure, d’avoir gardé le silence devant « les iniquités coloniales ». Senghor prit magnifiquement sa défense [17]. Il montra que la revendication de l’identité culturelle ne peut pas manquer d’avoir une dimension politique, que Laye pour n’avoir ni invectivé ni fait le procès du colon n’a pas moins ébranlé l’assise de son idéologie dominatrice. Il est singulier que dans le contexte de l’anticolonialisme dominé par l’idéologie de la négritude et l’africanisme, Camara ait centré son roman autour du thème de l’identité culturelle et que voulant dénoncer le tyran qui conduisait son pays à la ruine, dans Dramous, [18], il n’ait pas développé le même thème. A combat différent stratégie différente.

Il est vrai que Abdoulaye Sadji avait déjà adopté la même attitude. Son œuvre dit son attachement à l’identité culturelle mais sans implication politique. Il l’a développé sur un plan social. On suit la thématique profonde de son œuvre romanesque. Il y s’agit toujours de personnages séduits par le modernisme ou habités par la volonté de se libérer de l’emprise des traditions et qui font l’objet de sanctions odieuses, sanglantes ou mortelles.

Il excelle, dans son rôle de défenseur des traditions, à décrire la nouvelle société avec ses nouveaux riches ostentatoires, sa nouvelle élite sans racines culturelles ou historiques profondes.

Abdoulaye Sadji, comme Camara Laye, situe la description de l’identité culturelle au cœur de son œuvre : Alors que Laye se borne à la décrire sous des dehors nostalgiques, Sadji s’improvise son ardent défenseur.

C’est cependant avec les romanciers camerounais que la défense de l’identité culturelle prend une allure nettement militante. Si l’on parle de temps fort de l’école de la négritude, c’est pour une large part parce qu’à cette époque un thème tel celui de la revendication d’identité culturelle se trouve développé par les plus doués des poètes et des romanciers.

Oyono tout à son jeu de massacres ne le perd pas de vue. En fait, l’analyse attentive de son œuvre fait ressortir la place centrale de ce thème. Douglas Alexander explique lumineusement [19] la fin sanglante de Toundi, le héros-victime de Une Vie de Boy [20] en se référant à son initiation, à son éloignement des réalités culturelles de son ethnie. Privé de son identité culturelle, Toundi fait une lecture erronée des choses dans le monde des colons où il évolue. Les mêmes causes entraînant les mêmes effets, les déboires de Meka dans Le Vieux Nègre et la Médaille [21] sont imputables à sa volonté de se conformer à l’image de lui que les colons lui imposent. Par excès de complaisance, il veut s’éloigner des siens, se rapprocher de ses maîtres, non pas se couper de son identité culturelle mais la rejeter au second plan. On le punit par où il a pêché. Ses chaussures font de lui un martyr et sa veste le couvre de ridicule. Autant de déguisements dont la mission revenait à masquer son identité culturelle.

Il ne faut pas tomber dans le piège tendu par Oyono qui sait faire rire pour que son message passe et que sa pensée profonde échappe au lecteur peu averti. L’épisode du « mbila » n’est pas que drôle. Il recèle la leçon d’ensemble et dit la pensée profonde de l’auteur. Les tentatives de Méka de se démarquer des siens, d’occulter son identité culturelle, ont été légitimement sanctionnées par la souffrance, l’humiliation et la solitude. Autrement dit, Oyono professe l’adhésion profonde à l’identité culturelle africaine.

Son compatriote M. Beti, au regard de ce problème a adopté une attitude plus complexe. On croyait l’avoir compris. Son retour à la littérature après une éclipse de quelque douze ans a permis de se rendre compte que sa position n’a pas évolué mais que le contexte a commandé la mise en relief de tel aspect plus que d’un autre. D’une façon générale, les œuvres de la première période, celles du roman anticolonialiste, sont mises au service de l’identité culturelle. Partout, Beti, se présente comme un défenseur de l’identité culturelle, farouche et doué. Pour aller vite disons que dans Le Roi Miraculé [22], il montre comment les Africains, ici, en référence à leur culture, avaient mis en place un système politique qui réussissait à sauvegarder l’ordre et la paix et que le zèle missionnaire de Le Guen fera voler aux éclats. Dans le Pauvre Christ de Bomba [23], il avait fait développer par un Drummont repenti la thèse du « Vase déjà cuit ». Ce missionnaire qui avait employé toutes ses forces pendant vingt ans à combattre les manifestations culturelles africaines, converti enfin à l’africanisme, s’en fait le chantre. Il comprend enfin que son rôle s’apparentait à celui d’un vandale et qu’il consistait à saccager l’identité des Africains.

De tout cela, on pouvait conclure que Beti se rangeait parmi les défenseurs de l’identité culturelle. En fait, il n’a jamais perdu de vue que les traditions constituent le fondement de l’identité et que certaines traditions sont surannées rétrogrades, inopérantes, ou en porte-à-faux avec les aspirations de la jeunesse et les exigences de la modernisation. Dans le contexte colonial, il fallait faire front contre l’adversaire commun, assurer l’échec de l’entreprise d’anéantissement de l’identité culturelle, Béti n’en a pas moins essaimé son œuvre d’indices, d’éléments dont la signification profonde n’apparaît qu’aujourd’hui. Ce défenseur supposé des traditions n’a jamais laissé passer l’occasion d’attaquer les partisans de la polygamie, et cela lorsqu’il en montre l’intégration profonde dans les traditions. Il n’a jamais épargné les gardiens de l’autorité traditionnelle, les pères égoïstes disposant d’une autorité tyrannique, les chefs complaisant envers les colons, irresponsables, qui rançonnent leurs sujets pour mener une vie de fainéantise, augmenter leur harem ou célébrer des fêtes interminables. Il en veut tout particulièrement aux vieillards loquaces, orateurs truculents, chargés de gouverner un monde qu’ils ne comprennent pas. D’une façon générale, le Mongo Béti de cette époque considère déjà les traditions comme une source inépuisable d’attitudes, de comportements, de pensées conformistes, immobilistes et rétrogrades.

L’administrateur Leguen l’a fort bien compris : les traditions sont les meilleures alliées de la colonisation. Sa doctrine, c’est qu’il ne faut y toucher « que d’une main tremblante ». Il assure leur survie contre l’avis de Palmiéri qui se pique de libéralisme africaniste.

On le voit, il n’y a ni rupture ni reniement de sa position antérieure. Perpétue ou l’habitude du malheur [24] permet de saisir la continuité de la pensée de Béti qui est revenu sur la question tout dernièrement pour affirmer que les « Africains se meuvent dans une réalité très riche où la tradition n’est qu’une donnée parmi bien d’autres. Comme tous les autrespeuples,ils entretiennent avec leurs traditions des rapports qui changent en fonction des exigences d’adaptation sans cesse renouvelées, tantôt faisant bon ménage, tantôt entrant en conflit avec elles » [25].

Ainsi, c’est avec Béti que s’ouvre l’ère de la mise en question de l’identité culturelle. Son silence de douze ans explique que pendant longtemps, il ne participe pas à ce débat qu’il a contribué à lancer…

En fait, l’éclatement de l’identité reste inséparable du procès de la négritude. Toutes deux sont mises en question dans le même débat.

Au lendemain, de l’indépendance africaine, le silence n’est plus de mise et les interrogations se multiplient sur la thèse de la négritude, sur un plan conceptuel et politique. Les insuffisances de la théorie décelées, la mesure est prise de l’écart des leaders entre les professions de foi et la pratique.

En Afrique même, les dictatures se succèdent et le néocolonialisme gagne du terrain. La négritude comme les traditions inspire de plus en plus en méfiance. On y voit le moyen d’endormir le peuple, de le détourner de l’action, de la conquête de sa véritable indépendance qui ne peut-être que politique et économique. Il y a comme un désenchantement que légitime l’apparent échec de l’indépendance qui n’a pas tenu ses promesses. On se retourne contre ce qui avait été adulé jusque-là. Autant le combat politique contre la colonisation se fondait sur la référence à l’identité culturelle africaine qu’il fallait bannir du combat toute référence à elle. On comprend que les romanciers, en écho à cette situation, aient largement ouvert leurs œuvres au procès de la négritude, de l’identité, des traditions. Les attitudes vont de l’hostilité, au pessimisme, à une postulation d’un renouveau fondé sur une autre approche des traditions et de l’identité.

Il faut retourner à Béti qui, à son retour à la littérature, reprend et développement des thèmes en germes dans son œuvre anticolonialiste. Perpétue dit en clair ce qui se lisait en filigrane, dans les œuvres antérieures défavorables. Elles constituent comme une arme – certes d’un autre âge mais terriblement efficace – entre les mains de la mère de Perpétue et du sorcier mis en contribution. Les traditions, jusque-là décrites comme le climat de l’identité, sont pour la plupart présentées comme des éléments rétrogrades qui favorisent l’oppression si elles n’engendrent pas la régression culturelle. En vérité, le nouveau Béti qui se présente comme un adversaire résolu des théoriciens de la négritude déplace le problème. Il s’inquiète moins de l’identité culturelle que de rapports politiques. La question de l’identité occupe si peu de place dans ses dernières œuvres que l’on peut en conclure qu’il situe l’essentiel ailleurs.

A l’hostilité de Béti fait écho le pessimisme d’autres romanciers. Bhely-Quenum développe dans le Chant du Lac [26] le thème de la mort des dieux qui entraîne un bouleversement des croyances et postule une mutation de l’identité. Il reste que le cas le plus significatif se trouve être celui de Kourouma dans Les Soleils des Indépendances [27] où l’auteur semble illustrer l’assertion de Cheikh Anta Diop selon laquelle « un peuple sans conscience historique est une population » [28]. Il dénonce le reniement par l’Africain d’aujourd’hui de ses origines et traditions et développe abondamment le thème de la « la bâtardise », de la rupture d’avec l’identité culturelle.

Il est significatif que le héros Fama Doumbouya, au fur et à mesure qu’il s’éloigne de la capitale, de la modernité, pour retourner à l’ancien foyer de la civilisation malinké, pour tourner sa pensée vers le passé et la tradition, confère aux choses une plus grande épaisseur.

Il place son roman sous le signe de la rupture d’une certaine continuité historique et culturelle. Il y a rupture ou désaccord, entre l’état moderne et l’identité. L’état né de l’indépendance n’est pas malinké, il n’est pas gouverné selon les traditions malinké. C’est une mosaïque de peuples, de cultures. Il se réfère à une multiplicité d’identités qui ne sont pas forcément conciliables. L’évasion des règles de l’univers de la tradition, l’éclatement de ses structures ont engendré un nouveau type de rapports entre les hommes et la nature et parmi les hommes. Aux rapports anciens a été substitué un pragmatisme qui se détourne de l’identité, prétend en faire naître une nouvelle qui recouvrirait les limites de l’Etat. Cette tentative légitime l’effondrement du système traditionnel ou sa déliquescence et donne libre cours à l’individualisme, à l’égoïsme, à la volonté de puissance et à l’arbitraire. La perte de l’identité, le départ de l’identité dans les Soleils des Indépendances sont les signes avant coureurs de la mort de la tradition et de la dérive de l’Afrique.

Ce pessimisme, peu s’en faut, n’est pas partagé par tous. Des romanciers développent le thème du renouveau. Un premier groupe de romanciers ne s’appuie pas outre-mesure sur l’identité. Bien souvent ce thème, s’il n’est pas ignoré est passé au second plan. Sembène dans O Pays Mon Beau Peuple [29] donne l’exemple d’une tentative de renouveau économique et social. Il n’envisage pas l’éclatement des structures sociales de ses protagonistes, leur identité culturelle sera sauvegardée même si elle ne constitue en rien une préoccupation prioritaire – Dans Afrika Ba’a [30] R. Modou Mvomo, devant le marasme économique et les désordres sociaux, donne l’exemple d’un retour aux sources redynamisées par des idées novatrices et salvatrices. Sa nouvelle communauté se crée par delà les clivages ethniques. L’identité telle qu’entendue jusque-là ne joue plus de rôle déterminant. L’identité nouvelle n’est cependant pas la somme des identités constituant le groupe. Elle se résume à un ensemble d’aspirations, de postulations. Il s’agit d’une nouvelle forme de socialisme qui se tourne vers l’avenir bien plus qu’il ne se préoccupe d’enracinement dans un contexte suranné.

Seydou Badian, dans Le Sang des Masques [31] préconise le renouveau par un regain de spiritualité, par le retour aux sources de la spiritualité, de l’identité. Il explique les désordres sociaux, les problèmes du moment par l’éloignement des sources vives de l’ethnie, des traditions fécondantes. Il ne s’agit pas de s’enfermer dans un ghetto culturel mais d’un retour propice au métissage. Il s’agit de retrouver cet élément de l’identité culturelle jusque-là comme ignoré et sans lequel l’Afrique ne peut que perdre son âme. Cette prédication de Badian, poétique, et on ne peut plus attachante, est comme en rupture avec les impératifs du moment, l’Africain ayant plus besoin de richesses matérielles qu’il n’a faim de dieu ou de religion qui ne lui ont jamais fait défaut.

Les contestateurs de l’identité y ont toujours vu comme une forme de fuite en avant ou de diversion.

Enfin les romancières qui se sont révélées au Sénégal ces dernières années n’ont pas conféré une place centrale à l’identité culturelle dans leurs œuvres. Une si longue lettre [32] comme la Grève des Battu [33] respectivement de Mariama Ba et Aminata Sow Fall posent des problèmes d’actualité sur le rôle, la place de la femme dans la société. Si l’identité n’est ni revendiquée, ni contestée, elle reste tout simplement implicite.

Au terme de cette étude, l’on peut conclure par la diversité des approches du thème de l’identité culturelle dans le roman. En fait toutes ses variations sont commandées par des mutations d’ordre politique et social. Il apparaît que ce problème ne se pose pas de la même manière selon la période envisagée de l’histoire littéraire ou de l’histoire tout court, il est singulier qu’au lendemain de la conquête coloniale, aucune voix ne se soit élevée au nom de l’identité culturelle. Il est vrai que la première élite coloniale africaine est pour l’essentiel moins acquise au traditionalisme qu’elle ne subit la séduction des idées nouvelles.

C’est l’école de la négritude qui a conféré au thème de l’identité culturelle sa résonance la plus forte. Les romanciers se sont vite libérés de ce qui pouvait passer pour un piège, ils ont toujours su éviter de donner dans l’immobilisme par leur promptitude à épouser la moindre évolution de la société ou des idées, ils se sont gardés des dangers de l’auto-exaltation et du narcissisme culturel. S’ils ne rejettent ni ne contestent l’impact de ce problème, ils le relativisent en ce sens qu’ils ne le comptent plus parmi les urgences ni parmi les priorités.

Cette attitude peut s’expliquer à la lumière du procès de la négritude conduit dans le roman de l’Afrique indépendante. L’exploitation du thème de l’identité culturelle confinant au passéisme, les romanciers se sont tournés vers des préoccupations plus actuelles.

C’est peut-être parce que l’identité ne joue plus de rôle de premier plan que le roman africain, dans les frontières d’un état donné, n’est pas régionaliste, et que des régions entières, des ethnies fortement enracinées dans le terroir ne sont pas représentées. Mais c’est là le sujet d’un autre exposé qui pourrait développer le thème : « de l’identité culturelle à la conscience nationale dans le roman africain ».

 

 

[1] Professeur, Doyen de la Faculté des Lettres, Dakar.

 

[2] Rolan Lebel : Histoire de la littérature coloniale en France, Paris : Larose, 1931

 

[3] Martine Astier-Loutif : Littérature et colonialisme, l’expansion coloniale vue dans la littérature française (1871-1914), Paris : Mouton, 1971

 

[4] Abbé Boilat : Esquisses Sénégalaises, Paris, Arthur Bertrand, 1853 (rérédition Karthal, 1984, préface de Abdoulaye Bara Diop.)

 

[5] Paul Holle et Frédéric Carrère : De la Sénégambie française, Paris, 1855

 

[6] Amadou Duguay Clédor Ndiaye : La Bataille de Guilé, Saint-Louis, Imprimerie du Sénégal, 1913.

 

[7] Amadou Mapaté Diagne : Les Trois volontés de Malic, Paris, Larose, 1920

 

[8] Dim Deobson : L’Empire Mogho Naba, Paris, Ed. Montchrétien, 1937, (préface de R. Randeau)

 

[9] Amadou Duguay Clédor Ndiaye : La Bataille de Guilé, Saint-Louis, Imprimerie du Sénégal, 1913.

 

[10] Bakary Diallo : Force Bonté, Paris : Rieder, 1926

 

[11] Lamine Guèye : Itinéraire Africain, Paris : Présence Africaine, 1966, p. 19.

 

[12] Félix Couchoro : L’Esclave, Paris : la Dépêche Africaine, 1929

 

[13] Georges Hardy : Pour une Conquête Morale, Paris : A. Colin, 1917

 

[14] Ousmane Socé : Karim, Paris, NEL, 1935

 

[15] Paul Hazoumé : Doguicimi, Paris, Larose, 1938

 

[16] Camara Laye : L’Enfant Noir Paris, Plon, 1953

 

[17] L.S. Senghor : Laye Camara et Lamine Diakhaté ou l’art n’est pas d’un parti in Liberté 1, Négritude et Humanisme, Paris : Le Seuil, 1964, pp. 173-174.

 

[18] Camara Laye : Dramouss, Paris, Plon, 1966

 

[19] Douglas Alexander : Le tragique dans les romans de Ferdinand Oyono, Présence Francophone, n° 7, 1973 pp 24 à 30

 

[20] Ferdinand Oyono, Une vie de Boy, Paris, Julliard, 1954.

 

[21] Ferdinand Oyono : Le vieux nègre et la médaille, Paris Julliard, 1956.

 

[22] Mongo Béti : Le Roi Miraculé, Paris, Buchet-Chastel, 1958

 

[23] Mongo Béti : Le pauvre Christ de Bombe, Paris, Buchet-Chastel, 1956

 

[24] Mongo Béti : Perpétue ou l’habitude du Malheur Paris : Buchet-Chastel, 1974

 

[25] Mongo Béti : Traditions et l’identité, in Négritude Tradition et Développement, Paris, Ed Complexe 1978

 

[26] Olympe Bhely-Quenum : Le Chant lac, Paris : Présence Africaine, 1965

 

[27] Ahmadou Kourouma : Les Soleils des Indépendances, Paris, le Seuil, 1970.

 

[28] Cheikh Anta Diop : De l’Identité Culturelle, in Colloque sur l’Affirmation de l’Identité Culturelle et la formation de la conscience nationale dans l’Afrique contemporaine, Paris, Unesco, 1981

 

[29] Ousmane Sembène : O pays mon beau peuples, Paris, Présence Africaine, 1957

 

[30] Remy Modou Mvomo : Afrika Ba’a Yaoundé, CLE, 1969

 

[31] Seydou Badian : Le Sang des Masques, Paris : R. Laffont, 1976

 

[32] Mariama Bâ : Une si Longue Lettre, Dakar : NEA, 1977

 

[33] Aminata Sow Fall : La Grève des Bàttu, Dakar, NEA, 1979